Faire le bilan des réalisations en matière des droits de l'Homme au Maroc est une entreprise pour le moins difficile et pour certains hasardeuse. La dynamique que vit le Royaume depuis au moins deux décennies est, de l'avis d'observateurs avertis et objectifs, une réalité tangible qui a des prolongements concrets dans divers domaines. C'est aussi une dynamique qui induit des transformations de fond tant au niveau institutionnel que législatif. Mais ce qui retient le plus l'attention quand on s'intéresse de près à cette expérience, c'est le fait que tous ces changements observés ont été inscrits dans une logique de concertation, de large participation et de dialogue ouvert entre tous les acteurs de ce champs particulièrement sensible. L'autre particularité de cette dynamique tient au fait qu'elle a été conduite en dehors de toute tentative d'aller vers un quelconque consensus mou, ou vers un unanimisme aveugle. Tout au contraire, toutes les sensibilités se sont exprimées et souvent ceux qui les portent ne sont pas allés par le dos de la cuillère. Ils s'ingénient même à décrier ce qu'ils considèrent comme «l'incapacité des institutions en place à servir pleinement la cause des droits de l'Homme». Il nous faut, a contrario, nous rappeler que le Maroc a fait montre d'un courage politique inédit en décidant solennellement de tourner, progressivement, mais de manière définitive, le passé sombre des années de plomb. Il faut juste nous représenter toute cette formidable dynamique créée dans le cadre de la démarche de la justice transitionnelle et ce qu'elle a ouvert comme perspectives dans ce domaine. Le travail accompli dans le cadre de l'IER fait aujourd'hui école parmi les expériences de justice transitionnelle à travers le monde. Il ne s'agit point ici d'être flagorneur ni faire état d'un triomphalisme béat. Il s'agit tout juste d'être réaliste et positif si nous voulons réellement aller de l'avant. Les voix considérées, par certains comme dissonantes, font au contraire, partie intégrante de ce paysage pluriel qui constitue désormais l'assise concrète de la culture des droits de l'homme au Maroc. Il est même souhaitable que toutes les garanties soient assurées à cette expression de la différence pour qu'elles puissent mettre la lumière sur toutes les zones d'ombre là où elles se trouvent. L'enjeu fondamental est maintenant de s'assurer que les préceptes nobles des droits humains puissent investir tous les espaces de vie de notre collectivité en parfaite harmonie avec les transformations structurelles que nous apportent le train de réformes entreprises à tous les échelons de gestion de la vie de notre pays.