Pour Sion Assidon, membre fondateur de Transparency international au Maroc, l'attaque des forces israéliennes contre la flottille humanitaire est un acte barbare, en droite ligne de l'assassinat de la militante pacifiste Rachel Corrie. Tout en soulignant que la Palestine de demain, celle qui naîtra de la défaite de l'apartheid sioniste, sera un Etat démocratique où tous ceux qui reconnaîtront les droits inaliénables du peuple palestinien à vivre libre sur sa terre – y compris les droits des réfugiés au retour – pourront coexister démocratiquement, quelle que soit leur religion. Al-Bayane : Comment qualifiez-vous l'attaque des forces israéliennes contre la flottille humanitaire ? Sion Assidon : C'est une abomination. Un acte barbare, en droite ligne de l'assassinat de la militante pacifiste Rachel Corrie. Du point de vue du droit international, il s'agit d'un crime de guerre : attaque de civils dans des eaux internationales par une force militaire. Si le Maroc ratifiait le traité de Rome, il serait habilité à poursuivre ce crime devant la Cour Pénale Internationale. Et, du point de vue politique, j'analyse cet acte barbare ainsi : C'est l'expression exacte de la position israélienne par rapport au reste de la planète : pour aller jusqu'au bout du blocus de Gaza qui est un crime de guerre et un crime contre l'humanité, ils sont prêts à aller jusqu'aux pires crimes, quitte à élargir le front de leurs adversaires. Ils viennent ainsi de perdre la Turquie. L'Egypte qui appliquait pour leur compte le blocus à Rafah a été obligée d'ouvrir la porte. Est-ce que cela va mener à isoler Israël sur la scène internationale surtout après la condamnation de l'Union européenne ? -Oui, l'opinion publique internationale ouvre chaque jour plus les yeux : le sionisme est un autre apartheid. Mais les condamnations de l'Europe sont ambiguës. Il arrive que l'Europe exprime des positions qui semblent moins clairement partisanes que les USA. Ce ne sera pas la première fois. Mais on doit se demander si ces positions reflètent une réelle différence. L'Europe a un levier très clair d'expression par rapport à Israël avec laquelle elle est liée par des accords préférentiels. La deuxième clause de l'accord d'association Israël CEE concerne le respect des droits humains. Clause qui prévoit la suspension de l'accord en cas de violation des Droits Humains. Avez-vous jamais entendu que cette clause a été mise en œuvre ? Faut-il ici citer la liste des violations ? Ce qui s'est passé à Gaza ne suffit-il pas ? Aujourd'hui de nombreux pays européens – la France par exemple - laissent entrer sous étiquette « Made in Israël » - avec les avantages qui y sont liés – des produits des colonies, en violation de la loi internationale. Aujourd'hui, l'Etat français, pour ne citer que lui, prête main forte à des entreprises telles que Veolia et Alstom, clairement engagées dans des actes qui relèvent de la complicité de crimes de guerre (construction du tramway d'El Qods, qui relie les colonies périphériques au territoire de 1948). Dans la réalité, l'Europe regarde Israël comme un autre Etat européen, et ce point de vue a été exprimé publiquement maintes fois par des dirigeants européens. Le monde occidental (USA/Europe) a admis Israël au sein de leur club : l'OCDE. Qu'en est-il des Etats-Unis ? -Les USA continuent à être le parapluie d'Israël. Ils lui ont encore une fois permis de sortir du Conseil de Sécurité avec le minimum de dégâts : la commission d'enquête israélienne ! C'est demander au criminel lui-même d'enquêter sur son propre crime ! Les USA ont toujours besoin d'un bon gardien pour le pétrole. Obama a dit clairement pour le jour de la Nakba que le soutien des USA à Israël est éternel. Actuellement on constate qu'il y a une récupération de la cause palestinienne par les islamistes, que pensez-vous ? -La cause palestinienne n'appartient à personne, et du même coup à tout le monde. Plus nous serons à nous solidariser avec ce peuple, mieux ce sera. Qui empêchait par exemple des parlementaires marocains de toutes tendances de s'embarquer dans un des navires de la flottille de la Liberté qui cherche à briser le blocus de Gaza. ? Ceci dit, chacun regarde la cause palestinienne d'une certaine manière. Les sionistes – qui proclament un Etat juif – en ont clairement fait une affaire religieuse. Il est normal que certains – en miroir – vont voir aussi la question palestinienne, qui est – de mon point de vue - une cause de libération nationale et de droits humains, comme une guerre de religions. Ce qui est une erreur. L'armée de Mohamed, qui a remporté victorieusement la bataille de Khaybar, n'a pas besoin de revenir. L'ennemi n'est pas le même. Contrairement à ce que pensent les sionistes, l'équation SIONISME = JUDAISME est fausse. Comme aussi l'équation inverse, JUDAISME = SIONISME. Il n'y a qu'à écouter les voix toujours plus nombreuses et véhémentes qui s'élèvent parmi les gens qui se définissent comme Juifs. La Palestine de demain, celle qui naîtra de la défaite de l'apartheid sioniste, sera un Etat démocratique où tous ceux qui reconnaîtront les droits inaliénables du peuple palestinien à vivre libre sur sa terre – y compris les droits des réfugiés au retour – pourront coexister démocratiquement, quelle que soit leur religion.