Abdellah El Bidaoui La disparition tragique du chanteur populaire Abdellah El Bidaoui est une grande perte pour la scène musicale marocaine. C'est en ces termes que le poète et spécialiste incontournable de l'art de la Aïta, Hassan Nejmi, évoque la perte de cet artiste. Feu Abdellah El Bidaoui, soutient-il, était l'un des derniers représentants et un des meilleurs interprètes de la Aïta Marsaouia ou Statia à la manière des grands noms de ce genre musical entre autres, Cheikha Bent Meryem, Cheïkha Ben Loukid, Cheikha El Meskinia, Cheikha Fatima Koubass, Cheikha El Khaouda, Saheb Ben Maâti, Cheikha Fatima Zehafa et l'inégalable Bouchaïb El Bidaoui, un grand maître qui a été à l'origine de la naissance de la vocation de l'artiste disparu. «Peu de chanteurs populaires peuvent, en effet, égaler le talent et la manière de respecter le corpus de la Aïta dans sa dimension poétique et sur le plan de la mélodie et de la percussion», souligne l'ancien Président de l'Union des Ecrivains Marocains, auteur d'un livre de référence qui retrace l'histoire et les spécificités de ce genre musical depuis le 11ème siècle à nos jours «La Aïta : De la poésie orale et la musique traditionnelle au Maroc». (Ed Toubkal-2007). «Après la disparition dernièrement de Cheikha Hajja Hamounia et Fatna Bent Houcine, la scène artistique national perd aujourd'hui l'une des voix les plus puissantes et les plus mélodieuses de la chanson populaire», a-t-il dit dans une déclaration à la Map, soulignant la virtuosité du disparu dans l'interprétation des grands classiques du répertoire de la Aïta Marsaouia comme «Al Hadaouiat», «Rkoub Al Khayl» et la célébrissime «Kharboucha menana». «Kharboucha», une chanson très populaire que l'artiste disparu était le seul à même d'interpréter de la plus belle des manières comme le note son ami, le chanteur populaire Hajib qui, toujours sous le choc, évoque avec amertume la disparition tragique de feu Abdellah El Bidaoui pour qui il voue une grande admiration. Tout en soulignant les grandes qualités humaines du disparu, sa modestie et sa générosité, il se souvient de leur première rencontre en 1993, à une époque où notre interlocuteur commençait à peine à se faire connaître sur la scène artistique avec la sortie de son premier album «Oulah ma arftou» (littéralement, je jure que je ne le connais pas). «Nous avons interprété en duo une chanson populaire intitulée «Jnab Settat» et il m'a offert à la fin du spectacle sa bague en guise de témoignage de son amitié pour moi et pour mon interprétation», raconte-t-il, ajoutant que «malgré son long séjour en France, Cheikh Abdellah El Bidaoui, est resté toujours dans la mémoire des amateurs de ce genre musical comme étant un virtuose, un «Tebaâ» comme on dit dans notre jargon». Et il le restera toujours comme le confirme Hassan Nejmi, inconsolable et intarissable sur le sujet, soulignant que la beauté de la Aïta Marsaouia, un art qui prend ses origines dans la Chaouia-ouardigha et qui, contrairement à la Aïta Abdia, se caractérise par sa légèreté, sa gaieté et des paroles succinctes et très courantes dans le langage urbain. Abdellah El Bidaoui nous a quittés dimanche dernier, sur son lit dans son domicile à Mohammedia. Il est décédé dans des circonstances non encore élucidées. Selon les premiers éléments de l'enquête de voisinage, le défunt a regagné son domicile à bord d'un grand taxi vers 2h20 dans la nuit de samedi à dimanche et ce, après avoir animé une soirée à Casablanca. Il était accompagné de son chauffeur, lequel quitte la maison trois heures après au volant de la voiture du défunt. Une enquête a été ouverte pour élucider les circonstances de cette mort et ce, sur la base de l'autopsie qui sera effectuée sur le corps du défunt, les indices relevés par la police scientifique ainsi que les déclarations de la femme du défunt faisant état d'un conflit qui opposait son mari au chauffeur de celui-ci. Né en 1949 à Casablanca, feu Abdellah El Bidaoui a laissé derrière lui neuf enfants et un important répertoire.