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A bâtons rompus avec Rachid Andaloussi
«La ville doit être réfléchie en permanence»
Publié dans Albayane le 14 - 05 - 2013

- Réconcilier le Marocain et le Casablancais en particulier avec son identité, la modernité
- Réfléchir aux plans de rattrapage pour sauver le Grand casablanca
En se référant à Georges Simmel, grand sociologue de la ville, Rachid Andaloussi, architecte de renommée internationale et président de l'association «Casamémoire», indique que la ville est un espace de liberté et de relations sociales rationnelles. Deux concepts fondamentaux pour emprunter le chemin de la modernité, laisse-t-il entendre. Mais, le plus important pour lui, c'est de ne plus penser la ville avec les méthodes utilisées il y a presque 40 ans. En fait, il faut un travail en amont sur le plan d'aménagement global (PAG), insiste-il. Cela veut dire qu'il faut impliquer tout les acteurs concernés : sociologues, anthropologues, ingénieurs, architectes... Bref, l'urbanisme est une action collective, conclut-il. Les propos.
Al Bayane : Quel diagnostic faites-vous aujourd'hui de la situation du patrimoine de Casablanca ?
Rachid Andaloussi : Il est toujours difficile de faire un diagnostic quand on est dans le bain. Pour moi, le plus important aujourd'hui, c'est d'abord agir en permanence et sans désemparer, avec comme finalité, la sauvegarde du patrimoine de Casablanca, et ce nonobstant les difficultés et les obstacles. Toutefois, sans sombrer dans un nihilisme quelconque, je pense que les choses ont beaucoup changé, par rapport à la situation qui y régnait il y a une vingtaine d'années. Au sein de l'association Casamémoire, nous ne lésinons pas sur nos efforts pour mener un combat quotidien afin de sensibiliser la population locale, les acteurs sociaux... à la nécessité de la préservation de notre patrimoine culturel, qui constitue d'ailleurs une composante fondamentale de notre mémoire collective. Je dois préciser que notre action est focalisée en premier lieu sur le patrimoine du XXe siècle. Cependant, cela n'empêche pas qu'il y avait auparavant quelques difficultés. Je fais allusion au début des années de l'indépendance où l'élite marocaine (architectes, intellectuels, classe politique...) était en quête d'une identité quelconque. Cependant, cette quête n'était pas saine, du faite qu'elle s'inscrivait à l'opposé de ce qui existait avant.
Vous ne considérez pas alors qu'il s'agit de quelque chose de légitime ?
Effectivement oui. Parce qu'on sortait du protectorat et on voulait construire notre propre voie. En fait, c'est comme un bébé qui voulait imposer son caractère. Or le hic c'est qu'on a oublié qu'on avait un véritable trésor en face de nous, voire très proche de notre pays. Il s'agit en l'occurrence la modernité qui est l'une des identités fortes de notre pays. D'ailleurs, c'est le mouvement dans lequel les villes marocaines sont nées. Si on prend l'exemple de la ville Casablanca, il s'agit vraiment d'un laboratoire international d'architecture et d'urbanisme. Idem pour Rabat qui était la première ville au monde dessinée par un paysagiste. Tanger, qui était une ville internationale, était aussi traversée par tous les courants d'architecture. Bref, le Maroc avait cette identité plurielle, c'est un carrefour de civilisation, de flux et de reflux des cultures diverses : berbère, judaïque, musulmane et puis des dynasties différentes...
En tant qu'association, en quoi consiste aujourd'hui votre rôle ?
En fait, c'est cette modernité qu'on veut mettre aujourd'hui en valeur. Le véritable problème, c'est qu'on a tourné le dos à cette facette de l'identité qui est la modernité. Et nous, nous voulons participer à la consolidation de cette identité, à la reconstruction de cette culture, en essayant de réconcilier le Marocain et le Casablancais en particulier avec une identité forte qui est l'architecture du XX e siècle qui représente la modernité. Casablanca est un réceptacle de la modernité. Elle est née avec le cinéma, la voiture...En fait, on a vu un transfert rapide de tout ce qui faisait l'avant-garde. Notre rôle consiste également de donner aux Casablancais une attache avec la ville et leur faire comprendre qu'il y a des intérêts en commun à préserver. L'école ne peut pas tout faire aujourd'hui, mais la société civile est capable de se mettre en position de complémentarité par rapport à tout un travail pédagogique, où il y avait énormément de déficience. Aujourd`hui, il y a une prise de conscience, un éveil qui se fait. En tout cas, c'est l'état des lieux actuel. Il y a cinq ans, lors de la première édition des Journées du patrimoine, nous avons reçu 4000 visiteurs, alors qu'on a reçu 20.000 personnes à la dernière édition. C'est un indicateur révélateur qui montre qu'il y a une montée en puissance du côté des citoyens de l'intérêt pour le patrimoine de la ville. Il faut souligner que la ville de Casablanca contrairement à Rabat a été la destination de prédilection de toute la classe laborieuse et qui venait du milieu rural. Notre devoir consiste à assurer à cette classe une certaine mutation entre le monde rural et celui urbain, car il s'agit en fin de compte de deux milieux différents. La ville, comme l'a souligné le grand sociologue allemand, Georges Simmel, est un espace d'autonomie, de liberté et des relations sociales rationnelles. Ces concepts sont ainsi la voie incontournable vers la modernité.
Existe-t-il aujourd'hui au à Casablanca une politique locale destinée essentiellement à la promotion du patrimoine de la ville ?
La ville doit être travaillée en râteau. Il y a aujourd'hui des associations qui viennent équilibrer les forces de pouvoir, dans le sens de Montesquieu, si on permet le terme. En fait, il y a un schéma qui est en train de s'installer. Il faut dire que la démocratie est un processus d'apprentissage d'abord. Donc, il faut du temps pour s'y mettre. L'essentiel, c'est de ne pas baisser les bras. Car, autant on baisse le bras, autant on laisse la possibilité à un mafieux de prendre la place. La question qu'on devrait se poser est la suivante : Qui gouverne ? Est-ce les politiques ou les lobbys... ? Pour qu'il y ait une politique, il faut un consensus, des priorités et des objectifs bien définis. Inutile de rappeler les troubles et les guerres intestines entre l'ex-Wali de Casablanca et le maire actuel. Il y avait un blocage, des bâtons dans les roues. Il faut dire que le système mis en place ne permet pas à chacun de prendre ses responsabilités. Toutefois, ce qui me tranquillise, c'est que les bonnes volontés existent toujours. Le tramway est un projet fédérateur qui a procuré une bouffée d'oxygène à la métropole. Je ne peux également qu'être confiant quand je vois les résultats en matière de la résorption des bidonvilles. Qui aurait pu croire un jour que le bidonville de Bachkou va disparaître. Il y a sûrement une politique dans ce sens. Franchement, il faut souligner qu'il existe aujourd'hui une impulsion royale. Ce qu'on a fait en 12 ans, on ne l'a pas fait durant 50 ans (construction des autoroutes ; énergies solaires ...). Il y a une conscience, une impulsion royale qui impacte positivement les villes qui s'engagent dans une sorte de compétition positive. Cela s'explique par le fait qu'il y a une stratégie ambitieuse au plus haut niveau de l'Etat pour mettre le royaume sur les rails de la modernité. Je fais allusion dans ce sens aux remarquables travaux du sociologue tchèque Karl deutsch, où il a démontré comment la construction des infrastructures contribue à faciliter la communication et renforcer par conséquent l'esprit de la nation.
Quelles sont les obstacles qui entravent votre action ?
Ce sont les blocages qui nous motivent. Là où il y a blocage, j'y vais pour régler les problèmes. Notre combat porte sur l'amélioration de l'arsenal juridique afin de faciliter les processus de classement, inciter les gens à s'investir dans l'action culturelle, restaurer notre patrimoine, injecter de l'argent dans tout ce qui est patrimoine...Il faut que l'Etat se dote d'un droit de préemption pour exproprier un bien classé patrimoine. Bien sûr une telle procédure doit respecter les droits des ayants droit. C'est le cas de l'Hôtel Lincoln, où il a fallu vingt ans de procédure et, entre-temps, tout le bâtiment s'est démoli tout seul. Il faut aussi défiscaliser tout investisseur qui va vers un bâtiment de patrimoine.
Le théâtre de Casablanca sera-t-il livré conformément au deadline fixé, car il y a des rumeurs qui circulent indiquant que le projet accuse un grand retard ?
A partir au moment où les moyens financiers sont là, il n'y a plus de craintes. Le théâtre est une valeur ajoutée sûre. Un bâtiment d'une ampleur internationale aura un impact positif sur son environnement. La zone où il sera bâti va être réanimée le soir. Notre objectif est bien évidemment de redonner à la place Mohammed V ses lettres de noblesse et de refonder une nouvelle identité de cette place où les habitants de la métropole vont s'identifier. Bref, la culture aura son mot à dire.
S'agissant des plans d'aménagement de la ville, pourquoi, avez-vous souvent porté un regard critique sur cet outil de management du territoire de Casablanca?
Je souligne qu'on ne peut plus travailler de la même manière et avec les mêmes méthodes utilisées depuis 40 ans. En fait, il faut un travail en amont sur le Plan d'aménagement global (PAG). Cela veut dire qu'il faut impliquer tout les acteurs concernés : sociologues, anthropologues, ingénieurs, architectes... L'urbanisme est une action collective. Aussi, la ville doit être réfléchie en permanence, c`est un organe vivant, un corps qu'il faut quotidiennement maintenir. La modernité anarchique qu'a connue la ville a dépassé tout plan de planification et fait qu'aujourd'hui Casablanca échappe à ses habitants. En d'autres termes, Casablanca n'a pas besoin de plans d'aménagement, mais plutôt des plans de rattrapage pour la sauver.


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