au sein des peuples arabes Il était dur et souvent impossible pour les dirigeants dans le monde arabe de reconnaître leurs fautes et erreurs dans la gestion de la chose publique. Depuis la chute de nombreux dictateurs dans la foulée des mouvements sociaux en Tunisie, en Egypte en Libye, la donne a totalement changé. Désormais, les responsables sont amenés à désigner les choses par leur nom, à faire le diagnostic de leur gestion et à assouplir leurs modes communications. Ceci est retenu comme conséquence de la prise de conscience du pouvoir des réseaux sociaux. La communication entre le sommet et la base de la pyramide est devenue indispensable. Cette évidence a été confirmée, dimanche et lundi, en outre par des leaders de communication et dirigeants politiques qui participent au 2e Forum Communication Gouvernementale, qui se tient au Centre des Congrès Expo de Charjah en présence d'un millier environ de professionnels. Se démarquant totalement de la langue de bois et expressions protocolaires, les organisateurs et participants (universitaires, chercheurs, chefs d'entreprises de presse, responsables de relations publiques, etc.) ont donné l'exemple de la manière de communiquer leurs réflexions à un public multiple de formation et tendances diverses. C'est le premier ministre de Turquie, Recep Tayyip Erdogan qui était très critique à l'égard des dirigeants entêtés qui s'abstiennent de dialoguer avec les contribuables. Dans son intervention, durant la deuxième séance des travaux, il a révélé les secrets de sa stratégie de communication dans un Etat de droit et reconnu que la communication directe est une importante ressource pour l'orateur. En deux mots, a expliqué le dirigeant turc, les hommes politiques qui parviennent à exploiter de manière correcte les instruments de communication, peuvent finalement bénéficier du soutien de leurs électeurs. Comme exemple, il a cité sa propre expérience. Erdogan a ainsi dit : «La Turquie se compose de 81 villes et les distances entre deux villes peuvent atteindre 2.500 kilomètres. Eu égard à mes responsabilités et mon rang, je visite ces villes plusieurs fois et je viens de me rendre à 70 parmi elles en campagne électorale. Dans chacune des villes, je rencontre les masses populaires. En dépit de notre utilisation des moyens de communication modernes, je considère que la parole demeure le premier moyen de communication». Erdogan a cependant mis en garde contre le fait que toute communication s'appuyant sur la discrimination linguistique, confessionnelle, ethnique ou idéologiques est «imparfaite». Kofi Annan, ex-secrétaire général de l'ONU, a fait part au public de sa large expérience de communicateur et responsable de transmettre les décisions de la première organisation mondiale sans le moindre accroc en prévision de toute éventuelle fausse interprétation de la part d'un des Etats membres. Ce qui est préoccupant pour Annan, est surtout les grandes complications qui accompagnent les innovations dans le domaine de communication et l'attitude des dirigeants à l'égard de leurs nations. «Les gouvernants ne sont pas parvenus à comprendre les mouvements des peuples et ont adopté des points de vue à court terme ce qui avait conduit au pourrissement des problèmes», a-t-il dit. Devant cette attitude indifférente, «les peuples ont eu le sentiment d'être exclus dans la prise de décisions dans les dernières années, situation qui a justifié l'aspiration à un radical changement et mouvements populaires pour instaurer des gouvernements plus efficaces». L'homme qui avait assumé la responsabilité d'apaiser les grands conflits qu'a connus le monde durant la deuxième moitié du 20 ème siècle, a reconnu l'importance de la communication efficace en vue de s'assurer (pour les gouvernements) de la confiance des citoyens. Dans cette équation, il est indispensable de disposer d'informations correctes qui aideront à prendre des décisions dans le cadre d'un régime démocratique. Il est ainsi clair, proclame-t-il, que «les peuples soutiennent les responsables qui défendent les mêmes idéaux, la même vision d'avenir, et, en même temps, apprécient la confiance placée en eux et s'engagent à construire une société saine fondée sur la paix, la stabilité et le développement, la souveraineté de la loi et le respect des droits humains ». Cheikh Soltane Ben Ahmed Al Kassemi, président du centre de Communication Charjah, s'est déclaré, pour sa part «fier» de la tenue de ce forum dans son émirat, dont le but est d'encourager l'instauration d'un véritable espace de dialogue entre les peuples et les gouvernements. «Le monde a besoin actuellement plus que jamais de l'ouverture, du dialogue, de la communication et de l'optimisme», a-t-il dit. Satisfaire les désirs du public n'est «guère une mission aisée à atteindre du jour au lendemain», a mis en garde Al Kassemi reconnaissant, en exposant l'expérience de l'Emirat de Charjah, que si personne ne dispose d'une baguette magique pour changer les concepts du dialogue et de communication, «nous avons une audacieuse volonté de généraliser davantage les bonnes manières et pratiques dans le domaine de la communication gouvernementale». Pour l'ex-secrétaire général de la Ligue des états arabes, Amr Moussa, la situation de la communication est claire et invite réellement à une réflexion plus approfondie. Ce qui est surtout à retenir est sa claire position dans l'explication de la situation dans le monde arabe. Ce monde «traverse une phase de changement dont la principale cause est le déficit en matière de communication d'une part entre les gouvernements et les peuples et d'autre part entre le peuple et ses composantes». Selon Moussa, le monde arabe est arrivé à ce stade parce que «les régimes étaient durs et ont influé sur l'efficacité de la communication ce qui avait conduit à des révolutions dont les causes sont les mêmes». Sans rien perdre de son optimisme habituel, l'ex-secrétaire général a relevé que la communication est devenue «plus facile» et que les gouvernements «ne sont plus en mesure d'imposer un seul canal/voie de communication». Le 2 Forum sur la communication Gouvernementale a clos ses travaux, lundi, sur un diagnostic plutôt optimiste quant à l'avenir de la communication dans le monde arabe dans toutes ses dimensions et surtout au niveau du discours gouvernemental. Aujourd'hui, le niveau éducatif, la généralisation de la culture informatique et l'accès sans barrières à l'information permettent au citoyen arabe de contester les décisions impopulaires prises par les gouvernants, faire des propositions soit à travers ses représentants soit par le biais des réseaux sociaux, et, à inviter à manifester pacifiquement sur la place publique. Ce sont les nouveaux moyens de communication dont disposent sans discrimination les jeunes générations arabes. Les gouvernements sont ainsi appelés soit à écouter la voix du peuple, qui s'exprime à travers les réseaux sociaux, soit revoir totalement ses traditionnels modes de communication pour être réellement à l'écoute des attentes des masses populaires. Les cas tunisien et égyptien, issus des mouvements sociaux durant le printemps de 2011, sont retenus comme exemples. Il a été ainsi démontré que les réseaux sociaux ont acquis un pouvoir beaucoup plus puissant que les décisions autoritaires prises au détriment de la volonté populaire. C'est la leçon retenue du «printemps arabe» et soulignée au 2 ème forum de Charjah qui a eu pour thème central «Communication efficace pour un message unifié».