D'après le dernier rapport de Bank Al Maghrib sur la politique monétaire, l'insuffisance de liquidité bancaire s'est sensiblement creusée, au cours du 3è trimestre, de près de 10,8 milliards DH par rapport au 2è trimestre (passant de 62,4 milliards à 73,2 milliards DH). Et ce malgré une injection structurelle de liquidité de 6 milliards DH, suite à la baisse du ratio de la réserve obligatoire de 6% à 4,33%. Les opérations en devises ont induit une ponction de liquidité de 7,3 milliards DH en raison de la poursuite du rythme accéléré des achats de devises par les banques commerciales auprès de Bank Al-Maghrib (18 milliards DH), partiellement compensé par le reflux de billets de banque étrangers qui a atteint 10,7 milliards DH. De même, les opérations du Trésor (hors interventions sur le marché monétaire) ont contribué au resserrement des trésoreries bancaires pour près de 5,2 milliards DH du fait de la différence entre : d'une part, les souscriptions bancaires aux adjudications des bons du Trésor (25,9 milliards DH) et l'encaissement des recettes fiscales ainsi que des recettes relatives à la cession des parts de l'Etat dans la BCP (3,3 milliards DH) et à la deuxième tranche des dividendes de l'OCP (2 milliards de dirhams), et d'autre part, le remboursement des échéances de la dette intérieure au profit du système bancaire (20,5 milliards DH), le paiement des salaires des fonctionnaires (16 milliards DH) et le règlement des dépenses de compensation (10,6 milliards de dirhams). De plus, les retraits nets de la monnaie fiduciaire ont atteint 5 milliards de dirhams durant la période estivale. Durant le dernier trimestre de l'année 2012, le déficit de liquidité bancaire s'est maintenu presque au même niveau enregistré à la fin du trimestre précédent (73,8 milliards DH), l'incidence restrictive des facteurs autonomes (2,9 milliards DH) ayant été compensée par l'injection structurelle de liquidité (1,6 milliard de dirhams) issue de la baisse du ratio de la réserve obligatoire de 4,33% à 4%. Les opérations du Trésor (hors interventions sur le marché monétaire) ont été sans incidence sur la liquidité bancaire: l'effet restrictif lié aux souscriptions bancaires aux adjudications des bons du Trésor (23,8 milliards DH) et à l'encaissement des recettes fiscales, y compris le 3ème acompte de l'IS, a été totalement compensé par les remboursements des échéances de la dette intérieure au profit du système bancaire (20,2 milliards DH), le règlement des dépenses de compensation (8,4 milliards DH) et le paiement des salaires des fonctionnaires (5,3 milliards de dirhams). En outre, les sorties nettes de la monnaie fiduciaire ont atteint 1,7 milliard DH à l'occasion de Aïd Al-Adha. De même, les opérations sur avoirs extérieurs ont induit une ponction de liquidité de 1,1 milliard DH résultant de la différence entre les achats de devises par les banques commerciales qui ont totalisé 5,8 milliards DH et les cessions de billets de banque étrangers qui ont atteint 4,7 milliards DH. L'encours des placements du Trésor sur le marché monétaire a augmenté suite à l'amélioration de ses recettes, passant de 922 millions de dirhams durant le 3ème trimestre à 2,1 milliards DH en moyenne quotidienne durant le dernier trimestre de l'année 2012. La banque centrale à la rescousse En vue de combler le déficit de liquidité des banques, Bank Al-Maghrib est intervenue majoritairement au moyen des opérations d'avances à 7 jours pour un montant quotidien moyen de 57,5 milliards de dirhams contre 56,9 milliards de dirhams le trimestre précédent. La Banque centrale a également fourni de la liquidité en maintenant l'encours de l'ensemble des opérations de refinancement à long terme à 15 milliards de dirhams. En outre, la Banque centrale est intervenue accessoirement au moyen de 12 opérations d'avances à 24 heures pour un montant moyen de 3,1 milliards de dirhams, en réponse aux besoins ponctuels des banques commerciales. Pour sa part, le TMP du marché monétaire s'est inscrit en hausse à 3,21% en moyenne durant le trimestre en cours contre 3,16% en T3 2012. De même sa volatilité a fortement augmenté, s'établissant à 20 points de base, contre uniquement 6 points de base le trimestre précédent. Les créances en souffrance sur une tendance haussière Crédit bancaire : ralentissement quasi généralisé Les dernières données publiées par la DEPF font ressortir un ralentissement du rythme de progression annuel du crédit bancaire, qui s'est établi à 5,4% en octobre 2012, après 6,3% en moyenne durant le troisième trimestre, se situant ainsi à un niveau légèrement en deçà de sa tendance de long terme. L'analyse du crédit bancaire par objet économique indique que ce ralentissement a été quasi généralisé à l'ensemble de ses catégories, font remarquer les analystes de la Direction des Etudes et Prévisions Financières -DEPF-, relevant du ministère de l'Economie et des Finances. Ainsi, les facilités de trésorerie, ayant accusé un repli de 2,5% d'un mois à l'autre, ont vu leur taux de croissance annuel décélérer à 10,4% en octobre, après 11,2% au troisième trimestre, sous l'effet notamment, de l'accroissement notable des taux débiteurs assortissant cette catégorie de prêts. Dans le même temps, les crédits à l'équipement se sont de nouveau contractés de 1% en glissement annuel, une baisse qui demeure, toutefois, moins importante que celle de 1,9% observée le trimestre précédent. En outre, le rythme de croissance annuel des crédits immobiliers s'est établi à 5,8%, après 7,1% un trimestre auparavant, reflétant à la fois une décélération du taux de progression des crédits à l'habitat et une diminution des prêts accordés aux promoteurs. Pour ce qui est des crédits à la consommation, bien qu'en stagnation d'un mois à l'autre, ils se sont inscrits en ralentissement, leur hausse annuelle étant revenue à 11,1% en octobre, après 15,3% au troisième trimestre. S'agissant des créances diverses sur la clientèle, elles ont progressé de 2,1% en glissement annuel, au lieu de 4,5% au trimestre précédent. Pour leur part, le rythme d'accroissement annuel des créances en souffrance est passé à 8,6%, après 7,8% au troisième trimestre. La ventilation du crédit par agent économique recouvre tant un ralentissement du taux de progression annuel des prêts destinés au secteur privé qu'une accélération de celui des concours accordés au secteur public. Ainsi, les prêts accordés au secteur privé ont accusé une diminution mensuelle de 0,8% et leur rythme de croissance annuel est revenu de 6,4% au troisième trimestre à 4,6% en octobre. Cette évolution est imputable principalement à la décélération du rythme de progression des crédits accordés aux ménages et aux sociétés non financières. Ces derniers ont enregistré un taux d'accroissement annuel de 2,8% en octobre, après 5,5% le trimestre précédent, leur contribution à la croissance du crédit bancaire étant ainsi ramenée à 1,4 point de pourcentage, au lieu de 2,7 points. Pour ce qui est des crédits accordés aux ménages, ils ont décéléré entre octobre et le troisième trimestre, de 8,3% à 7,6%, en variation annuelle, contribuant ainsi de 2,5 points de pourcentage à la progression du crédit bancaire, contre 2,8 points et traduisant, essentiellement, le recul de 8,6% à 3% du rythme de croissance annuel des prêts accordés aux entreprises individuelles. Parallèlement, et bien qu'en hausse mensuelle de 0,5%, les crédits destinés aux autres sociétés financières ont vu leur taux d'accroissement annuel revenir à 0,5% en octobre, au lieu de 1,2% en moyenne au cours des trois derniers mois. A l'inverse, les concours accordés au secteur public ont marqué une expansion de 33,9% en glissement annuel, après 17,7% au troisième trimestre de l'année 2012, participant ainsi à hauteur de 1,6 point à la variation du crédit global. Réduire la part du traditionnel et promouvoir la gestion des ressources hydriques Agriculture : le Plan Maroc Vert pour corriger les fragilités L'année 2012 a mis en exergue les fragilités de la production agricole, largement dépendante de la pluviométrie, avec une récolte sous-optimale en 2011-2012 et des précipitations de bon augure pour la campagne 2012-2013. Le Plan Maroc Vert a pour ambition d'endiguer cette dépendance séculaire. Il s'agit de mettre en valeur l'ensemble du potentiel agricole national, à travers la réduction de la part du traditionnel et du vivrier et le développement de l'irrigation et la promotion de techniques efficientes de la gestion des ressources hydriques. La forte sécheresse qu'a connue le Maroc au début de l'année 2012 s'est traduite, ipso facto, par un fléchissement de la production céréalière, qui s'est chiffrée à 5,1 millions de tonnes, alors qu'elle frôlait les 8,4 millions de tonnes à la même période en 2011, soit une baisse de plus de 39 pc. La baisse de la récolte aurait pu être plus drastique, sauf que les précipitations qui ont eu lieu vers le deuxième trimestre 2012 sont arrivées à point nommé pour sauver environ 2 millions de tonnes de la production céréalière nationale. Le Maroc a également connu, durant la période automnale de l'année 2012, de substantielles précipitations qui ont arrosé, non sans générosité, plusieurs régions du Royaume, au Nord comme aux provinces du Sud, ce qui pronostique une "bonne" campagne agricole 2012-2013, estiment unanimement les agriculteurs et certains analystes. Pour ce qui est du timing de ces récentes précipitations, Mohamed Belouchi, ingénieur général à la météorologie nationale, a affirmé, dans une déclaration à la MAP, que ces pluies "arrivent au bon moment et sont à même d'encourager les travaux des champs, notamment le labour des terres". Tantôt faste, tantôt néfaste, l'influence de l'aléa climatique a toujours expliqué les principales fluctuations au niveau du produit intérieur brut (PIB) agricole, qui varie en dents de scie, selon les données du Haut commissariat au Plan et de Bank Al-Maghrib. Cette relative volatilité du PIB agricole se répercute, par conséquent, sur le niveau du PIB global, et donc perturbe, quoique légèrement, la stabilité du rythme de la croissance économique. C'est dans ce cadre bien particulier qu'intervient le Plan Maroc Vert, qui ambitionne de mettre en valeur l'ensemble du potentiel agricole territorial afin de réduire la part du traditionnel et du vivrier dans l'agriculture marocaine, à travers notamment le développement de l'irrigation, mais aussi la promotion de techniques efficientes de la gestion des ressources hydriques. Stabiliser le PIB agricole Cette stratégie nationale, qui se fixe 2020 comme horizon, vise justement à renforcer et stabiliser le PIB agricole, à donner un nouveau souffle aux exportations marocaines et à défricher le terrain pour les investissements privés dans ce domaine. Elaboré conformément aux Hautes Orientations Royales et mis en place par le ministère de l'Agriculture et de la pêche maritime, le Plan Maroc Vert s'articule autour de deux piliers. Le premier pilier porte sur le développement accéléré d'une agriculture compétitive et moderne. Dans ce cadre, ledit plan prévoit la réalisation de plusieurs nouveaux projets à haute valeur ajoutée, tant au niveau de la production que des industries agroalimentaires, en s'appuyant sur les investissements privés à travers le financement de 700 à 900 projets d'un coût total de 10 à 18 milliards de dirhams (MMDH) à titre annuel. Quant au second pilier, il concerne l'accompagnement solidaire des petits agriculteurs à travers notamment le financement de 300 à 400 projets sociaux visant à faciliter la reconversion des ces agriculteurs dans des activités moins sensibles à la pluviométrie et à haute valeur ajoutée. Au delà des actions déployées dans le cadre du Plan Maroc Vert, le gouvernement a également mis en place un programme d'urgence pour réduire les effets de la sécheresse qu'a connue la campagne agricole 2011-2012, avec une enveloppe globale de 1,53 MMDH. Ce programme visait à aider les régions touchées à 75 % par la sécheresse afin de protéger le bétail. Dans ce cadre, le ministère de l'Agriculture et de la pêche maritime a émis un projet de loi, le 15 mars 2012, visant l'exemption des droits de douane concernant l'importation de l'orge, l'élaboration d'un programme de protection du bétail mobilisant un montant global de 1,14 MMDH réparti sur trois étapes, selon le ministre de tutelle, Aziz Akhannouch. Dans un contexte marqué par les changements climatiques et où la sécheresse revêt un caractère de plus en plus récurrent, au Maroc comme dans les autres pays de la région, la transition vers une activité agricole plus endogène s'avère une nécessité impérieuse pour toute nation qui prétend être sécurisée sur le plan alimentaire. Il s'agit là de fournir des efforts, de part et d'autre, en vue de favoriser la réussite des stratégies étatiques, le Plan Maroc Vert entre autres, qui visent avant tout à préserver la dignité des citoyens marocains en réduisant la dépendance de leur bien-être vis-à-vis d'une variable aussi stochastique... que la pluie. Youssef Oukhallou (MAP) Les créances en souffrance sur une tendance haussière