45 villes déclarées sans bidonvilles Le programme de villes sans bidonvilles, lancé en 2004, a permis la réduction du poids démographique des ménages résidant dans les bidonvilles dans les villes marocaines de 8,2 à 3,9% entre 2004 et 2010, a indiqué lundi le ministre de l'Habitat, de l'urbanisme et de la politique de la ville, Mohamed Nabil Benabdallah. Présentant ce programme d'envergure en séance plénière, consacrée aux politiques nationales par la conférence internationale ouverte lundi à Rabat sous le thème «Sortir des bidonvilles, un défi mondial pour 2020», N. Benabdallah a fait savoir que 45 villes sur les 85 prévues ont été déclarées sans bidonvilles avec l'amélioration des conditions de vie de plus d'un million d'habitants, et que le taux d'avancement global du programme a atteint 70%. D'autres villes seront bientôt déclarées sans bidonvilles. Revenant sur l'évolution du programme, il a rappelé que le Maroc connait en effet une urbanisation soutenue qui atteint 62% en 2011 et qui devra s'élever à 75% en 2030. Le pays, a-t-il ajouté, accuse un déficit en logements de 840.000 unités et fait face à une forte demande en logements de 170.000 unités par an. L'habitat insalubre dans le pays existe sous plusieurs formes : habitat non réglementaire, habitat menaçant ruine, bidonvilles. Pour relever ce défi, des directives royales ont été données pour faire de l'habitat social en général et de la lutte contre l'habitat insalubre en particulier une priorité nationale, a indiqué M. Benabdallah. C'est ainsi qu'une stratégie intégrée à été mise en œuvre à travers le lancement d'un programme public en vue de l'éradication, à terme des bidonvilles et la poursuite d'une politique de prévention et de promotion de produits concurrentiels à l'habitat informel, parallèlement au renforcement du partenariat et de la contractualisation dans ce domaine, et le contrôle strict et la répression effective des infractions. Et c'est dans ce cadre qu'est intervenu le lancement en 2004 du programme «Villes sans bidonvilles» (PVSB), lequel s'est donné comme fondements un cadre de programmation nationale selon une démarche ascendante, la ville comme unité de programmation, et un cadre contractuel à responsabilités partagées entre les partenaires fixant engagements et échéancier de réalisation, a-t-il expliqué. Pour la réussite du programme, différents choix de modes opératoires selon les spécificités locales ont été prévus (restructuration, relogement et recasement). Et pour ne rien laisser au hasard, les concepteurs ont fixé le dispositif approprié de financement (Budget de l'Etat-FSH-Budget des collectivités territoriales). Pour la réalisation du programme, les services compétents ont procédé à la mobilisation du foncier public et à la prise de différentes décisions pour assurer l'accompagnement social approprié, tout en œuvrant pour l'intensification de l'offre de l'habitat de prévention. Des cas réussis Présentant des cas réussis de résorption de bidonvilles, il a cité l'exemple de la ville de Laâyoune, où il a été procédé au transfert des ménages de 12.000 baraques dans des délais de réalisation en dessous de ceux contractualisés, grâce à la mobilisation et l'adhésion de tous les partenaires locaux. Dans le cadre de cette opération, il a été procédé au recasement des ménages concernés qui ont bénéficié d'une aide frontale et d'un accompagnement social intensif et de proximité. M. Benabdallah a évoqué aussi le cas d'Agadir, où 16.000 ménages bidonvillois ont été transférés dans des logements salubres, grâce à l'adhésion et la mobilisation des partenaires locaux. Ils ont bénéficié d'un encadrement pour accéder aux crédits garantis par l'Etat (FOGARIM). Plusieurs ménages ont été recasés alors que d'autres ont été relogés lors de cette opération dont le contrôle et l'encadrement ont été assurés par les autorités locales. Quant au rythme moyen annuel de démolition, il est passé de 5000 avant le PVSB à 25.000 baraques, a rappelé le ministre de l'Habitat, de l'urbanisme et de la politique de la ville, selon lequel la réussite du programme s'est traduite par une nette amélioration des conditions de vie des bénéficiaires du programme par l'accès à la propriété. Et M. Nabil Benabdellah de souligner qu'il a été nécessaire de disposer d'un portage politique et d'une stratégie intégrée pour le pilotage avec succès du programme. Cette stratégie intégrée devra en effet être basée sur l'adhésion des acteurs et la co-construction des programmes, la convergence des politiques publiques, le recensement des populations concernées partagé entre les acteurs, la contractualisation avec les partenaires, la mobilisation du foncier public, la mise en place de dispositifs de financement, le traitement intégral des quartiers et la mise en place d'un dispositif de contrôle et de prévention. Tels sont les principaux enseignements retenus de cette expérience, a-t-il noté. Politiques d'accompagnement Abordant les perspectives pour la résorption des bidonvilles, le ministre de l'Habitat, de l'urbanisme et de la politique de la ville a estimé nécessaire de réorienter et dynamiser le programme de villes sans bidonvilles selon une approche intégrée dans le cadre d'un projet de ville associant tous les acteurs locaux et ce dans le cadre de la politique de la ville. Pour ce faire, a-t-il dit, différentes mesures d'accompagnement sont mises en œuvre pour atteindre les objectifs du programme, à travers l'amélioration et le renforcement des responsabilités des acteurs régionaux et locaux quant à la gouvernance du programme, l'amélioration de la convergence des politiques publiques particulièrement en matière d'équipements et de transports, l'intensification et la diversification de l'offre préventive en logements, l'adoption d'une politique foncière répondant au principe de l'urbanisme durable, le renforcement et la généralisation de l'accompagnement social des ménages concernés et la diversification et l'augmentation des ressources de financement. Pour la réussite d'une telle action, il est recommandé de renforcer la convergence des politiques publiques, de mettre en place un dispositif de veille (recensement, évolution, évaluation, capitalisation-réajustement) et de systématiser l'accompagnement social, selon le ministre. Il est aussi nécessaire de renforcer l'offre de logement préventive, d'adopter des démarches ascendantes et des modes opératoires adaptés, d'accompagner la politique de lutte contre les bidonvilles par la promotion d'une économie locale inclusive et de renforcer les capacités des acteurs locaux. Il est par contre déconseillé de centraliser le processus décisionnel, de dissocier les projets de résorption des bidonvilles des projets de villes ou de changer fondamentalement les principes des politiques arrêtées en cours d'exécution, a-t-il estimé, ajoutant qu'il est contreproductif de négliger l'aspect social dans les projets de résorption ou le système de contrôle, de ne pas maitriser les délais d'exécution des projets ou de ne pas prévoir de manuel de procédures devant cadrer les méthodes de recensement et d'attributions. Il est recommandé aussi de faire recours à l'imagerie satellitaire pour dresser l'état des bidonvilles et l'évaluation des changements opérés au cours du temps en termes de démolition des baraques et/ou d'extension, a-t-il ajouté. L'expérience marocaine en matière de lutte contre les bidonvilles a été qualifiée lundi par M. Joan Clos Drapeau, secrétaire général adjoint de l'ONU, Directeur exécutif du Programme des Nations unies pour les établissements humains (PNUEH) ou ONU-Habitat, de «succès historique, remporté par un pays sans pétrole, sans diamants et sans gaz naturel». Selon le responsable onusien, qui s'exprimait à l'ouverture de cette conférence internationale, placée sous le haut patronage de SM le Roi, l'expérience marocaine doit inspirer nombre de pays confrontés au phénomène des bidonvilles dans le monde, dont en premier lieu les pays africains où 60% de la population vit dans des baraques. Les travaux de la conférence qui se poursuivent en ateliers seront sanctionnés par l'adoption mercredi de la déclaration de Rabat sur les modalités d'accélérer le processus de réalisation des objectifs du millénaire concernant l'amélioration des conditions d'habitat des populations à l'approche de 2015, date à partir de laquelle les Nations unies envisagent de revoir ses objectifs dans le domaine.