Pour la première fois, un conseil d'administration de l'OFPPT se déroule dans une ambiance apaisée. Tout le monde en est convaincu : la formation professionnelle, étant un enjeu de première importance, a besoin d'être revisitée, repensée pour pallier les dysfonctionnements constatés aujourd'hui. Ce Conseil, réuni mercredi 1er Août 2012, sous la présidence du ministre de l'Emploi et de la Formation professionnelle, Abdelouahed Souhaïl, semble marquer une rupture avec le passé. Le moment est venu, en effet, pour les partenaires sociaux (CGEM et syndicats) de manifester leur ambition de créer les conditions d'une nouvelle donne en faveur de la formation professionnelle. Le débat, serein et fort pertinent, a permis de survoler les insuffisances en matière de gouvernance, de souligner les défis de l'ouverture et de la mondialisation et la nécessité d'une adaptation permanente de la formation professionnelle aux exigences de la compétitivité, de rappeler -encore une fois- les difficultés et les blocages en matière de gestion des Contrats spéciaux de formation (CSF). Les interventions, des uns et des autres, ont mis l'accent sur la nécessité de mettre en place un système d'information et d'orientation préalable des jeunes et d'établir des passerelles avec l'enseignement supérieur afin de mieux valoriser la voie de l'enseignement professionnel. Car, au-delà des prix et de la qualité de nos produits et services, « la compétitivité du Maroc repose essentiellement sur la qualification et la compétence des femmes et des hommes dans chacune de nos entreprises », dira un représentant de la CGEM. Pour Salaheddine Kadmiri, «la réforme des CSF est une urgence». Il faudrait «assouplir les formalités en matière de formation continue». Abdelilah Hifdi, président de la Fédération du transport, abondera dans le même sens : «Le manuel des procédures des CSF est trop compliqué. La dimension économique et sociale de la formation continue n'est pas suffisamment prise en compte, à cause de ce manuel maudit. Depuis dix ans, on se réunit pour trouver un terrain d'entente. Dix ans durant, on vit le même drame». Il y a une sorte de consensus sur la nécessité de réformer la formation professionnelle. Son « financement doit faire l'objet d'une résolution dans la perspective du plan 2012-2015», dira Benhamida, président de la Fédération du BTP. Car en définitive, «la formation continue, ajouta-t-il, est un droit et la PME doit assurer et garantir ce droit dans le cadre de la réforme». Franchir une nouvelle étape En dépit des résultats positifs enregistrés par l'OFPPT, en termes d'effectifs formés, les intervenants ont relevé que 2 sur 3 jeunes exclus du système scolaire ne trouvent pas places à l'OFPPT. La question de la capacité d'accueil de l'Office pose aujourd'hui le problème de financement de la formation professionnelle, soulignait un représentant de l'UMT. Certes, le système de la formation professionnelle a évolué au cours des dix dernières années, mais il reste encore trop d'inertie, fait remarquer ce même syndicaliste. Il est temps de franchir une nouvelle étape et d'accorder à la formation continue une attention toute particulière. Le projet d'indemnité pour perte d'emploi devrait être accompagnée d'un package de formation-insertion via l'ANAPEC et l'OFPPT, devait préciser le représentant de l'UMT. «Donner la possibilité à chacun d'accéder à une qualification certifiée, voilà l'un des défis majeurs que nous devons relever », entonnait un autre représentant du même syndicat. A l'évidence, «ce débat, qui traduit le souci de mieux faire, ouvre des perspectives de réflexion plus larges», dira Abdelouahed Souhaïl. «L'OFPPT a un rôle d'acteur public et le ciblage de son action est au cœur de nos préoccupations. Il y a certainement beaucoup de choses que nous devons faire ensemble» Le ministre de l'Emploi et de la Formation professionnelle, qui a écouté avec intérêt les avis des uns et des autres, estime que dans le contexte d'aujourd'hui, la formation est devenue un enjeu majeur, dans la mesure où «la bataille de l'intelligence» et «la valorisation des compétences» seront au cœur du développement économique et du «combat pour l'égalité des chances». «On n'a pas d'observatoire de la formation», notait le ministre, relevant, en même temps, l'absence de régulateur du système de la formation professionnelle dans le pays. C'est pourquoi «nous devons fixer d'abord un cadre général des bonnes pratiques». En fait, «on est devant un chantier stratégique». Dans la foulée, le ministre a formulé quelques idées, avec l'ambition d'apporter quelques éléments de réponse aux difficultés vécues par les partenaires sociaux. Prenant acte des recommandations et résolutions de ce Conseil, le ministre s'est dit ouvert à toute proposition concrète susceptible de contribuer à l'émergence d'une réforme du système de la formation professionnelle. La question des CSF doit être résolue, a affirmé le ministre. Il va falloir reformuler le manuel des procédures. «Je suis prêt à donner un signal», rassurait le ministre. Quant à la réforme proprement dite, il s'agit là d'une action législative qui s'inscrit dans une démarche longue et laborieuse, devait préciser M. Souhaïl. Cette réforme, qui s'engagera avec la création de l'observatoire et du régulateur, devrait permettre, confiait M. Souhaïl, de repenser complètement le système et de rechercher les réponses propres à permettre l'élaboration d'une stratégie.