Au lendemain de l'annonce par Mariano Rajoy, président du gouvernement espagnol, de son plan d'ajustement pour juguler le déficit public, tout est devenu clair pour les contribuables que leur situation sera pire que celle d'avant-hier. Les mesures annoncées seront rappelées dans les éphémérides politiques comme étant les plus dures jamais adoptées depuis la restauration de la démocratie en 1978. L'Espagne entre de plain pied dans la spirale de la récession et va souffrir de l'effet des recettes que le Fonds Monétaire International (FMI) recommande le plus souvent aux gouvernements des pays du tiers-monde. Quelles sont les implications aux plans social et économique de ce plan d'ajustement ? D'entrée, les dépenses des ménages vont augmenter de 100 euros par mois à cause, uniquement, de la hausse de l'Impôt sur la Valeur Ajoutée (IVA) des produits de base et de grande consommation. Cette augmentation se base sur les calculs réalisés par les organisations de défense des consommateurs, OCU et CEACCU. D'autres instituts d'études estiment que les augmentations tarifaires vont avoir une grande incidence sur le pouvoir d'achat des espagnols (y compris les immigrés) et freinera la consommation. Le contribuable sera donc plus pauvre à partir du moment où entreront en vigueur les récentes hausses de l'impôt normal qui passera de 18 % à 21 % et l'impôt réduit de 8% à 10%. Les organisations de défense des consommateurs mettent en garde, d'autre part, contre le fait que ces hausses conduiraient à plus de fraude. Jeudi, la bourse de Madrid a ouvert sa séance à la baisse comme réaction logique du marché financier dont la santé dépend du comportement de la consommation et des valeurs des entreprises qui y cotisent. La prime de risque de la dette publique a également régressé pour se situer à 530 points, un comportement qui s'inscrit sur la même ligne que les tentatives du gouvernement de réduire de près de 65 milliards d'euros du déficit public avant la fin de 2014. Cette prime, calculée sur la différence entre le bon du trésor espagnol de dix ans et son homologue allemand de la même durée, a baissé de 18 points par rapport à son niveau la veille. Toutefois, il demeure un niveau hautement dangereux pour le financement de la dette publique. Le taux d'intérêt du bon du trésor espagnol s'est situé, jeudi matin, à 6,57% alors que son homologue espagnol marquait 1,17%. L'indicateur sélectif de la bourse de Madrid, l'Ibex-35, a par contre perdu dès l'ouverture de la séance 0,97% pour se fixer à 6.735 points, soit 65,8 points de moins par rapport à la clôture, mercredi. Depuis quelques jours, l'Ibex-35 peine à récupérer le support psychologique des 7.000 points. Pour se rendre compte de l'impact des mesures d'ajustement annoncées, mercredi au parlement par Mariano Rajoy, il suffit uniquement de repasser les titres à la Une des principaux journaux d'Espagne. El Pais titre : « Rajoy tente d'éviter l'effondrement avec le plus grand ajustement de la démocratie ». Pour ABC il s'agit de « l'ajustement indispensable pour une situation extrême » alors qu'El Mundo note, citant Rajoy, que : « nous n'avons pas de choix". La Razon écrit : « sacrifice » et La Vanguardia parle du « grand ajustement ». Pour l'Economista, c'est « le grand ajustement de l'histoire devant une situation très grave" et l'Expansion est catégorique : « ajustement forcé. Il est le plus dur de la démocratie ». En réalité, l'ajustement structurel est fortement dur. Rajoy compte obtenir à tout prix 65 milliards d'euros au cours des deux prochaines années, un objectif qui va changer totalement la face de l'administration publique et l'environnement social et économique du pays. Ce montant vient compléter un éventail de coupes budgétaires déjà réalisées par l'actuel gouvernement depuis son arrivée au pouvoir en décembre dernier. Dans l'actuelle loi de finances, il a éliminé 27 milliards d'euros après avoir réduit de 18 milliards les dépenses des gouvernements régionaux. Le précédent gouvernement socialiste avait, pour sa part, réduit de 15 milliards d'euros les budgets de l'administration publique. Pour certains analystes, le plan d'ajustement de Rajoy peut être considéré comme le plus sévère depuis le plan de stabilisation de 1959. Le gouvernement conservateur a été acculé à l'appliquer sous la pression des partenaires de l'Espagne en l'Union Européenne, comme monnaie de change pour sauver le système bancaire de son pays.