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Centres de prévention des risques de drogues : Un espoir pour sortir des affres de l'addiction
Publié dans Albayane le 18 - 09 - 2011

Sortir des affres de l'addiction, refaire sa vie, se réconcilier avec soi-même, tels sont les désirs ardents qui animent les personnes qui ont été anéanties par la spirale infernale de la drogue qui a bouleversé leur vie et celle de leur entourage. Structures de soins, de sensibilisation, de diagnostic,
de prévention de la toxicomanie, et de réinsertion sociale, les centres de prise en charge anonyme et gratuite des personnes souffrant de conduites addictives, en plein essor au Maroc, représentent une bouée de sauvetage tendue aux toxicomanes pour sortir d'un processus d'autodestruction et renaître de leurs cendres.
La prise en charge des patients présentant une addiction aux drogues passe par différentes étapes allant de la désintoxication à la réhabilitation en passant par la poste-cure et la prévention des rechutes.
La prise en charge des addictions
aux drogues, un parcours du combattant
Après avoir accepté un contrat de soins qui détermine ses obligations par rapport aux règles de soins dans le centre, l'usager suit une cure de désintoxication qui consiste à l'aider à supporter l'arrêt de la drogue et les signes de sevrage qui s'en suivent, explique à la MAP, le Dr Jallal Toufiq, directeur du centre national de prévention, de traitement et de recherche en addictions et directeur de l'hôpital Arrazi (Salé).
Dès qu'il arrête la drogue, le patient tend à rechercher un substitut ou à s'engager dans des comportements dysfonctionnels, ajoute-t-il.
Cette étape est primordiale et permet à l'équipe du centre de préparer la réinsertion du patient dans son environnement à travers notamment des programmes occupationnels tels les jeux, la détente, le sport, la lecture, les médias.
Pour Dr Essalhi Mohammed, vice-président de l'association de soutien au centre médico-psychologique (CMP) Hasnouna à Tanger et médecin-psychiatre-addictologue, la méthadone est un produit substitutif de l'héroïne et constitue l'une des composantes de la prise en charge chimiothérapique. Celle-ci repose sur l'utilisation de médicaments adéquats pour atténuer les symptomatologies du manque, soigner l'état de traumatologie accompagnateur de l'addiction ainsi que des maladies concomitantes de l'addiction (dépression, anxiété, troubles psychotiques).
Outre la prise en charge chimiothérapique, les personnes présentant une conduite addictive bénéficient d'une prise en charge psychothérapique en plus d'un accompagnement assuré par l'association Hasnouna qui appuie le centre dans la prise en charge psychosociale des usagers de drogue, ajoute-t-il.
De son côté, le professeur Toufiq explique que dans le but de prévenir les risques de rechutes, l'équipe soignante évalue l'existence de pathologies psychiatriques concomitantes qui sont prises en compte dans la gestion globale du cas.
Vient ensuite la réhabilitation, une étape capitale sans laquelle le traitement est tronqué et le risque de rechute est élevé. Ce processus vise à insérer ou à réinsérer le sujet dans le monde extérieur, à lui offrir un cadre de vie normal et à faire de lui un citoyen inséré et productif.
La persévérance, une règle d'or pour sortir du trou noir
Il faut se rendre à l'évidence que la toxicomanie est une maladie récurrente chronique. Les rechutes sont la règle et l'abstinence définitive du premier coup est l'exception, prévient M. Toufiq.
Quoique l'arrêt immédiat et définitif soit le but, il ne survient que plusieurs mois, voire plusieurs années après le début du traitement, indique-t-il.
A ses yeux, le taux de rétention dans le centre et dans le programme thérapeutique est le meilleur indicateur de réussite.
Dans ce sens, le Centre de Salé a un taux de rétention avoisinant les 70 pc sur 6 mois ce qui constitue une performance par rapport aux standards internationaux, atteste-t-il, précisant que l'abstinence sur 6 mois est de plus de 75 pc. Pour le Dr Essalhi, il est difficile d'arriver à plus de 30 pc d'abstinence dans les centres de prise en charge d'usagers de drogue .
Le plus important, selon lui, c'est qu'il y ait des gens régulièrement suivis malgré les rechutes fréquentes.
Par contre, note-t-il, la totalité des personnes soumise à un traitement médical de substitution (méthadone, morphine), ne prend plus d'héroïne mais demeure sous une dépendance médicalisée bien contrô_lée sans qu'il y ait des effets secondaires notables sur la vie, ni sur la santé des patients.
Depuis son ouverture en 2004, le centre a reçu plus de 3.300 personnes, 600 personnes qui sont complètement abstinentes, un millier de personnes qui sont régulièrement suivies, qui rechutent mais qui insistent pour suivre leur programme thérapeutique, veulent parvenir à l'abstinence.
Etant donné que les consommateurs de drogues injectables sont fortement exposés aux maladies transmissibles (sida, hépatites, IST), la prévention et la réduction des risques liées à cette pratique, sont un objectif affiché par les centres de prise en charge des conduites addictives.
Réduire les comportements à risques associés à l'addiction
Les programmes proposés, à cet effet, consistent à apprendre aux usagers un certain nombre de gestes visant à minimiser le risque de maladies inhérentes à l'usage de drogues lorsque cet usage est difficile à arrêter, explique M. Toufiq.
Il s'agit, selon lui, d'une manière pragmatique d'aider les sujets pas encore prêts à arrêter la drogue à ne pas souffrir des conséquences néfastes de leur comportement.
Le programme offre la substitution par la méthadone au profit des usagers d'opiacés, des préservatifs et des seringues jetables pour éviter la transmission de virus du SIDA et de l'hépatite, indique-t-il.
Le centre médico-psychologique Hasnouna, qui a reçu, en novembre 2009, le prix « MENA» récompensant les actions de prévention de risques de drogue, accueille une moyenne de 100 personnes par jour dont 80 pc sont des usagers de cocaïne et 7, 5 pc sont des injecteurs, fait savoir, de son côté, M. Essalhi, précisant que le risque majeur pour les injecteurs sont le sida et l'hépatite C.
Pour Mme Soumaya Rachidi, responsable du pôle communautaire au centre d'addictologie de prévention des risques de drogues à Rabat, l'ultime objectif du centre est de former des pairs éducateurs (anciens usagers de la drogue) qui sont plus proches des utilisateurs de drogues.
Ceux-ci seront porteurs du programme du centre auprès de la population des usagers avec l'objectif de mener un travail de sensibilisation sur l'impact de la drogue et les risques de contaminations infectieuses, a-t-elle dit.
Toxico-dépendants, mais citoyens
L'insertion sociale et professionnelle des usagers, qui intériorisent souvent le sentiment de rejet et de stigmatisation, figure parmi les missions des centres de prise en charge des conduites addictives.
L'association de soutien au CMP Hasnouna de Tanger, qui bénéficie d'une expérience-pilote dans ce domaine, a mis en place un programme de resocialisation comprenant des plaidoyers auprès des familles, du voisinage, des autorités, des magistrats et du système de santé.
L'association a conclu des accords avec des entreprises citoyennes qui l'aident à réinsérer ces personnes, a rappelé M. Essalhi, notant que la fondation Mohammed VI pour la réinsertion des détenus a proposé d'accompagner l'association pour la réinsertion des usagers ayant des antécédents judiciaires.
Les discussions avec les personnes consommatrices de drogue laissent entrevoir leur volonté de sortir de l'emprise de la drogue. Seul hic : elles sont méfiantes et convaincues d'être pointées du doigt à cause de leur addiction, a fait savoir M. Anaba Brahim, un intervenant de proximité au centre d'addictologie de prévention des risques de drogue de Rabat.
Les usagers veulent se sentir citoyens à part entière et bénéficier de tous leurs droits et expriment leurs aspirations à une vie meilleure et une amélioration de leurs conditions socio-économiques, indique M. Anaba qui mène un travail de repérage des personnes dépendantes.
Tout compte fait, l'insuffisance d'infirmiers, d'assistantes sociales, médecins, psychologues, éducateurs, demeure un obstacle majeur devant une prise en charge efficace des comportements addictifs, comme l'ont souligné des intervenants dans le domaine.


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