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Le Nord se shoote à l'héroïne
Publié dans L'observateur du Maroc le 06 - 01 - 2011

A25 km de Sebta, ville d'approvisionnement, et à 15 km de Tétouan, véritable zone franche de commercialisation de drogues dures, Rincón, comme préfèrent l'appeler ses habitants, est enclavée dans un monde de poudre brune. Une ville où les Kharba (squats) poussent jusqu'à quelques mètres du port et du commissariat de police. Des murs de désolation, des lieux de vie derrière lesquels les junkies se cachent des regards… jusqu'à l'overdose.
Morts vivants
Il est 11 heures du matin et Hamid a le mono*. Il est en manque. Ce toxicomane de 35 ans est en sueur, a le visage tendu et les lèvres sèches. Notre arrivée le perturbe, ainsi que Brahim son acolyte. Les manches retroussés, Hamid tente de s'injecter dans le bras sa première dose d'héroïne de la journée, sans succès. Toutes ses veines sont abimées. Hors de lui, Hamid lance : «shoote-moi à la nuque!». La main tremblante et le regard inquiet, son complice s'exécute. Quelques gouttes de sang jaillissent de sa nuque, Hamid les essuie avec ses doigts crasseux. Soulagé, il est en flash*. Il reprend la seringue et la lance dans l'une des chambres du squat. Ce passage du mono au flash se reproduit huit à dix fois par jour, au rythme des injections. Une répétition d'actes «médicaux» sans protection qui multiplie les risques d'atteinte du VIH/Sida et qui peut causer la mort. «Pas plus loin qu'hier [jeudi 23 décembre 2010], un usager des drogues dures par voie intraveineuse (injecteur) a été retrouvé mort dans un squat de la ville. Il s'est piqué à la veine jugulaire», affirme Amine, de l'ALSC Tétouan pour laquelle il est coordinateur de projet Réduction de Risques (RdR) et membre de l'Unité mobile d'intervention (UMI).
Nourredine, un autre membre de l'UMI, nous rejoint au squat de Hamid, en pleine montée d'adrénaline. Il récupère le matériel souillé et redistribue à Hamid des seringues et du matériel pour ses futures injections, ainsi que des préservatifs.
La villa des marginaux
Au squat, la vie continue. Samira, 30 ans, est une fumeuse d'héroïne depuis quinze ans. Elle porte tous les stigmates de la consommation de cette drogue dure. Elle paraît bien plus que son âge, ses doigts sont décolorés, acné et rides traversent son visage au teint assombri par la brune («Al Kahla», en référence à la couleur brune de l'héroïne commercialisée dans le Nord). Son poids ne dépasse pas les 40 kg, Samira a flirté avec l'injection. «Je préfère fumer, au moins ce n'est pas dangereux», relativise-t-elle. Pourtant, Samira risque la tuberculose, l'hépatite C et la mort à petit feu.
Omar, jeune injecteur de 25 ans, nous accompagne pour visiter un autre squat. Située au plus haut point de la ville sur la mini-chaîne de montagnes, cette villa au style andalou est le chef-lieu des marginaux de M'dieq. Murs en décomposition et toits démolis, la maison menace ruine. Le sol est parsemé de seringues, de pailles et de bouteilles de Bazoka*. Ce matin, les locataires ont déserté les lieux, tous cherchent «Al Kahla»
Samira et Hamid sont parmi les chanceux de M'dieq ! Ils sont les seuls à avoir pris leur dose d'héro ce matin. Au quartier du parking, point de rencontre entre les toxicomanes et l'équipe de l'ALCS, une dizaine «d'addicts» sont encore à jeûn. Ils sont les dommages collatéraux du resserrement du contrôle des frontières à Bab Sebta. La ville occupée est un des principaux points d'approvisionnement du Maroc en héroïne.
De Helmand à Sebta
L'héroïne vendue au Maroc est en grande partie d'origine afghane et le pavot à opium est cultivé spécialement à Helmand. Aussi, cette drogue traverse des dizaines de milliers de km à travers l'Europe, fait escale en Turquie ou en Albanie, avant d'atterrir à Sebta. Elle est alors traitée dans des laboratoires pour en faire des «papelas» : des doses d'héroïne emballées dans du papier. L'héroïne et la cocaïne perdent une grande partie de leur qualité lors de ce périple. Un vétéran toxicomane qui a consommé de la pure héroïne lors de ses séjours en Europe juge que «ce que nous consommons ressemble à tout sauf à de la drogue». La baisse de la qualité de la drogue commercialisée au Nord est sujette à plusieurs anecdotes. «J'ai injecté un placébo à des amis en manque de drogue : un mélange de cumin et d'autres épices. Leur mono est parti après injection», raconte Abdallah, un ex-toxico de M'dieq.
Retour au Rincon. L'appel de la prière du vendredi retentit, la bande cherche encore un volontaire pour faire le déplacement à Jbel Derssa, haut lieu de vente de la drogue à Tétouan, pour acheter les provisions de toute la journée. Personne ne veut se lancer dans cette mission dangereuse car «si on nous arrête avec les doses de tout le groupe, on nous colle le délit de trafic de drogues, alors que les barons de la région circulent librement», accuse Omar, le jeune injecteur. Ce dernier a fait plusieurs séjours à la prison de Tétouan et nous assure que «là-bas, on trouve plus facilement de la drogue qu'au Rincon».
Le mono augmente, la température baisse, l'équipe de l'ALCS continue la distribution de matériel d'injection. Une petite foule se rassemble autour de la voiture de l'équipe. La scène attire les regards curieux. Une personne âgée s'arrête et lance «que Dieu leur pardonne», avant de s'en aller. Excédé par le fait d'être accusé d'encourager la consommation de drogues, Noureddine sort les gants de boxe : «faute de prévention primaire et de centre d'hospitalisation, nous faisons de la prévention de troisième degré afin de minimiser l'infection au VIH», cogne-t-il dans sa réponse.
La communauté de toxicomanes de M'dieq est estimée à 120 personnes. Pour la majorité, des injecteurs. Des membres de cette communauté travaillaient dans la pêche, mais depuis leur dépendance, ils ne peuvent plus prendre le large et travaillent comme gardiens de voitures. Et quand ils ne trouvent plus de quoi consommer, ces héroïnomanes sont prêts à tout. Mustapha, gardien et «addict» depuis une dizaine d'années, se cache derrière sa djellaba déchirée : il a dû vendre sa télé 200 DH. «Ma mère me l'avait achetée à 1500 DH», affirme-t-il, gêné.
Vers 14 heures, la communauté de toxicomanes du Rincon attend toujours la délivrance. Personne ne s'est encore dévoué à se rendre au point de vente le plus proche : le quartier Barbourine, dans la périphérie de Tétouan.
Le cartel de Barbourine
Cap sur ce quartier chaud au Nord de la Colombe blanche. Construit après l'indépendance suite à l'exode rural, sans autorisation ni plan d'urbanisme, ce «bario» clandestin est difficile d'accès. Situé sur Jbel Derssa, montagne du Rif occidental, avec ses 541 mètres, il tutoie le ciel. La seule fois où l'équipe de l'ALCS a tenté de travailler dans ce bario montagneux, elle a été découragée par une pluie de pierres, «depuis on n'a jamais remis les pieds ici, c'est un terrain hostile», constate Amine. Dès qu'une personne étrangère met les pieds dans le quartier, elle est rapidement repérée et le quartier général du cartel est alerté par téléphone. De leur tour de contrôle située en haut du Jbel, les dealers utilisent des jumelles pour contrôler le mouvement des visiteurs.
Pendant des années, cette zone est restée inaccessible même pour les forces de l'ordre. Sans compter le conflit autour des périmètres d'intervention entre la Gendarmerie royale et la Sûreté nationale, ce qui a retardé tout déploiement sécuritaire dans la région.
Le 11 février 2010, le quartier reçoit un invité pas comme les autres. Le roi Mohammed VI lance les travaux d'aménagement d'une esplanade du quartier. Coût de la réalisation : 6 millions de DH. Le signal est fort. La visite coïncide avec le suivi du souverain de l'état d'avancement du programme de développement urbain de la ville de Tétouan pour 2009-2012. La visite royale a permis aux habitants de disposer d'une route asphaltée et de débloquer le différent entre la gendarmerie et la police. Barbourine tombe enfin sous la responsabilité de la police qui va mener une série d'actions de lutte anti-drogue dans ce quartier régi par les narcotrafiquants.
Un quartier périurbain dont l'interminable pente mène à la maison de l'un des importants dealers du quartier. Il s'agit de Samir S., 21 ans. Il a été le principal fournisseur d'héroïne de toute la région durant des années, avant d'être arrêté au mois de mars 2010. La police a saisi dans sa demeure 1200 doses d'héroïne ainsi que 70 doses et 14 grammes non emballés de cocaïne. Samir.S est condamné à 10 ans de prison ferme. Après l'annonce du verdict, sa sœur laisse éclater sa joie en youyous tellement la sentence lui semble légère. Le juge la condamne pour outrage à la Cour. Elle écope six mois de prison ferme.
Lichara, Bogota du Nord
Nous quittons les lieux, pour un autre point noir de Jbel Derssa : le quartier Lichara, surnommé Bogota. Il compte deux attractions : une mosquée et une pharmacie. Aucun établissement public n'a été prévu pour servir la population. Dans la médina, nous empruntons la rue d'Omar Ibn Abdelaziz, une artère goudronnée mais difficilement praticable. Sur le chemin, la scène est ahurissante. Alors que nous nous rendons au sommet du Jbel, des toxicomanes dévalent la pente à contre-sens à toute vitesse. Ils viennent de faire le plein de marchandise.
Tout près de Lichara, le bario Derssa est le dernier bastion de vente «libre» d'héroïne. Un quartier qui respire l'insécurité. «Il est très déconseillé pour des étrangers d'y mettre les pieds après 21 heures», nous prévient le taximan qui nous y conduit. Au moment de notre passage, une fourgonnette de la sûreté nationale est stationnée au milieu du quartier. «C'est un événement», commente le taximan. Les agressions à l'arme blanche sont courantes, impossible pour des inconnus de se fournir en drogues. Nous tentons à deux reprises d'accompagner des consommateurs actifs mais ils refusent car c'est «trop risqué» selon eux. Ils nous renseignent néanmoins sur les tarifs. Aujourd'hui, la dose atteint son plus bas prix depuis des années, 15 DH la papela !
VIH, l'heure est grave !
Le siège de l'Association de lutte contre le Sida (ALCS) se trouve au quartier de l'Habitat. Dr. Rachid Hasnouni Alaoui est président la section locale et directeur de l'hôpital psychiatrique de la ville. Il commence son travail d'addictologue dans la rue. Son premier patient est Samir. «Tu n'a jamais fait d'injections ?», demande le psychiatre. Le jeune fumeur d'héroïne répond par la négative. Pourtant Dr. Hasnouni est sûr que Samir tombera dans la consommation de drogues injectables, «hélas, c'est un cheminement tracé pour la grande majorité des consommateurs de drogues dures», constate-t-il. C'est au passage à l'injection que le rôle de l'ALCS entre en jeu.
Une étude réalisée en 2009 par un collectif associatif révèle que 35% des usagers des drogues injectables à Nador sont séropositifs. Un chiffre loin de celui annoncé officiellement. Le ministère estime pour sa part la proportion des cas de Sida attribuables à l'usage des drogues injectables (UDI) à 4% environ du nombre total des cas au niveau national, et au Nord, cette proportion atteint 15%. Pourtant les comportements à risque constatés dans la région de Nador par le collectif associatif donnent froid dans le dos. «Dans cette ville, la consommation des drogues injectables a pris une ampleur telle que les jeunes se lancent des défis pour explorer de nouveaux lieux d'injections comme le dos ou la jambe, voire l'appareil génital,», témoigne Amine de l'ALCS-Tétouan. A cela s'ajoute l'absence dans le Rif d'un centre de prise en charge spécialisée et d'un centre de Réduction de risques. A cela s'ajoutent des chiffres inquiétants révélés par une enquête de terrain du ministère : 63.6% des injecteurs interrogés (70 sur 110) à Tétouan déclarent avoir partagé leurs seringues. A Tanger, ce taux atteint les 77.3%, (119 sur 154).
Prévention : les premiers pas
Une prise de conscience se manifeste au sein du département de la Santé. La consommation de drogues dures est désormais un problème de santé publique au Maroc et spécialement dans le Nord. Le dispositif de la stratégie de réduction de risques liés à l'UDI a vu le jour en octobre 2008, dans le cadre du programme national de lutte contre les toxicomanies. «Malheureusement, nous avons démarré un peu tard dans les programmes de Réduction de Risques (RdR), mais il vaut mieux tard que jamais», tempère Dr. Mohamed Essalhi, médecin chef au Centre Médico Psychologique (CPM) Hassnouna à Tanger.
Ce CPM de 67m2, sans moyens d'hospitalisation, est le seul qui existe dans le Nord du Maroc et il reste insuffisant pour accueillir les usagers des drogues dures de toute la région dont le nombre est estimé à 10.000. Depuis 2004, le CPM a reçu 3200 usagers de toutes les drogues, dont 80% sont consommateurs de cocaïne et d'héroïne. 7,5% parmi ces derniers sont des injecteurs. 1000 consommateurs actifs passent par le centre au moins deux fois par an. Le ministère prévoit la création de dix centres, en plus de celui de Salé, ouvert depuis 2000, et de celui de Casablanca, créé en 2009. Reste que les zones prioritaires sont Nador, Tétouan et Al Hoceima. «Nous avons besoin d'au moins deux centres juste pour Tanger», réclame Dr. Essalhi.
Au volet médical, s'ajoute le volet préventif. Le Maroc compte seulement deux unités de RdR. La première a été mise en place à Tanger, en 2004, grâce au travail de l'Association de soutien au CMP Hasnouna (ASCMPH). L'unité de RdR de Tétouan n'existe que depuis 2009 et à l'initiative de l'ALCS. Or le travail de réduction de risque rencontre des difficultés sur le terrain. «Toute médiatisation du phénomène est durement réprimée par les services de sécurité de la région», regrette Dr. Hasnouni. Destruction de squats, arrestations de consommateurs et pressions sur les intervenants associatifs… sont autant d'actions qui empêchent le phénomène d'éclore aux yeux du grand public. Dr Hasnouni, à l'instar de l'ensemble des intervenants auprès des toxicomanes, dit militer pour la dépénalisation de la consommation de ces drogues. «Un toxicomane est avant tout un malade qu'il faut prendre en charge. Le stigmatiser ne fait pas avancer notre travail, il faut avoir une approche pédagogique avec cette population», propose Dr. Esssalhi. Des plaidoyers en ce sens sont en cours de préparation et seront adressés à la Sûreté nationale et aux autorités locales. En attendant, la bonne société conservatrice des villes du Nord du Maroc continue à fermer les yeux et à ignorer cette population marginale qui grandit à un rythme effréné…
Re(vivre) grâce à la méthodone
S.L.
Saïd* tient sa dose quotidienne de méthadone, il l'avale d'une seule gorgée. La méthadone remplace sa consommation d'héroïne pour les prochaines 24 heures. Ce médicament est une substance analgésique synthétisée dont les effets sont similaires à ceux de l'opium. Il est utilisé depuis 1960 comme substitut des opiacés (drogues) chez les consommateurs d'héroïne.
Un espoir nommé méthadone
Saïd fait partie des 80 toxicomanes sélectionnés dans le cadre du programme pilote du ministère de la Santé en vue de lancer le traitement par méthadone. 40 ont été choisis au Centre médico-psychologique (CMP) de Tanger, 20 au Centre national de traitement, de prévention et de recherche en addictions de l'hôpital Arrazi de Salé, et 20 autres au Centre de soins des conduites addictives au Centre hospitalier universitaire (CHU) Ibn Rochd de Casablanca. «Avant la fin même du programme pilote, nous avions une liste d'attente de 260 patients. La demande est grandissante», annonce Dr. Essalhi, médecin chef du CMP de Tanger, qui est également vice-président de l'Association de soutien au CMP Hasnouna. Cette structure appuie le CMP. L'association organise des ateliers pour accompagner le traitement.
Le premier à se lancer est Nafaâ : «j'ai tué mon frère, lance-t-il d'entrée de jeu, j'étais un dealer, mon grand frère était alcoolique, il terrorisait ma mère. Un soir, pour le calmer, je lui ai injecté de l'héroïne. Le lendemain, il en a redemandé et ça a duré six mois. Il est mort d'une overdose». Selon cet habitant du quartier El Qasba, «quand tu consommes tu ne fais rien d'autre, tu vis et tu travailles pour l'héroïne. Dans le jargon des toxicomanes, on dit que la drogue devient ta femme». Dans ce groupe d'ex-toxicomanes se retrouvent des employeurs et leurs employés. Tous sur le même pied d'égalité face à la dépendance.
«L'héroïne m'a privé de beaucoup de choses durant vingt ans de ma vie», regrette Saïd. Après dix ans de consommation de cocaïne et dix ans d'héroïne, ce patient du CMP est un homme nouveau qui a échappé à une mort certaine à plusieurs reprises. Son histoire avec la dépendance commence lorsqu'il rencontre un voisin tunisien dans le quartier El Qasba de Tanger. «Il était un des premiers à avoir introduit ‘‘la blanche'' dans la ville. Il m'en donnait à volonté, je n'ai jamais connu de manque», se rappelle-t-il. Said est sous méthadone depuis cinq ans.
Dans ce groupe, les 27 patients présents ont tous essayé d'arrêter la consommation au moins une fois. «J'ai tout essayé, la méthode traditionnelle, des thérapies dans des cliniques privées, l'hospitalisation à l'hôpital psychiatrique, même que je suis allé séjourner à Bouya Omar mais rien n'a pu me retirer le manque», affirme Fouad qui a été renvoyé de la fonction publique à cause de la consommation de l'héroïne. Ayman est celui qui a essuyé le plus grand nombre de tentatives ratées parmi le groupe. «J'ai commencé mes traitements en 1982. J'ai fait plus de 20 cures mais sans succès. J'avais un problème de volonté», reconnait-il. «Le toxico trouve toutes les excuses pour faire des rechutes, il refuse la responsabilité, il fuit. C'est une lutte interne entre la volonté de se soigner et celle d'avoir tes doses quotidiennes de drogue», explique Dr. Essalhi.
Larbi est architecte à temps plein et artiste-peintre à ses heures perdues. C'est un autre cas d'une vie que l'héroïne a failli briser à jamais. Il est l'illustration que le mal causé par l'héroïne touche toutes les classes sociales. «Pendant les deux premières années de consommation, la drogue n'a pas eu d'effet sur ma vie personnelle et professionnelle. Au fil du temps, j'ai commencé à perdre des clients et ma réputation», se souvient ce charmant architecte «chamali» au français impeccable. «Dieu merci, j'avais ma famille à mes côtés pour me soutenir. C'était ma chance», reconnait Larbi. Pour janvier, il prépare la réouverture de son cabinet, parallèlement à ses activités artistiques au sein de l'ASCMPH.
L'asso contre l'héroïne
Le local de l'association est une véritable ruche. Les bénévoles de l'unité fixe préparent le thé et le café. Les quatre infirmiers et les trois médecins se réunissent avec les deux équipes (4 intervenants) de l'unité mobile pour faire le point sur les sorties de terrain et les meilleurs moyens d' approcher les toxicomanes actifs. «C'est un travail dur physiquement mais surtout psychologiquement, il faut avoir une présence d'esprit permanente pour réagir en cas d'urgence sur le terrain», explique Hicham de l'unité mobile de Tanger.
L'association qui compte aussi une coordinatrice et 30 bénévoles a un budget de fonctionnement de 1.3 million de DH. L'unité de réduction de risques (mobiles et fixes) a pris en charge 660 usagers de drogues dures en 2009. Elle reçoit 6 à 15 nouveaux toxicomanes par semaine. «L'espace est largement insuffisant, déplore Dr. Essalhi. Les cures de sevrage sont pratiquées en ambulatoire à 90%, le reste est pratiqué au sein de l'hôpital psychiatrique, qui se trouve dans un état lamentable. Nous avons droit à quatre lits sur les 55 que compte l'hôpital psychiatrique de la ville». «Une personne malade ne peut être prise en charge contre sa volonté, il faut donc provoquer cette envie d'arrêter à travers des programmes de sensibilisation», conclut Dr. Essalhi. Après la fin de l'atelier avec le groupe méthadone, un nouvel atelier commence, mais cette fois avec des toxicomanes encore actifs. Un long travail de persuasion commence.


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