Pour les Nations unies, le pilonnage par l'armée israélienne des positions de la FINUL a été délibéré. Mais aucune condamnation n'a été formulée. Genève, correspondance particulière. « Apparemment délibéré. » C'est ainsi que Kofi Annan, totalement « indigné » au dire de son entourage, a qualifié mardi soir le pilonnage répété par l'armée israélienne d'un poste des Nations unies (appartenant à la force d'interposition de l'ONU au Liban, la FINUL) situé à Khiam, au Sud Liban, qui a entraîné la mort de quatre observateurs internationaux désarmés qui y étaient basés. Une « indignation » d'autant plus forte que les structures militaires et même politiques de l'ONU avaient, à tour de rôle et au moins une bonne dizaine de fois, prévenu Israël et son état-major des risques que leurs tirs et leurs frappes aériennes de la zone faisaient courir au poste des Nations unies. Durant tout l'après-midi de mardi, en effet, les diverses structures de l'ONU, aussi bien de la FINUL au Liban (par le major-général Alain Pellegrini, commandant de la FINUL) qu'au sein du secrétariat à New York (même le vice-secrétaire général Mark Malloch Brown a averti la mission israélienne), ont tenté de dissuader les Israéliens de tirer sur les positions des observateurs. Un acharnement israélien d'autant plus révoltant pour l'ONU qu'il semble bien qu'« aucun tir du Hezbollah n'était signalé à proximité », comme l'a confirmé Jane Hull-Lute, la responsable des opérations de maintien de la paix de l'ONU, devant le Conseil de sécurité. Cela n'a pas empêché Israël de pilonner le poste et ses environs immédiats à 21 reprises durant les heures qui ont précédé sa destruction, à 19 h 15, par trois bombes de précision lancées par l'aviation. Les tirs se sont même poursuivis alors que les secours de la FINUL tentaient de rejoindre le poste après son silence radio ! Or même cette suite d'événements n'a pas réussi à pousser hier le Conseil de sécurité à se mettre d'accord pour une condamnation d'Israël. Là comme à Rome, les Américains ont continué à couvrir Israël... Quant à Kofi Annan, il a accepté mercredi les excuses du premier ministre israélien, revenant sur ses premières déclarations. Désormais, deux enquêtes sont lancées par Israël et par l'ONU elle-même sur le tragique « incident ». Toutefois, comme le soulignait Terje Roed Larsen, l'envoyé spécial de l'ONU au Moyen-Orient, cette tragédie « démontre les risques élevés d'une présence au Sud Liban. Résultat, moins d'États sont tentés de participer à l'envoi d'un contingent de maintien de la paix dans la zone ». CQFD ? Toutefois, délibéré ou pas, le décès des observateurs de l'ONU jette un sérieux doute sur l'ensemble de la stratégie des frappes d'Israël au Liban.