Le secrétaire général de l'ONU, Kofi Annan, a appelé hier Israël et le Hezbollah à conclure une trêve pour permettre la mise en place d'«une force internationale de stabilisation» à la frontière israélo-libanaise. L'idée a reçu le soutien du G 8 à Saint-Pétersbourg. Mais Israël a exprimé son scepticisme, et l'ambassadeur américain à l'ONU, John Bolton, a émis des objections. La Grande-Bretagne et la France se sont montrées ouvertes, tout en insistant sur un nécessaire désarmement du Hezbollah. Jacques Chirac a jugé que la situation exigeait «une intervention extérieure». Quelque 2 000 soldats de l'ONU sont déjà déployés au Liban-Sud. Le Conseil de sécurité des Nations unies a achevé hier ses consultations sans prendre la moindre décision. Les opérations d'évacuation des ressortissants étrangers du Liban ont commencé. Un ferry affrété par la France a quitté Beyrouth pour Chypre, hier soir, avec à son bord 800 Français, 400 ressortissants européens et 50 Américains. Dès hier matin, des centaines de personnes s'étaient massées aux abords de l'ambassade de France, dans l'espoir d'embarquer sur le bâtiment. La Grande-Bretagne a de son côté exfiltré près de 80 personnes à bord d'hélicoptères de la Royal Air Force. Depuis jeudi, plusieurs pays ont déjà mené à bien l'évacuation de centaines de leurs ressortissants via Damas. Dominique de Villepin a effectué hier une visite éclair à Beyrouth. Le premier ministre français, venu exprimer la «solidarité de la France» au peuple libanais, a été reçu par son homologue libanais, Fouad Siniora. Villepin a appelé à «une trêve humanitaire immédiate». En Israël, Ehoud Olmert a prévenu qu'Israël poursuivrait son offensive tant que les deux soldats israéliens capturés par le Hezbollah n'auraient pas été relâchés et que l'armée libanaise ne contrôlerait pas le sud du Liban. Le premier ministre a néanmoins préparé le terrain à une solution diplomatique. «Mon instinct me pousse à tout casser, mais mon esprit (...) me force à agir avec responsabilité, car en fin de compte les combats vont se terminer grâce à la diplomatie», a-t-il déclaré. Son ministre de la Défense, Amir Peretz, a précisé que l'État hébreu «acceptera uniquement un déploiement de l'armée libanaise sur la frontière internationale. C'est le seul facteur dont Israël est prêt à accepter la présence dans ce secteur». Le général Moshé Kaplinski, chef d'état-major adjoint de l'armée israélienne, a estimé hier que l'opération militaire au Liban se poursuivra au moins une semaine encore. «Le degré des pressions internationales sur Israël nous permettra de continuer au moins une semaine», a-t-il déclaré. Au Liban, le premier ministre, Fouad Siniora, a accusé Israël de «mettre le pays en morceaux». De son côté, le Hezbollah a affirmé qu'il n'accepterait qu'un cessez-le-feu «sans condition». Dimanche, le G 8 avait adopté un texte préconisant quatre conditions pour une trêve. En visite à Damas, le ministre iranien des Affaires étrangères, Manouchehr Mottaki, a proposé hier un cessez-le-feu suivi d'un échange de prisonniers pour mettre fin à l'offensive israélienne au Liban. Le responsable de la délégation de l'ONU, Vijay Nambiar, dépêché à Beyrouth pour négocier une accalmie, a fait état hier d'«efforts encourageants». Il a précisé que la mission allait «se rendre rapidement en Israël pour transmettre ces idées et en discuter». L'intensité des attaques contre le Liban ne faiblit pas. L'armée israélienne a continué de pilonner le pays. L'aviation a intensifié ses raids contre plusieurs cibles : des stations radars, des routes, le port de Beyrouth. Dans la soirée, une caserne de l'armée libanaise, située non loin du palais présidentiel de Baabda et du siège du ministère de la Défense, à une dizaine de kilomètres de Beyrouth, a été bombardée à quatre reprises. Par ces raids, l'armée israélienne a déjà vidé de sa population une grande partie de la zone frontalière du Sud. Hier, les attaques ont causé la mort d'au moins 46 personnes du côté libanais. Douze civils ont été tués par un missile qui a touché de plein fouet leur minibus, au sud de la capitale, alors que les corps de dix membres d'une même famille ont été retirés des décombres d'un immeuble. Deux cents personnes, principalement des civils, sont mortes depuis le début des opérations, un demi-millier ont été blessées. Une pluie de roquettes, tirée par le Hezbollah, s'est abattue hier sur le nord d'Israël, touchant pas moins de 17 kibboutz et localités. À Haïfa, un immeuble a été frappé, blessant six personnes. Trois civils ont été blessés dans le village de Talel. Des roquettes se sont aussi abattues à Saint-Jean-d'Acre et, pour la première fois, près des villes d'Afoula et de Nazareth, à une cinquantaine de kilomètres à l'intérieur du territoire. Une autre est tombée près d'un hôpital à Safed, dans le Nord, faisant six blessés. L'armée israélienne a rapporté hier soir que le Hezbollah aurait tenté pour la première fois de tirer un missile à longue portée, de fabrication iranienne, sur Israël. L'engin, capable de parcourir de 120 à 160 km, aurait explosé peu après son lancement. Douze personnes ont péri en Israël depuis six jours.