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Guerre dans les universités : Grands problèmes ou grandes « manips » ?
Publié dans Agadirnet le 24 - 05 - 2007

Les universités marocaines ont été secouées ces deux dernières semaines par des actes de violence qui ont conduit à la mort de deux étudiants et la blessure de plusieurs autres. Qui sont les courants qui ont déclenché cette guerre et pour quelles raisons ? Analyse des faits.
LES premières échauffourées entre étudiants ont été enregistrées, exactement le 20 avril dernier, dans les campus de Taza.
Ces premiers affrontements ont opposé des étudiants du Mouvement Culturel Amazighes (c'est ainsi que les étudiants amazighes se présentent au sein du mouvement estudiantin) à des étudiants appartenant au mouvement marxiste. Part la suite, à Agadir, des étudiants amazighes de l'université d'Ibnou Zohr ont ouvert des débats sur la question des affrontements de Taza.
Aussitôt, le débat a dégénéré en d'autres affrontements, cette fois-ci avec des sahraouis « indépendantistes ». Puis, l'onde de choc a gagné d'autres sites universitaires.
Trois factions estudiantines : le mouvement amazighe, lés étudiants marxistes (étudiants du programme intermédiaire proche d'Annahj Addimocrati) et les comités estudiantins des sahraouis (séparatistes), se trouvées opposées les unes aux autres. Leur bataille rangée a même fait deux morts et plusieurs blessés.
Ces évènements ne sont pas le produit du hasard. Beaucoup d'éléments concordent pour montrer que ce qui arrive sur la scène estudiantine est le fruit de manipulations politiques.
C'est la première fois que des affrontements opposent des étudiants amazighs à des étudiants sahraouis ou à des marxistes proches d'Annahj Addimocrati. Jusqu'à il y a quelques mois ces courants s'entendaient bien. Mais, depuis que le mouvement amazigh a affiché son opposition au Polisario parce qu'il met en avant une prétendue république arabe (République Arabe Sahraoui Démocratique) les donnes ont changé.
C'est à Agadir que les étudiants du Mouvement Culturel Amazighe (MCA) ont refusé de se solidariser avec les étudiants sahraouis qui ont appelé à une manifestation de protestation dans le but de faire réintégrer un de leur camarade renvoyé parce qu'il avait été surpris en train de frauder lors d'un examen. Les étudiants du MCA ont estimé que la manifestation n'avait pas lieu d'être. Ils ont accusé les sahraouis de vouloir créer un évènement comme ils ont l'habitude de le faire à l'approche de chaque célébration d'une supposée guerre armée du Polisario (célébrée le 20 mai).
Autre élément qui montre que ces évènements ont été délibérément provoqués : certains étudiants sahraouis qui ont manifesté à Marrakech, Rabat,... ont brandi le drapeau du Polisario. Certains ont scandé des slogans pro-Abdelaziz Marrakchi... Ces manifestations réprimées par les forces de l'ordre ont donné l'occasion aux ONG pro-Polisario de faire la propagande anti-marocaine, de saisir les organisations internationales des droits de l'Homme...
De leur côté, les amazighes cherchaient à faire parler d'eux. Les évènements qui ont éclaté au campus de Taza l'ont été parce qu'ils tenaient à commémorer le « printemps amazighe », célébrant, dit-on, la 27e commémoration d'une sorte de révolte amazighe en Algérie. De même le MCA, en dehors des universités, commence à revendiquer, avec la même véhémence que certains sahraouis, l'autonomie des régions amazighes, surtout dans le Rif. Là bas, des drapeaux spéciaux sont parfois brandis et des propos frôlant le racisme sont tenus à l'encontre de ce qu'ils appellent les « ouroubiyine » (arabistes)... Les marxistes (étudiants du programme intermédiaire) se rangent du côté des sahraouis en rendant la vie dure aux étudiants amazighs, surtout à Errachidiya et à Fès.
Ce ne sont donc pas des problèmes purement estudiantins qui sont derrière le climat de tension qui règne dans les universités marocaines. Mais surtout la reproduction d'une partie de l'affrontement politique qui fait rage depuis longtemps dans les campus.
Ce qu'ils en pensent
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Miloud Errahali, responsable de la faction des étudiants d'Al Adl Wal Ihssane :
« En ce qui concerne les violences qui ont touché la scène estudiantine ces derniers jours, nous réitérons notre position qui est contre la violence. Nous rejetons la violence par principe quel qu'en soit l'auteur ou la forme. D'autant plus que les étudiants d'Al Adl Wal Ihssane sont l'une des victimes de la violence dans l'université. Nous constatons que la violence a pris de nouvelles formes avec l'émergence de nouvelles factions à l'université : la faction des étudiants sahraouis et celle des amazighes.
Les éléments disponibles jusqu'à présent ne permettent pas de savoir si les évènements actuels sont le fruit de simples étudiants ou s'ils les dépassent. Surtout avec le débat actuel sur l'autonomie du Sahara, les négociations directes,...
Certes, aujourd'hui tout le monde condamne la violence après la mort de l'étudiant Abderrahmane Hassanoui. Mais je dois rappeler que durant le mois d'avril, les étudiants d'Al Adl Wal Ihssane ont été victime de violence à Fès et à Meknès.
Nous avons toujours proposé un dialogue entre les différentes factions se trouvant au sein de l'université en 1996. Nous avons proposé une charte de l'université bien avant en 1991. Puis nous avons appelé à la création d'un front national estudiantin en 1997. En 2002 nous avons appelé de nouveau à un dialogue entre les différentes forces, mais en vain.
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Sifawe Brahim et Anir Atman, Etudiants amazighes d'Agadir :
Au moment où le Mouvement Culturel Amazighe est devenu une force au sein de l'université dans le paysage politique, le système makhzanien cherche à nous tordre la main.
Les évènements qui sont survenus dans l'université d'Agadir, de Meknès, Errachidiya... n'ont pas été programmés par le MCA. Note mouvement n'a fait que se défendre. Car, en principe nous rejetons la violence et nous préférons le débat intellectuel.
Nous a été poussés à nous défendre. Les étudiants sahraouis nous ont décrits comme les plus lâches, ils nous colle le sobriquet bassement injurieux de « chlihates moulana »...
Nous avons proposé aux étudiants sahraouis d'arrêter les dégâts et de nous arranger, mais il n'ont rien voulu savoir. Les étudiants marxistes du programme intermédiaire ont ajouté de l'huile sur le feu s'alliant aux sahraouis. C'est ce qui a fait que les affrontements ont touché d'autres sites universitaires comme celui d'Errachidiya, de Meknès et d'Oujda.
Des membres de la société civile sont intervenus pour concilier entre les différents mouvements. Mais ces tentatives ont été considérées comme étant des auspices du makhzen. Maintenant il y a une trêve entre les étudiants sahraouis et amazighs à Agadir. Mais la tension demeure entre nous et les étudiants marxistes ».
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Etudiants sahraouis de Casablanca :
« Les affrontements qui ont eu lieu dans la cité universitaire de Casablanca, ont été provoqués par six ex-étudiants qui n'ont plus de place, en principe, au sein de la cité universitaire.
Ces six intrus ont poussé d'autres étudiants à s'en prendre à nous. Nous, à Casablanca, nous n'avons rien à avoir avec ce qui arrives dans les autres site universitaires comme Agadir, Marrakech ou Errachidiya. Au contraire, nous avons de bonnes relations avec les étudiants amazighes.
Ce que nous souhaitons par dessus tout, c'est de pouvoir suivre nos études dans des conditions normales. C'est pour cela que nous avons parcouru plusieurs centaines de kilomètres et c'est pour cela que nos parents nous envoient à Casablanca ».
Errachidia : C'est l'accalmie après de grandes tempêtes
Depuis le jeudi 17 mai, le calme est revenu à la faculté des sciences et techniques (FST) et à la faculté poly disciplinaire d'Errachidia. Là, quelques jours auparavant, deux étudiants ont trouvé la mort. Le premier sur place et l'autre a rendu l'âme après avoir été transporté à un hôpital à Meknes. Un affrontement est à l'origine de ces décès. Il a eu lieu entre des étudiants du MCA (mouvement culturel amazigh) et des étudiants du programme intermédiaire proche d'Annahj Addimocrati. Ces bagarres rangées ont fait en plus des deux morts, six blessés.
Dès l'éclatement des premiers incidents, le gouverneur de la province d'Errachidia, Abdellah Amimi, a réuni les responsables des services de sécurités, le doyen de la faculté des sciences et techniques, le directeur de la cité universitaire et des représentants des partis politiques, des syndicats, des organisations des droits de l'Homme et des acteurs de la société civile. La réunion visait de ramener la paix entre étudiants sur la base du dialogue et de rétablir l'ordre et le calme au sein du campus universitaire.
Les affrontements ont causé à leur début la mort de l'étudiant Abderrahmane Hassanoui, qui poursuivait ses études en 4e année de géophysique. Une mort qui est due, selon une source locale, à un coups intentionnelle d'un étudiant appartenant au même groupe du défunt.
Une commission a été constituée pour tenter de rétablir le dialogue entre étudiants. Elle était composée du doyen de la FST d'Errachidia, du vice-doyen de la faculté poly disciplinaire, du directeur de la cité universitaire et des représentants des différentes sections provinciales des syndicats, des partis politiques, des organisations des droits de l'Homme. Tous ces responsables ont visité la cité universitaire et exhorté les étudiants à reprendre les cours pour sauver leur année universitaire.
Environ 1900 étudiants, dont 1400 résidant à la cité universitaire, poursuivent leurs études à la FST et à la faculté poly disciplinaire d'Errachidia.
Jeudi 17 mai : Affrontements à l'université de Rabat
Les étudiants sahraouis de la cité universitaire Suissi I à Rabat observent depuis le 14 mai un sit-in devant la cité universitaires en solidarité, affirment-ils, avec leurs camarades dans les universités d'Agadir, Marrakech et Casablanca. Pour protester, ils dorment à l'extérieur du campus. La police a commencé à les évacuer le jeudi dernier à l'aube. Lors de cette intervention, sept étudiants ont été blessés après des affrontements avec la police qui a interpellé plusieurs étudiants sahraouis.
Ces derniers ont riposté en jetant des pierres sur des véhicules policiers. Selon une source sur place, les étudiants sahraouis de Rabat et Marrakech, ont organisé des manifestations pacifiques sous l'œil des autorités locales qui les ont laissées faire. Voyant leur action banalisée, ils ont décidé d'attaquer eux-mêmes les policiers à coup de pierres. « L'objectif des étudiants est la provocation pour attirer l'attention sur eux. Ils vont jusqu'à s'attaquer aux valeurs sacrées du pays, pour ne pas passer inaperçus ».
Selon un premier bilan, les services de sécurité auraient arrêté au moins 17 étudiants sahraouis. La liste des étudiants arrêtés comprend les dénommés Mohamed Ali Ndour, Moulay Ahmed Ailal, Najim Saghir, Lekhlipha Jenhaoui, Mohamed Aloui, Houssain Dalaa, Abdati Dih,Brahim Lamine, Mohamed Hassan Lili, Al Aalem Abba, Brahim Gharabi, Taher Lebatt, El ouali Zaz, Brahim Salem Talbi, Hamadi Cheikh, Abidine Bounaaj, et Youssef Akder.
Parmi les blessés figurent Louchaa Amaa, Mohamed M'barek, Hamada Lembarki, Ali Karhi, Ghali Khalil, Yahdih Lebeihi et Salek Ahel Ivekou.
Lundi 14 mai à l'université de Casablanca, des heurts ont éclaté entre étudiants sahraouis et la police d'une part et un groupe d'étudiants de la cité universitaire d'autre part. Selon une source proche du dossier, les événements des universités sont dus au mot d'ordre de la direction du Polisario aux sympathisants de l'intérieur, surtout les étudiants et les lycéens pour la célébration du 34e anniversaire de ce que le Polisario appelle la lutte armée. Le Polisario table sur la médiatisation des affrontements entre les étudiants et les forces de l'ordre pour faire sa propagande et exploiter les photos qu'il pourrait recueillir pour salir l'image du Maroc auprès des ONG des droits de l'Hommes à l'étranger, très sensible aux questions des droits de l'Hommes.
Le 17 mai à Tantan, des drapeaux, des graffitis écrits sur les murs et des tracts séparatistes ont été collés et distribués dans la ville. Les forces de l'ordre sont intervenues pour disperser quelques groupes de jeunes fouteurs de troubles.
A la ville de Goulimine, les étudiants sahraouis ont organisé un sit-in, pour exprimer leur solidarité avec leurs camarades dans les universités marocaines, appelant à libération « immédiate » des étudiants détenus. D'autre part, les deux organisations sahraouies pour la défense des droits humains au Sahara, (CODESA et ASVDH), non reconnus par l'Etat, ont profité de l'occasion pour lancer un appel en direction des organisations internationales, en s'appuyant sur les photos de l'étudiante sahraouie, Soltana Khaya, qui a été grièvement blessée à l'œil au cours des évènements à l'université, Qadi Ayad de Marrakech.
Mise au point D'Annahj Addimocrati
Le secrétariat national d'Annahj Addimocrati a rejeté toute responsabilité de ses militants quant aux événements qui ont ensanglanté quelques facultés. « Le Secrétariat National d'Annahj Addimocrati informe l'opinion publique qu'Annahj Addimocrati n'a aucune relation avec ces événements, condamne le recours à la violence pour des raisons de divergences d'opinion, combat l'utilisation de la violence pour régler les divergences d'opinion. Le parti considère que l'université doit être un espace de libre expression des opinions et de débat démocratique », peut-on lire dans un communiqué d'Annah Addimocrati.
Deux étudiants de l'université d'Agadir condamnés à deux mois de prison
Le tribunal de première instance d'Agadir a condamné le 19 mai dernier à deux mois de prison ferme et à une amende de 1.000 dirhams, deux étudiants originaires respectivement de Kalaat Megouna et Tinghir, impliqués dans de récents affrontements entre étudiants. Un troisième étudiant, lui aussi originaire de Tinghir, a écopé de six mois de prison avec sursis et d'une amende similaire. Trois autres étudiants poursuivis, comme les premiers, pour détention d'armes blanches, coups et blessures, ont été acquittés. Cinq autres étudiants, originaires des provinces du sud, impliqués dans cette même affaire, ont comparu à deux reprises devant le juge d'instruction, le tribunal n'a pas encore statué sur leur cas.


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