Les forces américaines qui traquent des activistes présumés d'Al Qaïda en Somalie ont opéré mercredi de nouveaux raids aériens dans le Sud, a-t-on indiqué de source gouvernementale alors que l'intervention militaire de Washington se voit de plus en plus critiquée. Les attaques visaient les secteurs de Hayo, Garer, Bankajirow et Badmadowe, a-t-on déclaré de même source à Reuters. "Bankajirow était le dernier repaire islamiste en date. Bankajirow et Badmadowe sont les plus touchés", a-t-on ajouté. Les raids ont eu lieu non loin du village côtier de Ras Kamboni, proche de la frontière kenyane, où seraient retranchés de nombreux islamistes chassés de Mogadiscio par les troupes éthiopiennes qui défendent le gouvernement intérimaire somalien. Des représentants du Pentagone ont reconnu un raid aérien lundi dans le cadre d'une offensive plus large menée avec l'aviation éthiopienne contre une cellule d'Al Qaïda. Celle-ci comprendrait selon Washington des éléments impliqués dans des attentats perpétrés en Afrique orientale - notamment contre les ambassades américaines au Kenya et en Tanzanie en 1998. Des responsables somaliens ont fait état de nombreux morts dans l'attaque de lundi, qui marquait la première action militaire ouverte des Etats-Unis en Somalie depuis la fin calamiteuse d'une mission humanitaire en 1994. Un chef coutumier de la région a signalé une seconde frappe aérienne américaine mardi dans l'extrême Sud, mais l'information n'a pas été confirmée par d'autres sources. Les opérations américaines ont reçu l'approbation du président somalien Abdullahi Yusuf, revenu cette semaine à Mogadiscio, mais ont été critiquées par d'autres, notamment par le nouveau secrétaire général de l'Onu Ban Ki-moon, l'Union européenne et l'Italie, l'ex-puissance coloniale. "Les Américains pourchassent les terroristes d'Al Qaïda où qu'ils soient dans le monde et le (raid de lundi) participe de cette campagne", a déclaré Yusuf au journal arabophone Achark al Aoussat. CRITIQUES DE L'ONU "Ceux qui ont commis les attentats contre les ambassades des Etats-Unis au Kenya et en Tanzanie étaient présents ici et ce qui a été fait (NDLR, par les Américains), c'est ce qu'il fallait faire. Le moment était venu de lancer ces raids." Selon Michèle Montas, porte-parole de Ban Ki-moon, "le secrétaire général est inquiet de la nouvelle dimension que ce type d'intervention pourrait apporter au conflit et de la possible escalade des hostilités qui pourrait en résulter". Le chef de la diplomatie italienne, Massimo D'Alema, a dit que Rome s'opposait aux "initiatives unilatérales pouvant créer de nouvelles tensions dans une région déjà très déstabilisée". Selon un responsable des renseignements américains, le raid de lundi, opéré par un avion AC-130 équipé d'un canon automatique, a causé la mort de l'un des trois suspects d'Al Qaïda recherchés pour les attentats de 1998. Les Etats-Unis espèrent notamment mettre la main sur Abou Talha al Soudani, que la justice américaine considère comme un artificier d'Al Qaïda dirigeant la cellule est-africaine de la nébuleuse islamiste. L'Ethiopie avait déployé des troupes dans le pays voisin fin 2006 pour évincer les islamistes qui contrôlaient la plus grande partie du Sud depuis juin et menaçaient le fragile gouvernement de transition dans sa base provinciale de Baïdoa. A Mogadiscio, les habitants ont été réveillés mercredi avant l'aube par des tirs dans un quartier où sont cantonnés des soldats éthiopiens et somaliens qui avaient déjà été la cible d'une attaque mardi. Des témoins ont fait état d'un cadavre dans une rue. Lors d'une autre attaque, une personne au moins a été tuée par des miliciens somaliens qui ont tiré une roquette RPG sur un camion éthiopien. Le tir a manqué le véhicule et atteint une habitation, a-t-on rapporté de source gouvernementale. Selon des sources militaires américaines et françaises citées par ABC News, des unités spéciales américaines opèrent avec des soldats éthiopiens pour des actions au sol en Somalie. Le ministre de l'Intérieur Hussein Mohamed Aïdid a cependant démenti l'information. "Il n'y a pas de forces terrestres américaines à l'intérieur de la Somalie. L'engagement américain se limite aux airs et à la mer", a-t-il dit. Le président Yusuf et le Premier ministre Ali Mohamed Gedi se sont engagés à rétablir l'ordre dans le pays. Tous deux ont réclamé le déploiement de troupes de maintien de la paix africaines pour prévenir l'insécurité où le pays risque de retomber après le retrait de l'armée éthiopienne.