Si le marché marocain présente des opportunités importantes en matière d'industrie pharmaceutique, le secteur de la santé connaît nombre de défis. Un récent rapport du cabinet de conseil économique Fitch Solutions est consacré à la situation de ces services dans le pays. Au Maroc, une grande partie de la population n'a pas accès à une couverture médicale. En 2017, la Banque mondiale a estimé le nombre de Marocains privés de ces prestations à 8,5 millions de personnes. Dans une récente étude sur l'attractivité du marché des produits pharmaceutiques et de la situation du secteur médical du pays, le cabinet Fitch Solutions reprend ce chiffre parmi d'autres pour expliquer que le système de santé national se confronte à des défis de longue date. Ces défis sont incarnés aussi, pour Fitch Solutions, à travers les vagues de protestations du côté des patients qui contestent la qualité des soins ainsi que du côté des médecins quant à leurs conditions de travail. L'impunité du privé entâche le secteur national de la santé Ainsi sont pointés du doigt, de part et d'autre, la qualité des prestations sociales, la corruption et les bas salaires des praticiens du secteur publique ainsi que le désengagement du ministère de tutelle à trouver une solution viable à ces problèmes. En plus de menacer la continuité des services de santé pour tous, ces défis risquent de compromettre l'attractivité du marché pharmaceutique et de l'investissement dans ce secteur, prévient Fitch Solutions qui cite les enquêtes gouvernementales sur les prix des prestations nettement supérieurs à la réglementation en vigueur dans le milieu des cliniques privées, en l'absence de mécanismes de contrôle et de coercion stricts. «Depuis décembre 2013, le gouvernement marocain met en œuvre une politique de réduction progressive des prix des médicaments, notamment ceux destinés aux soins des maladies chroniques», rappelle encore le cabinet en notant qu'en mai dernier, cette réduction a concerné plus de 3 000 personnes, parallèlement à des mesures pour renforcer la fabrication locale des médicaments, dans l'idée de réduire les coûts de production et de distribution. Si cette initiative concerne surtout la fabrication de génériques, Fitch solutions considère qu'au regard de l'investissement international, cela pourrait jouer en défaveur de l'attractivité du marché du pays pour les fabricants étrangers. L'industrie pharmaceutique se porte bien, mais pas l'accès aux soins Fitch Solutions estime globalement que le marché marocain représente des opportunités, «avec un investissement dans le marché pharmaceutique estimé à 16,53 milliards de dirhams (1,68 milliard de dollars), qui devrait atteindre une valeur de 33,76 milliards de dirhams (3,27 milliards de dollars) d'ici 2028». Selon l'agence, ce succès est dû en grande partie au renforcement du processus d'approbation des produits ainsi que des liens entre le royaume et ses partenaires économiques européens. Toujours est-il que le Maroc peine à trouver son équilibre entre garantir les droits élémentaires de ses citoyens à des prestations de santé accessibles à tous et satisfaire les investisseurs étrangers désireux de se lancer dans le secteur national. En effet, la couverture sanitaire universelle reste un grand chantier qui n'a pas encore vu le bout du tunnel. Sa mise en œuvre devra permettre l'extension de prestations médicales de qualité aux couches défavorisées de manière plus équitable, notamment dans le monde rural. «L'engagement du gouvernement en faveur de cet objectif a donné quelques résultats initiaux auprès du chef du gouvernement, Saâdeddine El Othmani, qui a noté en mai 2019 que la couverture des soins de santé avait été étendue à 60% de la population, contre moins de 47% en 2017», rappelle Fitch Solutions. La même source évoque, dans ce sens, le plan gouvernemental en six étapes visant à réformer le système de santé d'ici 2025, à commencer par amélioration de l'accès et de la qualité des soins. Mais sur le terrain, remédier au manque de personnel de la santé en milieu rural reste une toute autre paire de manche, au temps où les zones reculées du pays vivent encore un grand désert médical, comptant très peu de généralistes, presque pas de spécialités et un nombre d'infirmiers souvent en deçà des besoins des populations locales. «Une partie du budget alloué à cette fin servira à l'amélioration des installations existantes et à l'hébergement des professionnels de la santé», indique l'étude, rappelant le soutien de l'OMS au Maroc dans les domaines de la formation, de la couverture universelle, de la gouvernance du secteur et de la transmission des bonnes pratiques.