Le maire UMP de Nice, Christian Estrosi, a annoncé, hier, qu'il porterait plainte contre Abderrazak Fetnane, conseiller municipal de Nice, dans l'opposition, pour diffamation. Sollicité par plusieurs familles, M. Fetnane dénonçait, hier, dans un communiqué l'intention de la Ville de récupérer 38 concessions funéraires dans une partie du carré musulman du cimentière de l'Est de Nice. «Je n'accepte pas qu'on essaie de semer le trouble dans quelque communauté que ce soit et notamment au sein de la communauté musulmane !», a martelé Chistian Estrosi, le maire UMP de Nice, rapporte Nice Matin. Il a annoncé son intention de porter plainte «pour diffamation», hier après midi, lundi 19 décembre, lors d'une conférence de presse, en présence de secrétaire du Conseil Régional du Culte Musulman (CRCM), Boubekeur Bekri. La plainte devrait viser Abderrazak Fetnane, conseiller municipal de Nice et élu de l'opposition socialiste qui a dénoncé la volonté de la mairie d'exhumer 38 tombes dans le carré musulman du cimetière de l'Est de Nice. Si le nom de M. Fetnan n'a pas été énoncé directement, Christian Estrosi a visé explicitement un «élu d'opposition qui est allé agiter un certain nombre de familles en leur disant : Attention, on est en train d'exhumer votre défunt !» L'élu, qui se refuse à tout commentaire sinon pour affirmer que c'est «à présent aux familles de s'exprimer», assurait hier, avant la déclaration de M. Estrosi, que son rôle s'était limité à conseiller les familles des défunts. «Des familles sont venues me voir en me demandant si ces exhumations étaient normales alors qu'elles n'avaient pas été averties. Je leur ai conseillé de se constituer en association. Ainsi, elles auraient plus de poids et, surtout, pourraient centraliser les informations reçues par chacun», expliquait-il. L'homme a appuyé leur indignation en publiant un communiqué de presse sur le blog de l'opposition «Changer d'ère». Pour la mairie, «Monsieur Fetnan a été associé à toutes nos discussions sur le carré musulman, je suis surpris qu'il ne m'ait pas passé un coup de fil», a pointé, hier, Auguste Verola, adjoint délégué au culte. «Lorsque cela a été voté en conseil municipal, tout le monde a applaudi...», a ajouté M. Estrosi. Aberrazak Fetnane, hier, ignorait si un vote au Conseil municipal avait eu lieu. «Je ne pense pas», estimait-il dit. L'affaire tourne ainsi à un affrontement entre l'équipe en place à la mairie, UMP, et l'opposition P.S. Sur les faits eux-mêmes, il est à présent acquis que la Ville, ainsi que M. Estrosi l'affirme lui-même, n'a procédé à aucune exhumation. Les 4 exhumations qui ont déjà eu lieu sont le fait de familles qui ont réagi suite à la demande de la mairie. La décision de la mairie d'exhumer les corps pour les placer dans un ossuaire, un caveau, a été prise pour libérer de la place dans le carré musulman car les sépultures en pleine terre, plutôt qu'en caveau, prennent plus de place. Ces exhumations sont rendues légales par l'arrivée à échéance de concessions funéraires. Une pratique courante. Malgré les explications de la ville et à cause d'elles, les familles des défunts membres du Collectif «Touchez pas à nos tombes» ne décolèrent pas. «Je suis révolté, si M. Estrosi était là, devant moi, je lui dirai ses quatre vérités», lance El Ayachi Ben Abdesselam, 67 ans, membre du Collectif et Niçois depuis 1976, l'homme avait enterré sa fille, en 1987, dans la partie du carré musulman que la mairie compte exhumer. «Depuis 1987, personne ne m'a jamais dit qu'il fallait renouveler les concessions funéraires. Je n'en avais aucune connaissance !», s'indigne M. Ben Abdesselam. Il a finalement choisi de rapatrier le corps de sa fille à Oujda pour l'enterrer. Aujourd'hui, la colère des familles se cristallisent principalement sur le manque d'information. Toutes familles dont les concessions sont arrivées à échéance ont reçu «deux lettres recommandées avec accusé de réception», a assuré M. Estrosi, qui les mettra «à disposition du juge d'instruction». «J'habite à la même adresse, à Nice, depuis 1976 et je n'ai reçu aucun courrier !», s'indigne M. Ben Abdesselam. «Nous avons mis ces écriteaux car nous n'avons pas les coordonnées de ces familles, qui disposent d'emplacements gratuits, arrivés à échéance. Mais il n'y a pas de caractère d'urgence», a précisé le maire selon le quotidien 20 minutes. «Je me suis adressé au service des pompes funèbres où l'on m'a expliqué que la mairie pouvait exhumer les corps n'importe quand, c'est pourquoi je me suis empressé de rapatrier le corps de ma fille, qui n'avait pourtant pas la nationalité marocaine au jour de sa mort, à Oujda», raconte El Ayachi Ben Abdesselam. Les propos de M. Estrosi ont également révolté les familles, lorsqu'il a affirmé que la décision avait été prise par la Ville «en concertation avec le CRCM et à la demande des familles, de réaliser un ossuaire.» M. Ben Abdesselam assure ne connaître aucune famille qui ait demandé un ossuaire. «Nous étions nombreux, à la manifestation, dimanche. Nous étions tous tristes ; personne n'a indiqué qu'il avait demandé à la mairie de transfert des corps dans un ossuaire», affirme-t-il.