Le maire de Nice a-t-il du mal à accepter l'achat, en pleine centre ville d'une salle de prière par la communauté musulmane ? La question s'impose, car la municipalité a décidé d'exercer son droit de préemption sur les locaux d'une salle de prière en phase d'être acquise par une association islamique. Il s'agit de mettre de l'ordre et d'empêcher les «prières de rue», dixit la mairie. Depuis onze ans, les musulmans du centre ville de Nice accomplissent leurs prières dans une salle de prière aménagée à cet effet. Après accord conclu avec le propriétaire, ils ont décidé, via une association, Al Baraka, d'acheter le local, pour un montant de 161 000 euros. La somme réunie, il était question de finaliser l'acte d'achat et d'entrer enfin en possession des locaux de cette salle de prière. Mais c'est à ce moment que le maire de la ville est intervenu pour exercer son droit de préemption sur les locaux. Autrement dit, il a fait valoir la priorité que lui confère la loi, de pouvoir se substituer à l'acquéreur (l'association Al Baraka), pour acheter le bien mis en vente (les locaux de la salle de prière). Cet acte a provoqué l'indignation des musulmans de cette grande ville du sud de la France. L'association Al Baraka, en charge de la salle de prière, sise rue de Suisse parle déjà d'acte «islamophobe et raciste». D'autant plus que, indique l'association, M. Christian Estrosi (maire UMP) «s'était engagé à ne pas s'opposer à l'achat des locaux» et «s'était même proposé d'élargir notre salle de prière par la mise à disposition d'un local municipal attenant». Pourquoi donc ce revirement ? «Mettre de l'ordre» A la mairie, on explique cette préemption par un projet visant à requalifier le quartier, dans le cadre du programme national de rénovation des quartiers dégradés (PNRQAD), mais aussi par la volonté de «mettre de l'ordre» face aux débordements et aux prières dans la rue. La mairie n'exclut pas, par la suite de faire de ce local «un lieu associatif, cultuel ou culturel». Une manœuvre qui est loin de faire l'unanimité, même au sein du conseil municipal de la ville. Recours judiciaire «Le maire Christian Estrosi affiche clairement que le culte musulman ne peut être chez lui dans la ville et encore moins dans le centre» déclare Abderrazak Fetnan, conseiller municipal (opposition), qui invite le maire à «renoncer à cette préemption, au nom de la communauté musulmane qui n'aspire qu'à vivre en paix.» Christian Estrosi est en effet soupçonné, par cet acte, de faire les yeux doux à l'électorat de l'extrême droite. Si la ville venait effectivement à acheter les locaux, elle pourrait même faire disparaître la salle de prière. Le projet d'acheter la salle qu'ils utilisent depuis 10 ans pourrait ainsi avoir comme conséquence de priver les musulmans de leur lieu de culte. Selon le site ajib.fr, la ville serait en train de suivre une stratégie perfide pour éloigner les musulmans du centre ville, sachant que la salle de prière est située à quelques pas de la Basilique de Notre Dame. L'association Al Baraka n'entend pas se laisser faire. Elle compte saisir le tribunal administratif et la préfecture des Alpes-Maritimes pour contester la décision. Elle appelle également les élus de la majorité de confession musulmane au sein du conseil municipal de Nice (au nombre de trois) et tous « les élus républicains» à s'opposer à cette préemption.