Une équipe de chercheurs dirigée par le Franco-marocain Abderrazak El Albani ont découvert la plus ancienne preuve d'un développement révolutionnaire de l'histoire de la vie sur Terre : la capacité des organismes à se déplacer par eux-mêmes. Le chercheur franco-marocain Abderrazak El Albani, docteur en géologie et géochimie sédimentaire, fait encore une fois parler de lui. L'équipe internationale et multidisciplinaire qu'il dirige à l'Institut de chimie des milieux et matériaux de Poitiers (CNRS – Université de Poitiers) a mis à jour cette semaine les plus anciennes traces de motilité fossilisées. «Alors que les vestiges antérieurs remontaient à 570 millions d'années, cette nouvelle preuve date de 2,1 milliards d'années», écrit lundi Science Daily. Ce média cite les résultats d'une nouvelle étude publiée dans l'édition du 11 février 2019 de la Proceedings of the National Academy of Sciences (PNAS), la revue scientifique américaine à comité de lecture, publiant les comptes rendus de l'Académie américaine des sciences. Il y a quelques années, le géologue Abderrazak El Albani et son équipe ont découvert les plus anciens fossiles d'organismes multicellulaires existant dans un gisement au Gabon. Situé dans le bassin de Franceville, le gisement a permis aux scientifiques de dater à nouveau l'apparition de la vie multicellulaire sur Terre à 2,1 milliards d'années, soit environ 1,5 milliard d'années plus tôt que prévu. Des chercheurs ont ainsi montré que cette riche biodiversité coexistait avec un pic de richesse de l'oxygène de l'atmosphère terrien et se développait dans un environnement marin calme et peu profond. Dans ce même gisement géologique, l'équipe a découvert l'existence de traces de motilité (capacité de se déplacer spontanément ou par réaction à des stimuli) fossilisées. Cela montre que certains organismes multicellulaires de cet écosystème marin primitif étaient suffisamment sophistiqués pour se déplacer dans une boue riche en matière organique. Une motilité pour trouver des éléments nutritifs et de l'oxygène Les traces, analysées et reconstruites en 3D, montrent des «structures plus ou moins sinueuses et tubulaires, d'un diamètre généralement constant de quelques millimètres, et traversant de fines couches de roches sédimentaires». Les analyses géométrique et chimique révèlent, quant à elles, que ces traces sont d'origine biologique et seraient apparues au même moment où les sédiments se sont déposés. «Il est plausible que les organismes à l'origine de ce phénomène se soient déplacés à la recherche d'éléments nutritifs et du dioxygène, tous deux produits par les cyanobactéries», poursuit l'étude. Le Franco-marocain Abderrazak El Albani. / Ph. DR Celle-ci indique que «bien qu'elles soient difficiles à connaître avec certitude, ces organismes ressemblent peut-être aux amibes coloniales, qui se regroupent lorsque les ressources se raréfient et forment une sorte de limace qui se déplace à la recherche d'un environnement plus favorable». Leur identité reste donc un mystère. Toutefois, «ce qui compte, c'est leur étonnante complexité et leur diversité de formes et de tailles, et probablement en termes de schémas métaboliques, développementaux et comportementaux, y compris la toute première preuve de motilité découverte récemment, au moins pour certains d'entre eux», déclare le paléo-biogéochémiste et spécialiste des roches sédimentaires Abderrazak El Albani, cité par le média Eyewitness News. «La vie à l'époque dite paléoprotérozoïque, il y a 2,5 à 1,6 milliards d'années, était non seulement bactérienne, mais des organismes plus complexes ont émergé à un moment donné, probablement pendant certaines phases et dans certaines conditions environnementales.» Abderrazak El Albani Cette preuve de la motilité retrouvée dans une roche vieille de 2,1 milliards d'années soulève de nouvelles questions sur l'histoire de la vie, sachant que pendant la même époque, les scientifiques font état d'une chute drastique des taux d'oxygène dans l'atmosphère, il y a 2,083 milliards d'années.