Année 2024: Un engagement fort et un rôle agissant du Maroc au sein du CPS de l'UA    Service militaire : Le 39e contingent prête serment    Maroc-Azerbaïdjan : le Parlement azerbaïdjanais approuve l'accord de coopération militaire    Le Conseil de gouvernement adopte un projet de décret fixant la liste des congés exceptionnels accordés aux magistrats    Taxe carbone : le Maroc veut verdir son économie sans sacrifier sa compétitivité    Le Conseil de gouvernement adopte un projet de décret relatif à l'application de la TVA prévue au titre III du CGI    Taxis vs VTC : Une guerre sans fin ?    Syrie : Interpellation d'un ancien responsable sous le régime déchu de Bachar al-Assad    Corée : le président par intérim à son tour destitué par les députés    Le Maroc et le Bahreïn déterminés à renforcer leur coopération en matière de développement social    Migration : l'afflux migratoire vers les Canaries fait plus de 10 000 morts    Al Ahly: Premier but '' égyptien'' d'Attiat Allah!    Al Shabab : Abderrazak Hamdallah buteur face à Al Kuwait    Real : Le Stade Santiago Bernabéu va changer de naming    LNFP : Mercato hivernal fixé, indemnités des commissaires revalorisées et centres Evosport réactivés...    Activités liées au cannabis: Aucune infraction enregistrée en 2024 en matière de non-conformité    Les professionnels de santé annoncent continuer les grèves en début 2025    Loi organique sur la grève. Abdellatif Komat : "Ce nouveau projet va dans le sens de l'équilibre"    Maroc : Un projet de décret sur l'indemnité d'encadrement de formation continue dans l'Education nationale    DGI : dernière chance pour la régularisation fiscale    Cyclone Chido. Le Mozambique est dévasté    Distinction : Bouchra Karboubi, cinquième meilleure arbitre femme pour 2024    Football : le New York Times sacre le Maroc superpuissance du ballon rond    Afrique du Sud. Plus 17.000 kidnapping en un an    Délai de paiement : l'amende indexée au nouveau taux directeur    Algeria imposes new restriction on Saharawis : Ban on phone card top-ups in Tindouf Camps    Chase between taxi drivers and ride-hailing driver in Rabat ends in arrests    Tragic boat sinking off Morocco's coast claims 69 lives, including 25 Malians    Challenge N°951 : Du 27 décembre 2024 au 9 janvier 2025    Burger King ouvre un fast-food à Settat    2 nominations à la tête de l'aviation civile et l'Agence urbaine de Guelmim-Oued Noun    Le gouvernement acte la hausse du SMIG et du SMAG par décret    Ecoles pionnières : Casablanca-Settat compte atteindre le taux de 52% en 2025    Les prévisions du mercredi 27 décembre    Tarik Talbi nommé directeur général de l'aviation civile    À Tanger, création de la Fédération régionale des coopératives féminines    «La Perle Noire» : Ayoub Qanir signe un nouveau long-métrage captivant    IFFHS Awards 2024: Bouchra Karboubi cinquième meilleure arbitre féminine au monde    Les Années de la Culture Qatar-Maroc 2024 : Célébration d'une année d'échanges culturels sans précédent    ICESCO : Lancement de "Montre-moi ton sourire", une bande dessinée pour lutter contre le harcèlement scolaire    Gigantesque marche populaire à La Havane contre le blocus américain    Des initiatives renouvelées au service du rayonnement culturel du Royaume    BRICS : Les enjeux d'une hypothétique adhésion marocaine [INTEGRAL]    Manama: Le Maroc participe à la 44e session du conseil des ministres arabes des affaires sociales    Maroc : Le poète Mohamed Aniba Al Hamri tire sa révérence    L'OPM célèbre le nouvel an avec un programme festif de musique latine    Un pont de création, de dialogue et d'échanges entre artistes, étudiants et critiques    L'artisanat, une passerelle vertueuse rassemblant dans son savoir-faire toute la diversité du Royaume    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



Chronique du Dr Lahna : «Aide-moi... je t'aiderai !»
Publié dans Yabiladi le 04 - 12 - 2018

Mes amis, le problème est-il de laisser la pourriture sévir au prix de la dignité et la sécurité des patients, ou d'essayer de lutter contre elle en la nettoyant ? Ou bien est-ce que le mal est tellement profond qu'il fait partie de notre quotidien et s'est inscrit dans nos gènes, nous retirant ainsi toute option de résistance ?
«Aide-moi… je t'aiderai !» C'est ce qu'aurait dit une sage-femme dans un hôpital provincial marocain alors qu'elle recevait une femme pliée en deux à cause des contractions utérines du travail, accompagnée de sa belle-sœur. Et justement, Fatna, la belle-sœur, me connaît très bien puisque c'est la dame qui aidait ma mère à s'occuper de la maison et qui m'a soutenu durant mes années d'études médicales difficiles et prenantes.
Dès que Fatna m'a vu, elle m'a dit avec amertume : «Docteur, il faut que je te raconte ce qui nous est arrivé à l'hôpital de Settat. On habite à la campagne, à environ 20 km, et je suis resté avec ma belle-sœur, enceinte de son troisième enfant pour la soutenir lors de son accouchement. Au petit matin, les contractions utérines ont commencé et sont devenues de plus en plus rapprochées, annonçant ainsi l'éminence de l'accouchement. Comme la plupart des Marocains à faible revenus, on a accouru à l'hôpital. Reçue par une sage-femme, elle a examiné ma belle-sœur et lui a dit sur le champ : ''Aide-moi… je t'aiderai''».
Voyant que les deux femmes de la campagne n'avaient pas bien saisi le message, elle a précisé : «Si tu veux que je t'aide pour accoucher, ça sera 200 dirhams.» La douleur ne laisse pas le temps à la réflexion, et encore moins à la protestation. Les deux femmes ont commencé à fouiller dans leurs porte-monnaie respectifs pour ramasser ce qu'elles avaient et lui ont tendu 150 dirhams. La sage-femme a fait mine que ce n'était pas suffisant, mais les a pris et a installé la femme dans un box d'accouchement. Une autre femme est arrivée en même temps, mais comme elle n'avait pas d'argent sur elle, elle a été laissée souffrante sans aucune prise en charge, selon Fatna.
L'accouchement a été rapide. Bienvenu au nouveau-né sous des cieux pourris et corrompus. La brancardière qui devait accompagner la femme vers sa chambre a demandé à son tour un petit bakchich. La femme lui a dit qu'il ne lui restait plus rien, alors sans aucune décence, elle lui a demandé un habit. Elle en est sortie avec un châle et un caleçon.
Et ce n'est pas fini, ajoute Fatna. Le lendemain, l'accouchée a eu droit à une ordonnance d'antibiotiques, antalgiques et lait maternel. Au Maroc, pays pauvre au pouvoir d'achat très limité, on ne fait la promotion du lait maternel que dans les congrès. Le lobby corrupteur des laits artificiels est si fort que 72% des femmes toutes catégories sociales confondues achètent au prix d'or le lait pour nourrir leurs nouveau-nés. Alors, quand vous verrez des femmes avec des nourrissons mendier dans les carrefours une boîte de lait à la main, je vous invite à avoir une pensée pour ce désastre sociétal !
Mais ce n'est pas le sujet. Une personne en blouse blanche – Fatna et l'accouchée ne savaient pas vraiment à qui elles avaient affaire – est venue les voir pour profiter de l'ignorance entretenue dans les campagnes : «Vous savez, cette ordonnance coute vers les 600 dirhams. Moi, je peux vous procurer tous ces médicaments !», et elle ajoute la phrase culte : «Aide-moi… je t'aiderai !»
Le mari présent pendant cette deuxième transaction accepte parce que comme tout un chacun qui évolue dans cette atmosphère néfaste, il souhaite s'en sortir en perdant le moins possible de plumes.
Maintenant, je m'adresse aux soignants qui travaillent dans le secteur public, à savoir les médecins, sages-femmes et infirmiers, qui pensent qu'en décriant ces comportements, je mets de l'huile sur le feu et j'attise la détestation du corps soignant. Pensez-vous vraiment que la population a besoin de mes écrits pour comprendre ce qui se passe dans les structures publiques et parfois privées du pays ? En écrivant, je me mets du côté des faibles et c'est là que je trouve ma place et mon rôle. J'essaie également d'élever la conscience d'une certaine élite qui ne connaît pas les affres que subissent les laissés-pour-compte et des soignants qui n'en peuvent plus de regarder al mounkar (cette injustice) en se sentant solitaires mais démunis.
Mes amis, le problème est-il de laisser la pourriture sévir au prix de la dignité et la sécurité des patients, ou d'essayer de lutter contre elle en la nettoyant ? Ou bien est-ce que le mal est tellement profond qu'il fait partie de notre quotidien et s'est inscrit dans nos gènes, nous retirant ainsi toute option de résistance ? Vous savez bien qu'aucun problème n'a été résolu en adoptant la politique de l'autruche. Et comme j'ai une haute idée de notre métier et d'un grand nombre de soignants que je croise souvent à travers tout le royaume, soit en opérant avec eux ou en les formant, que rien n'est insurmontable et qu'avec des volontés individuelles et collectives, on pourra mettre fin à ces comportements indécents et nuisibles. Sachez que ces mauvaises personnes pullulent et prospèrent parce que les bonnes se taisent et acceptent l'inacceptable.
Maos l'issue de notre histoire fut heureuse, avec une maman et un nouveau-né en bonne santé. On a fini la soirée avec Fatna et ma mère, en tournant ce malheur en dérision, comme on sait le faire dans notre culture marocaine afin d'adoucir l'atmosphère et survivre en répétant presque après chaque phrase : «Aide-moi… je t'aiderai !»


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.