A la Cour d'appel de Casablanca, Nasser Zefzafi a pris la parole en appelant les avocats de la défense à ne pas faire de plaidoyer. Il s'est finalement retiré de l'audience d'hier, l'une des dernières au cours d'un procès qui dure depuis plus d'un an. Le procès du Hirak et ses détenus vivent leurs dernières audiences, sur fond de tensions omniprésentes depuis le début de ce feuilleton judiciaire. Le rebondissement le plus récent est celui de la séance d'hier à la Cour d'appel de Casablanca, dont le chef de file du Hirak, Nasser Zefzafi, s'est retiré dès son ouverture. Dans un long communiqué lu après avoir été appelé à la barre, le militant s'est exprimé au nom de tous ses codétenus, annonçant ce retrait et appelant les avocats de la défense de s'abstenir de toute prise de parole. Dans son discours, Zefzafi a expliqué que sa décision et celles des autres prévenus exprimait leur protestation contre la partialité du Parquet, qui n'adopte selon lui que la version officielle concernant le Hirak. Le détenu a notamment reproché à la cour de ne pas tenir compte des allégations de torture dont ses camarades et lui disent avoir été victimes, rappelant que le tribunal avait refusé leur requête d'expertise médicale. Nasser Zefzafi a également souligné que les procès-verbaux sur lesquels se base ce procès auraient été déformés, au moment où les conditions de vie en prison deviennent de plus en plus critiques. Le chef de file du Hirak et les autres militants se sont retirés de la salle d'audience, laissant leurs avocats délibérer avant la reprise de la séance, où ils ont déclaré appuyer la décision des détenus et faire acte de présence tout en s'abstenant de prendre la parole. Un nouveau report à la 81e audience En l'absence des prévenus, l'audience a été reportée à mardi prochain, tandis que le Parquet général a considéré infondée la décision de Nasser Zefzafi et de ses codétenus. Par ailleurs, il a indiqué que le tribunal avait écouté le concerné plus de 13 fois, ajoutant que ce retrait de la séance est une première dans l'histoire des procès tenus au Maroc. Au micro de Yabiladi, Brahim Rachidi, avocat de la partie civile, a ainsi déploré le retrait des audiences, expliquant que «c'est une chose jamais vue dans les annales des tribunaux marocains, parce qu'en matière pénale, les avocats sont là pour assister et non pas représenter les accusés». De son côté, Abdelkrim El Moussaoui, avocat de la défense, indique à Yabiladi que «la décision des militants poursuivis est une décision collective, remise par écrit au Parquet». Pour lui, «les avocats de la défense n'avaient pas d'autre choix que de s'aligner sur la décision des détenus». Les détenus privés d'un second aïd loin de leurs familles A l'approche de la fête de la fin du ramadan et à l'image de ce qui s'est passé l'année précédente, les familles des détenus indiquent qu'il est difficile de parler de «fête» au moment où leurs proches sont en prison. Ahmed Zefzafi, père de Nasser, nous indique en effet qu'«il n'y a d'aïd ni l'année dernière, ni cette année». «L'aïd ramène à la fête et la joie. Nous ne sommes pas joyeux, tant que nos enfants ont été enlevés, torturés et emprisonnés alors que nous nous sacrifions pour eux. Nous fêterons l'aïd le jour où ces jeunes sortiront de prison, si jamais ils sont remis en liberté. Je ne peux pas prédire l'avenir.» Ahmed Zefzafi A l'été 2017 et à la fin du ramadan, Nasser Zefzafi et ses codétenus avaient annoncé qu'il n'y aurait pas de célébration de l'Aïd tant qu'ils n'auraient pas retrouvé leur liberté. Les familles s'étaient jointes à la mobilisation pour appeler à sortir leurs enfants de prison. Une mobilisation qui est à l'ordre du jour cette année encore.