Un débat qui aura fait débat, et des dégâts, pour ne devenir en fin de compte qu'une simple convention de l'UMP de… deux heures de temps dans un hôtel parisien. La convention sur la laïcité a provoqué une véritable levée de boucliers en France : de la société civile au gouvernement, en passant par les représentants des cultes en France et même au sein de l'UMP, tous disent non à «ce débat de trop» sur l'islam. La montagne risque bien d'accoucher d'une souris ce mardi en France. Le débat de l'UMP sur l'islam se transforme au finish en une convention sur la laïcité. Les palabres politiques prévues sur la place de l'islam dans l'Hexagone seront compressées en deux heures de discussions dans un hôtel de Paris. Un chamboulement du calendrier qui illustre fort l'échec de l'aile extrémiste du camp de Nicolas Sarkozy. Ainsi que leur marche arrière face à la forte opposition qu'a suscitée ce débat dont l'objectif inavoué est la conquête de voix du Front national à un an des présidentielles. Tous contre le débat Les musulmans de France avaient dès le début fustigé ce débat qui ne contribue qu'à accentuer leur stigmatisation dans la société. Abdallah Zekri, membre de l'UMP, avait publiquement déchiré sa carte, signant sa sortie de la formation au pouvoir. Abderrahmane Dahmane, conseiller technique chargé de la diversité à l'Elysée et ancien secrétaire national chargé de l'immigration à l'UMP excédé par cette manœuvre avait pour sa part qualifié son parti de «peste pour les musulmans» de France, précipitant son limogeage par le locataire de l'Elysée. Ce samedi (3 avril), des centaines de musulmans ont manifesté à Paris pour réitérer, une nouvelle fois, leur opposition au «débat» de ce mardi 5 avril. Les cultes de France… Cette opposition a été clamée haut et fort par la Conférence des responsables de culte en France. Une Conférence qui réunit depuis le 23 novembre 2010, représentants du christianisme, de l'islam, du judaïsme ainsi que du bouddhisme français. Dans une tribune commune publiée la semaine dernière, ils ont tous dit non à ce débat qui selon eux, ne devrait pas porter l'empreinte d'un «parti politique, fût-il majoritaire». … la société civile… La société civile française pour sa part, compte organiser ce mardi à partir 18 heures (le jour de la convention), un happening contre le débat. Des associations de défense des Droits de l'Homme, de défense de la laïcité, les associations de jeunes militants de gauche et les organisations syndicales seront en tête de cette manifestation qui se tiendra devant le siège de la fédération UMP du Rhône. Pour ces associations, «l'UMP cache [ainsi] sa volonté de stigmatiser une religion en particulier et ses pratiquants, derrière un terme positif qui nous rassemble, celui de 'laïcité' (...) C'est pourquoi nous refusons de nous taire et de laisser l'UMP et le gouvernement actuel la mettre en péril». … Fillon et ses ministres… Si le gouvernement et l'UMP mettent la laïcité en péril, les dissensions sur la tenue du débat les malmènent terriblement. Le premier ministre François Fillon et des membres de son équipe ont d'ores et déjà fait savoir qu'ils n'y participeront pas. Pour Matignon, la raison est simple : le débat n'est pas organisé par le gouvernement, mais par un parti politique. Pas question donc pour le chef du gouvernement d'y mettre pieds. Mais l'absence de Fillon n'est d'autre part que le résultat de ses accrochages avec le chef de file de l'UMP, François Copé. Lors d'un déjeuner autour de leur mentor, Sarkozy, les deux hommes avaient eu un «échange assez vif» après que Copé a ouvertement reproché à Fillon sur un plateau de télévision de «ne pas jouer collectif». … fissures à l'UMP Au sein de la majorité, François Copé risque fort de se retrouver seul. Fabienne Keller du bureau politique de l'UMP et en charge du débat sur la laïcité avait pour sa part proposé de laisser tomber ce débat et de «changer de méthode». Pour Bernard Accoyer, président de l'Assemblée Nationale, «la laïcité n'est pas le premier sujet qui préoccupe nos compatriotes», émettant sur les mêmes ondes que l'ancien membre de l'UMP et ancien Premier ministre Dominique de Villepin, qui souligne que «ce n'est ni le bon moment, ni la bonne méthode». Certains observateurs pensent tout de même que Copé aura eu l'occasion de s'affirmer à la droite de la droite, qu'il sortira du débat politiquement renforcé. La tactique serait de ne pas laisser le terrain à Marine le Pen. Une tactique électoraliste, donc, à un an des présidentielles. Des élections qui risquent de ne pas voir Sarkozy accéder au second tour.