Le racisme persistant en France inquiète le Conseil de l'Europe. Dans un contexte de montée des actes de haine dont ceux relevant de l'islamophobie, la Commission européenne contre le racisme et l'intolérance (ECRI) en appelle à des efforts impératifs de la part du gouvernement. Il faut que ça change ! C'est en ces cinq mots que peut être résumé le rapport de 55 pages sur le racisme en France publié ce mardi 1er mars par la Commission européenne contre le racisme et l'intolérance (ECRI). Sur la base des données du ministère de l'Intérieur, le rapport fait état d'une hausse globale de 14% des actes de violence motivés par le racisme entre 2012 et 2014. Venant en deuxième position après les actes antisémites, les actes islamophobes officiellement enregistrés ont, quant à eux, grimpé de 2%. Les discours politiques contribuent à banaliser la stigmatisation des musulmans Rappelant qu'elle avait pourtant appelé Paris à lutter contre le racisme antimusulman et à renforcer la vigilance pour mettre un terme à l'impunité, la Commission regrette que «la situation en matière de discours de haine islamophobe reste préoccupante». De plus, «le rejet des musulmans est alimenté par le discours de certains responsables politiques», ajoute l'institution faisant allusion notamment aux propos de Marine Le Pen en décembre 2010 comparant les prières de rue à l'occupation allemande, ou plus récemment aux propos du maire de Venelles qui appelait en mai 2015 sur son compte Twitter à l'interdiction du culte musulman en France, en réaction à l'annonce de la Convention de l'UMP sur l'islam en France. L'ECRI note également une «régulière stigmatisation» des musulmans notamment en marge des élections présidentielles de 2012 où diverses personnalités politiques exploitaient la question de la distribution de viande halal soulevée par Marine Le Pen, ou encore l'année dernière à l'annonce de la fameuse convention de l'UMP sur l'islam. «Cette situation contribue à banaliser la stigmatisation de ces groupes vulnérables», estime la Commission qui se dit «inquiète» pour ces minorités. La moindre dérive doit être punie par la loi Estimant que les politiques profitent ainsi des lacunes du dispositif pénal traitant des crimes de haine, l'ECRI recommande au gouvernement français d'ériger en infractions tout ce qui est expression publique d'une idéologie prônant la supériorité d'un ensemble de personnes, création ou direction d'un groupement qui promeut le racisme et même tout soutien à ce groupement ou participation à ses activités. Aussi, la Commission appelle à l'ajout au Code pénal d'«une disposition prévoyant expressément que le mobile raciste constitue une circonstance aggravante de toute infraction ordinaire». Le but étant de rendre plus efficace le dispositif pénal actuel face à la prolifération des discours de haine. Pour mieux résoudre les questions concrètes que pose le vivre ensemble au sein de la société française, l'ECRI propose une révision des curricula scolaires et programmes de formation des personnels pédagogiques, afin qu'enseignants et élèves puissent mieux comprendre les questions sociétales en lien avec les religions, les convictions ainsi que les incidences de l'immigration. L'expérience ayant par ailleurs prouvé que de nombreuses victimes d'actes racistes souffrent en silence, l'ECRI appelle le gouvernement français à mieux lutter contre la sous-déclaration du crime de haine en intensifiant la formation des représentants des forces de l'ordre concernant les relations avec la population. Le but étant d'améliorer leurs méthodes de travail en matière de recueil de plaintes et de contrôles d'identité, et mettre en œuvre les directives du ministère de la Justice concernant la réception des infractions à caractère raciste. Les experts du Conseil de l'Europe appelle également Paris à «clarifier» la réglementation sur le port du voile lors de sorties scolaires, estimant que le cadre réglementaire y afférent reste jusqu'à présent ambigu.