Le Maroc compte utiliser le rapport exhumé de l'UE pour que le Conseil de sécurité mette davantage de pression sur l'Algérie afin d'autoriser un recensement des populations des camps de Tindouf. En revanche, le Polisario joue la carte de l'exploration des ressources naturelles même si la Cour internationale de justice et une résolution de l'Assemblée général de l'ONU n'ont pas condamné de tels actes. Le recensement de la population des camps de Tindouf est le nouveau cheval de bataille de la diplomatie marocaine. Rabat s'appuie sur une recommandation allant dans ce sens de Ban Ki-moon pour solliciter du Conseil de sécurité de donner suite à la requête du secrétaire général des Nations Unies. Il en a fait la demande, le 13 avril, dans une lettre adressée aux Quinze par le représentant permanent du royaume à New York, Omar Hilal. Rabat exige plus qu'une recommandation du Conseil de sécurité Le Maroc compte également mettre à son profit les conclusions de l'enquête de 2007 de l'OLAF (Office anti-fraude de l'Union européenne), gardées secrètes pendant sept ans. Elles font état de détournements massifs des aides destinées aux habitants des camps mais surtout parle de «surestimation du nombre de réfugiés» de la part de l'Algérie, le pays hôte, et du Polisario. C'est sur ce point que le royaume a basé sa plaidoirie. Les nouvelles en provenance du Parlement européen crédibilisent entièrement sa demande de recensement. Preuve en est la résolution du 25 mars de la Commission du contrôle budgétaire du Parlement européen, présidée par l'Allemande Ingeborg Grässle. Celle-ci réclamait de la Commission européenne une réduction de son soutien alimentaire au Polisario afin qu'il couvre les besoins de 90 000 sahraouis au lieu des plus ou moins 160 000 avancés par la direction du Polisario et son parrain algérien. Fort de ce soutien, Rabat exige dans sa lettre au Conseil de sécurité de mettre davantage de pression sur l'Algérie afin d'autoriser le très attendu recensement. Le CS avait déjà dans ses résolutions 1978 (en 2011), 2044 (2012), 2099 (2013) et 2152 (en 2014) recommandé un enregistrement de la population. Exploration des ressources naturelles : l'avis de la Cour internationale de justice Si la carte des droits de l'Homme ne fait plus recette, le Polisario a d'autres cordes à son arc. Malgré les revers au Parlement européen sur les accords agricoles et de pêche conclus entre l'UE et le Maroc, il continue de miser sur la carte des ressources naturelles. Le Front s'appuie sur un avis, toutefois consultatif, datant du 12 février 2002 de Hans Corell, directeur des Affaires juridiques de l'ONU. Néanmoins, la réponse de l'ambassadeur laissait la porte grande ouverte à toutes les interprétations, soulignant que «la question de l'exploitation des ressources naturelles des territoires non-autonomes par les puissances qui les administrent a été portée devant la Cour internationale de Justice (…) Toutefois, la Cour n'a pas statué de façon décisive sur la légalité de l'exploitation des ressources des territoires non autonomes». Prenant les exemples du Timor oriental et de Nauru, il a ensuite précisé que «la Cour internationale de Justice ne s'est pas prononcée sur la légalité des activités économiques menées dans les territoires non autonomes. Il convient toutefois de noter que ni dans un cas, ni dans l'autre, l'exploitation des ressources minérales des territoires n'a été présentée comme illégale en soi». Les versions de l'Assemblée générale de l'ONU Même l'Assemblée générale de l'ONU n'a pas une position ferme et unique sur cette question. Ainsi dans ses résolutions 48/46 du 10 décembre 1992 et 49/40 du 9 décembre 1994, elle déclarait que «toute puissance administrante ou occupante qui prive les peuples coloniaux des territoires non autonomes de l'exercice de leurs droits légitimes sur leurs ressources naturelles ... viole les obligations solennelles qui lui incombent en vertu de la Charte des Nations Unies». Le 6 décembre 1995, la même AG adopte sur la même problématique la résolution 50/33. Celle-ci établissait une distinction entre les activités économiques qui sont préjudiciables aux habitants des territoires non autonomes et celles qui sont déployées dans leur intérêt. Au paragraphe 2 de ladite résolution, l'Assemblée générale a affirmé «la valeur des investissements économiques étrangers entrepris en collaboration avec les populations des territoires non autonomes et conformément à leurs vœux afin d'apporter une contribution valable au développement socioéconomique des territoires». Il faut également savoir que les résolutions de l'AG des Nations Unies ne sont pas contraignantes.