L'eurodéputé socialiste français Gilles Parngneaux est à l'initiative de la création du groupe d'amitié Maroc-UE en 2011. Les députés européens de ce groupe sont issus de plusieurs tendances politiques. Ils effectuent régulièrement des visites au Royaume, notamment dans les provinces du sud. Entretien réalisé par Noufissa Charaï L'Observateur du Maroc et d'Afrique : Votre dernière visite dans les provinces du sud du Maroc avec l'Union européenne remonte à avril 2015. Qu'avez-vous constaté ? Gilles Parngneaux : Très régulièrement, en tant que président du groupe d'amitié UE- Maroc, je me rends à Laâyoune ou à Dakhla, avec des députés européens, membres du groupe d'amitié et de sensibilités politiques différentes. Ces visites nous ont permis de voir sur place l'ampleur du développement des provinces du sud grâce et en vertu des mesures prises par le Royaume. Le constat d'un développement exponentiel en matière économique mais aussi sociale. Le Royaume investit massivement dans ses provinces du sud, notamment pour les énergies renouvelables ? A la veille de la Cop 21, on parle du lancement d'une plateforme électrique au niveau de la région euro-méditerranéenne. Quel rôle peut jouer le Maroc dans la coopération énergétique entre les pays du sud et l'UE ? Le Maroc est devenu le hub africain en matière d'énergie renouvelable. Le Sahara marocain est propice au développement de l'éolien et grâce à la nappe phréatique, il est propice à une agriculture écologique conforme à ce que nous voulons pour la Cop. Les énergies renouvelables, solaires, éoliennes mais aussi thermiques et hydrauliques, présentes dans le Sahara marocain sont un atout pour l'ensemble du Maghreb. Tout le monde va en profiter. Je suis favorable au développent, dans les provinces sud marocain, des énergies renouvelables. Pour avoir été présent à la signature de la plateforme électrique entre l'UE et le Maroc, je peux vous dire que 15% de la consommation énergétique européenne viendra de l'énergie produite par le Maroc dans les années à venir. En plus des interconnexions électriques, il y a aussi le projet d'interconnexion électrique par câble entre le Maroc et l'UE. Cette énergie renouvelable va profiter à la consommation énergique européenne mais aussi à toute la région, ce sont des enjeux économiques et écologiques forts avant la Cop 21 et 22. Un rapport de l'Office européen de lutte anti-fraude (OLAF) a révélé que les aides financières accordées par la Commission européenne au Polisario pour les camps de Tindouf ont été détournées. Où en est l'enquête ? Madame Ingeborg Grässle, responsable du contrôle budgétaire au Parlement européen, une proche d'Angela Merkel, est venue avec moi au Sahara. Elle a mis en avant les détournements concernant Tindouf. Cela fait des années maintenant que l'UE finance le Polisario alors qu'avec l'enquête de l'OLAF on a eu une preuve que les fonds ont été détournés au profit de la « nomenklatura » du Polisario. Nous avions proposé en 2013 avec les sociaux-démocrates d'aller à Tindouf. Nous sommes allés en Algérie et là, l'Etat algérien à la dernière minute, nous a expliqué qu'il y n'avait pas d'avion pour aller jusqu'à Tindouf. Ce n'est pas étonnant. L'Etat algérien ne voulait pas que des partenaires objectifs y aillent. Il ne voulait pas qu'on voit la misère des camps. Des observateurs de l'ONU disent que les conditions de vie à Tindouf sont pires que celles de certains réfugiés au Liban, en Turquie ou en Jordanie. C'est un problème humanitaire très grave. Le Maroc demande un recensement de la population présente dans les camps. Quelle solution préconisez-vous pour venir en aide à ces populations ? Le combat continue concernant Tindouf. Nous souhaitons une plus grande transparence, il faut connaitre la traçabilité des fonds, il faut que ces derniers arrivent bien à destination. Deuxièmement, nous avons demandé que l'aide soit conforme au nombre de personnes présentes sur place. Il est en effet important de savoir combien elles sont! Troisièmement, il faut avoir la possibilité d'aller à Tindouf! J'ai réclamé que nous puissions nous y rendre avec une délégation européenne. Récemment, il y a eu de graves inondations à Tindouf où des Sahraouis vivent dans des conditions déplorables. Nous sommes dans une situation humanitaire d'urgence, c'est une des populations les plus fragilisées dans le monde. C'est pour cela que nous réclamons que les Nations Unies aillent dans le sens de la proposition d'autonomie telle que le Maroc la préconise. La mission du la Minurso (Mission pour l'organisation d'un référendum au Sahara occidental) a été prolongée d'un an. Comment expliquez-vous, qu'après 40 ans, la situation du Sahara ne soit toujours pas débloquée au niveau des Nations Unies ? Nous sommes dans une période décisive. D'ici au 30 avril prochain il y a la résolution du Conseil de sécurité de l'ONU sur le Sahara. Il faut faire un certain nombre d'actions d'ici là pour monter en pression. Il faut que le Conseil prenne les bonnes décisions pour les populations qui vivent de façon misérable à Tindouf. L'ONU doit aussi permettre les retrouvailles du peuple sahraoui, de ceux qui sont à Laâyoune, à Dakhla avec ceux qui sont de l'autre côté. Ce sont des familles entières qui sont séparées et déchirées. Le Polisario est soutenu par l'Etat algérien, l'Algérie souhaite que rien ne change. Il faut rappeler à l'Algérie que la réconciliation avec le Maroc est nécessaire pour développer des partenariats économiques avec l'Europe. L'union du grand Maghreb reste un objectif pour le développement économique de la région. Cette séparation pénalise les deux pays, l'Algérie doit voir autre chose. Avoir une région autonome, organisée c'est aussi permettre à l'Algérie de connaitre un développement économique, compte tenu des relations qu'elle pourrait avoir avec le Maroc. Le Sahara marocain doit aussi faire face à un enjeu sécuritaire. Le plan d'autonomie proposé par le Maroc peut-il participer à la stabilisation de la région du Sahel ? Je crois que c'est « LA » solution qui permettra aux sahraouis de vivre leur quotidien de la meilleure façon qui soit. Elle permettra également aux habitants de Tindouf de sortir de cette situation humanitaire déplorable. La solution d'autonomie est nécessaire pour la sécurité de la zone. Les groupes terroristes sont à proximité, ils pullulent dans le Sahel. Selon des informations militaires, le borgne Mokhtar Belmokhtar, leader d'un groupe terroriste avant d'être tué, avait des complicités à l'intérieur des camps de Tindouf. Au moment où la France a donné un coup au terrorisme, notamment au Mali, le groupe de Belmokhtar avait quitté le Niger et le Mali pour se réfugier dans les camps de Tindouf. Quel jugement portez-vous sur les droits de l'homme au Maroc et plus particulièrement dans le Sahara ? Le Conseil National des droits l'homme (CNDH) dispose d'une antenne côté marocain. Nous avons reçu ses membres. Certains ont parlé de répressions policières disproportionnées. Mais je le dis et redis, parfois on a une répression identique en France. Il ne s'agit pas d'un phénomène anormal. Au Maroc, nous ne sommes pas dans une dictature. Les droits de l'homme sont respectés au Maroc et notamment dans les provinces du sud. Le CNDH fait un travail de suivi.