Suite à l'affaire du faux-halal en France, révélée par le magazine CB News, Bouchta Jebli nous raconte l'histoire-fiction d'un boucher halal illustrant ainsi la tromperie vécue par les musulmans de France. Avec une bonne dose de cupidité, la réalité dépasse la fiction. C'est l'histoire de Jilali Marga, plus connu sous le sobriquet Jilali Ingals tellement il ressemblait à Charles. Arrivé en France en 1972, les seuls mots qu'il connaissait étaient «oui» et «non». En même temps c'était plus que suffisant pour son patron qui n'avait besoin d'entendre que le oui. C'est ce même patron qui lui apprit un troisième mot : «m'sieur». Voilà qui fera taire Arlette Laguiller qui ne voit dans les patrons que des exploitants capitalistes sans conscience, ni humanité. Ainsi Jilali savait dire «Oui M'siou». A l'époque, le problème numéro un pour ces Marocains et plus largement les Maghrébins fraichement arrivés en France, c'était la nourriture halal. Pas de boucheries musulmanes, pas de rayon spécial dans les magasins. Le seul moyen pour manger de la viande halal, était de se faire justice soit même. Un couteau bien affuté, une ferme un peu isolée, des moutons bien engraissés, et l'affaire était emballée. A l'époque comme aujourd'hui, nul besoin de baignoire, contrairement à la légende urbaine véhiculée par un ex-candidat président qu'on préférerait aujourd'hui qualifier de futur ex-président. La petite boucherie de Mantes la Jolie La vague de regroupement familiale initiée dans les années 70 avait amplifié le besoin de viande halal pour les familles musulmanes. Il fallait bien nourrir toute cette marmaille. C'est à partir de ce moment que Jilali eut l'idée du siècle : ouvrir une boucherie halal à Mantes-la-Jolie en région parisienne. Dans cette ville à forte concentration en Marocains, le succès fut immédiat. Jilali roulait sur l'or, il était devenu le Rockfeller du quartier du Val Fourré. Il était le seul à avoir acheté une Peugeot 504 toute neuve en 1978. Pour gagner plus, Jilali refusait de travailler plus. Non, ce qu'il voulait c'était l'argent facile. Pour ce faire, il avait trouvé deux astuces. La première le pèlerinage à la Mecque. En ajoutant le préfixe Haj à son prénom, Jilali avait énormément gagné en respectabilité. Vendre de la viande halal quand on est Haj, c'est comme vendre des pneus quand on ressemble à un bibendum. Ainsi, le chiffre d'affaire avait doublé en l'espace de quelques mois grâce à ce petit artifice. Merguez au halouf : Marque déposée Deuxième technique pour gagner plus, en arnaquant plus, s'approvisionner des restes du Marché de Rungis, chez Brice l'auvergnat. Oui car quand on s'appelle Haj Jilali, on a plus besoin de prouver le caractère halal de sa viande. Ainsi les merguez de Jilali connues dans toute la région, jusqu'au Mureaux et même jusqu'à Trappes, étaient constituées des restes qui n'avaient pas trouvé preneur. Donc, les clients de Jilali se délectaient de merguez contenant quelques traces de cochon dans la composition. Dommage qu'il n'ait pas déposé son invention : merguez au porc, c'est une recette originale. Tout ce petit business ne provoquait aucun remords chez Jilali. Pourquoi donc en avoir alors que ses collègues bouchers halals, qu'il côtoyait à Rungis, avaient les mêmes pratiques. Pire, ceux qui étaient censés valider la conformité de la viande au rite musulman, étaient eux même peu regardant. Ainsi le certificateur de «La Mosquée de Pastis» (il n'y a pas de faute de frappe, c'est une mosquée sise dans la ville baptisée Ricard) venait régulièrement contrôler la conformité de la boucherie halal de Jilali. Mais avec ses lunettes en fonds de bouteilles, il n'y voyait pas plus clair que Mary Ingals. Il certifiait tout, même la compta de Jilali était devenu halal. Pourtant cela n'avait pas empêché le fisc de sanctionner notre ami boucher, par un douloureux redressement fiscal. Il en était même devenu sourd d'une oreille. "CB News m'a tueR" Mais ce petit accro n'avait pas entamé le train de vie dispendieux de Jilali. La clientèle continuait d'affluer, l'argent rentrait, et la viande halal (ou pas) était livrée. .. Jusqu'au jour où les doutes sur la filière du halal se firent de plus en plus pressant. Des reportages à la télévision et des dossiers dans les journaux avait semé la suspicion chez les musulmans de France. Résultat, le chiffre d'affaire de la boucherie chuta de 60%. C'est à ce moment que Haj Jilali a décida de prendre une retraite méritée et de se consacrer à la prière, et au jeu de carte avec les copains retraités. C'est un jeune Haj qui était le meilleur candidat pour la reprise de la boucherie. Haj Karim, 38 ans, avait fait l'offre la plus intéressante à Haj Jilali : 50 000€ pour le fond de commerce, payé en liquide. Une aubaine pour Haj Jilali qui pourra ainsi dissimuler une partie de cet argent au fisc. Tout était conclu et la cession avait été effectuée. Une semaine plus tard, Haj Jilali se rendit à sa banque pour déposer l'argent. Et là surprise quand son banquier lui annonça : «Monsieur Marga, vos 50 000€ sont faux. Il n'y a que des billets falsifiés.» Le choc, le drame, Haj Jilali était devenu rose comme du jambon de Parme. Sans un mot, il retourna chez lui le regard vitreux tel un zombie. Le soir, sa femme retrouva l'ex boucher la corde au cou, accroché à la charpente tel un vulgaire mouton. Moralité de l'histoire : Quand notre vie est construite sur du haram, mieux vaut éviter de vendre du halal. La malédiction de la famille Marga Jilali avait aussi transmis la fibre du commerce à ses enfants. Ghita sa fille s'était lancée dans le secteur de la cosmétique halal. Sa marque qu'elle avait tout simplement baptisée Marga Ghita, se vantait de ne pas avoir de graisse animale dans sa composition. Par contre, elle n'était pas allée au bout de son délire, puisque ses produits contenaient tout de même de l'alcool. En plus du concept quelque peu suspect de maquillage halal, on peut s'étonner qu'une cliente puisse acheter un maquillage portant le nom d'une pizza. « Bonjour, je souhaiterais prendre un rouge à lèvre Margarita, du fond de teint Calzone, du vernis à ongle Campione et bien sur votre fameux fard à joue Quatro Frommaggi. » Evidemment, son business n'a jamais décollé. Elle est décédée le 30 Février 2008, à bord d'un avion qui réussira à décoller, mais jamais à atterrir. Son frère cadet Toufik, prit la relève pour perpétuer l'héritage commerçant du paternel. Il s'était lancé dans le domaine des boissons non alcoolisées bien sûr. Plus précisément l'eau minérale halal. Sa marque Cristhalal, était une sorte d'ersatz de Cristaline avec un label Halal. On ne sait pas si c'est l'association des termes Christ et Halal qui eurent du mal à passer chez les musulmans, ou bien tout simplement le ridicule du concept. Il termina en prison après s'être fait attrapé en plein cambriolage d'un entrepôt de stockage de Cristaline.