Une cérémonie a eu lieu mardi dernier, 4 mai, dans la région néerlandaise de Zeeland, pour rendre hommage aux soldats marocains morts en 1940, lors de l'invasion allemande du pays. Une fondation de Marocains résidant à la Haye a organisé les commémorations, qui n'étaient malheureusement pas sans provoquer des réactions de la droite hollandaise. Ces faits ne se trouvent pas dans beaucoup de manuels d'histoire. En 1940, alors que le Maroc était sous protectorat de la France, le Sultan et futur roi Mohamed V a envoyé des troupes pour combattre aux côtés des alliés en Europe. 100 000 soldats marocains ont participé à la guerre en Europe, 30 000 d'entre eux auraient participé à la défense de la ville d'Anvers lors de l'invasion allemande en mai 1940, rapporte Mohamed Achachboun dans un livre publié en 2005 sur l'effort de guerre marocain. Les soldats étaient stationnés en Zeeland, région du sud-est des Pays-Bas, quand les troupes allemandes ont envahi les Pays-Bas. Au moins 19 seraient morts, enterrés sur le cimetière de guerre de Kapelle-Biezelinge à coté des soldats français tombés aux Pays-Bas. La France commémorait depuis longtemps ses compatriotes morts pour défendre ses voisins du nord, mais ce n'est que depuis deux ans que l'hymne chérifien y est joué en même temps que la Marseillaise. Selon le quotidien Algemeen Dagblad repris par l'Alliance Française du Zeeland, ce serait sur initiative de l'ambassadeur français aux Pays-Bas que l'apport marocain a trouvé sa place dans les commémorations en 2008. Cette année 2010, c'est la fondation «De Ontmoeting» qui a organisé la commémoration. 50 pères et fils marocains de la Haye se sont rassemblés pour déposer une gerbe au mémorial. Mais aux Pays-Bas, le Maroc reste surtout associé aux travailleurs immigrés venus dans les années 60 et 70. Ce chapitre du soutien marocain dans la deuxième guerre mondiale n'est pas connu par tout le monde. La droite populiste s'enflamme facilement et va jusqu'à nier certains faits. Pas plus tard qu'avant-hier (5 mai), l'hebdomadaire HP / de Tijd intitulait un de ses articles: «Les Marocains ne combattaient pas au Zeeland». L'auteur entamerait, selon lui, la «déconstruction d'un mythe»; les Marocains n'auraient tiré aucune balle en défense des Pays-Bas. Les enterrés seraient mort lorsque les troupes essayaient de fuir vers l'Angleterre. Morts noyés, sans combattre. L'auteur, clairement révisionniste, ne veut pas associer héroïsme aux soldats marocains aux Pays-Bas, et il trouve un écho dans les commentaires et forums d'extrême droite. En 2008, le quotidien de Volkskrant faisait état de plusieurs autres versions des faits. 15 Marocains seraient morts noyé de le canal de la Manche selon M. Hey, 12 selon le centre de documentation NIOD, qui comptait 7 Marocains morts lors de combats. Une guerre des chiffres qui pourrait bien laisser de côté l'essentiel. Pour le militant associatif Mohamed Achachboun, il est important de faire reconnaître l'histoire des combattants marocains aux Pays-Bas. Pour deux raisons: Il veut que la société néerlandaise apprenne les leçons de cette histoire, qu'elle puisse avoir un effet positif sur l'image des Marocains aux Pays-Bas aujourd'hui. «C'est mon idéal, car sans idéal on va nulle part. Les Marocains sont presque toujours décrits de manière négative dans la presse.» Montrer que cette image est très réductrice, voilà pourquoi Achachboun entreprend régulièrement des voyages au lieu de mémoire. Mais il y emmène aussi des jeunes issus de l'immigration marocaine. Il estime que pour ceux d'entre eux qui peuvent se sentir rejetés de la société néerlandaise, apprendre que leurs ancêtres ont contribué à libérer l'Europe du fascisme peut être très valorisant. Une valeur que la droite populiste s'empresse à ne pas faire valoir.