Après l'Afrique, le roi Mohammed VI met le cap sur le Conseil de coopération du Golfe. Le monarque a téléphoné au roi d'Arabie saoudite et à l'émir du Qatar en vue de mettre un terme à la grave crise diplomatique qui secoue le CCG. De retour au Maroc, le roi Mohammed VI entame une médiation, entre d'un côté le Qatar et l'Arabie saoudite, les Emirats et Bahreïn, de l'autre. Voilà plus d'une semaine que les trois pays ont décidé, d'un commun accord, de retirer leurs ambassadeurs respectifs accrédités à Doha. Une mesure pour dénoncer, en chœur, ce qu'ils qualifient d'«ingérence qatarie» dans leurs affaires internes. «Il a été demandé au Qatar de ne soutenir aucune action de nature à menacer la sécurité et la stabilité des Etats membres» du Conseil de coopération du Golfe, annoncent-ils dans un communiqué. Une allusion claire à la chaîne Al Jazeera, accusée de soutenir les Frères musulmans, que Riyad vient de déclarer, le 7 mars, «organisation terroriste». Un contexte favorable à la diplomatie royale Le contexte géopolitique de la région arabe permet à Mohammed VI d'entreprendre une telle initiative. Autrefois, l'Egypte était la mieux placée pour jouer ce rôle. Actuellement, elle n'est plus en mesure d'assumer cette responsabilité. En effet, depuis la destitution par l'armée du président démocratiquement élu, Mohamed Morsi issu des Frères musulmans, les relations entre le Caire et Doha sont dans une situation bien pire qu'elles n'étaient durant l'ère Hosni Moubarak. Les deux Etats sont au bord de la rupture diplomatique. Début janvier, le ministère qatari des Affaires étrangères exprimait dans, un communiqué, «la préoccupation de Doha face à au nombre croissant de manifestants tués en Egypte». Au passage il critiquait la décision du gouvernement égyptien de décréter les Frères musulmans «organisation terroriste», Une excuse selon le Qatar «pour tirer sur les manifestants et les tuer». Des appels téléphoniques au roi de l'Arabie saoudite et au prince Tamim Compte tenu de cette nouvelle donne sur la scène arabe, le roi du Maroc a téléphoné, le vendredi 14 mars, au roi Abdallah d'Arabie saoudite. Deux jours plus tard, c'est au tour de l'émir Tamim. Et ce n'est d'ailleurs pas la MAP qui l'a annoncé, comme à son habitude, mais une dépêche de l'agence de presse qatarie, reprise, d'ailleurs, par quasiment l'ensemble des supports arabes à l'exception des médias officiels au Maroc. En dépit de cette petite entorse, le timing des deux communications téléphoniques atteste de la médiation royale. Une médiation qui a des chances de réussite. Le roi Mohammed VI est en bons termes avec les dirigeants de l'Arabie saoudite, des Emirats et du Bahreïn, les alliés traditionnels du Maroc au sein du CCG. Et il en est de même avec le Qatar aujourd'hui. Le royaume a largement bénéficié de l'abdication du cheikh Hamad au profit de son fils Tamim. Le nouvel émir a même effectué, les 27 et 28 décembre dernier, une visite officielle au Maroc, où il s'était engagé à verser la part de son pays (1,5 milliard dollars) pour l'aide décidé en 2012, par le Conseil de coopération du Golfe, en faveur de Rabat. La semaine dernière, à l'occasion de la tenue à Rabat d'une session de la commission mixte maroco-qatarie, présidée par les deux chefs de gouvernements, Doha a déjà débloqué 500 millions de dollars du total de l'aide prévue.