Depuis 2004, en plein lune de miel avec l'Espagne de Zapatero, le Maroc s'est engagé, parfois même trop, dans la lutte contre l'immigration illégale à destination de l'Europe. Presque dix ans plus tard, le pays subi les revers de cette politique. Les ONG et l'ONU critiquent la multiplication des rafles et des déportations des Subsahariens. La multiplication d'actes racistes au Maroc interpelle l'opinion publique. A l'initiative du Comité Maroc du manifeste euro-africain sur la migration, une conférence-débat sera organisée, demain à Rabat au siège du club des avocats, pour débattre de cette poussée de la xénophobie au Maroc, spécialement, voire même exclusivement, contre les Subsahariens. Preuve en est les quatre assassinats racistes de ressortissants africains, entre juin et août «commis, près de Nador, à Tanger et à Rabat ayant pour auteurs des policiers ainsi que des citoyens ordinaires», assure l'ONG dans un communiqué. Des crimes dont les auteurs n'ont pas encore été traduits devant la justice. Mais la conférence du mercredi ne sera pas le seul rendez-vous pour dénoncer la politique de rafles et de déportations de Subsahariens vers le non-man's land entre le Maroc et l'Algérie. Le samedi 14 septembre à 17h00, un sit-in aura lieu à Rabat devant le siège du parlement. Le rôle de gendarme de l'Europe écorne l'image du Maroc L'AMDH, dans un rapport rendu public fin juillet, a estimé le nombre de migrants subsahariens expulsés du Maroc, entre janvier et juillet 2013, à 6400 personnes, parmi lesquelles figurent 22 enfants. Le 4 mars dernier, le rapporteur de l'ONU sur la torture, l'Argentin Juan Mendez a fait état, dans son rapport présenté devant les membres du conseil des droits de l'Homme, «de passages à tabac et de violences sexuelles subis par les migrants subsahariens tentant chaque année de se rendre en Europe par le détroit de Gibraltar ou via Ceuta et Melilla». Il en est de même pour des «abus systématiques subis par ces migrants, qui sont frappés avec des bâtons, des pierres ou d'autres objets, agressés sexuellement ou menacés d'agression sexuelle et soumis à d'autres formes de mauvais traitements consistant à les attacher avec des cordes, à leur causer des brûlures avec des briquets et à leur uriner dessus». Des remarques que l'actualité corrobore. Le 1er août dernier, soient onze jours avant le meurtre du jeune sénégalais Ismaila Faye à Rabat, une Ivoirienne, âgée de 16 ans, aurait été violée par cinq policiers, ceux-là même qui l'ont arrêté, quelques heures auparavant, à la médina de Tanger. Là aussi, aucune enquête n'a été lancée pour punir les coupables alors que les matricules des deux voitures utilisées par les éléments de la sûreté sont connues. Il aurait suffi d'un simple contrôle de routine pour savoir les noms complets des agents en service aux moments des faits. Aucune enquête n'a été non plus ordonnée concernant la mort, fin juillet dernier, d'un ressortissant congolais. Arrêté le 24 juillet dernier, pour être expulsé du Maroc via Oujda, l'homme avait trouvé la mort après avoir été jeté, au niveau d'Assilah, par la fenêtre d'un bus de police en marche. Idem pour la mort de Clément, Camerounais de nationalité, décédé le 16 mars dernier après avoir été passé à tabac par des forces de l'ordre marocaines et espagnoles, lors d'une tentative de passage à la frontière de Melilia.