Personne ne doit venir se mêler de la question de la frontière maroco-algérienne dont la fermeture est de la seule responsabilité du Maroc : c'est en substance le message du ministère des Affaires étrangères algérien adressé aujourd'hui aux avocats arabes venus manifester, près de Saïdia, il y a deux semaines pour réclamer sa réouverture. La petite danse - un pas en avant, deux pas en arrière - continue sans fin entre le Maroc et l'Algérie. Alors que le ministre algérien de l'Intérieur Dahou Ould Kablia, avait déclaré, fin avril, que la question frontalière pourrait «être résolue dans un avenir proche», aujourd'hui, mercredi 19 juin, l'Algérie renvoie dans les cordes les avocats arabes qui réclamaient l'ouverture des frontières dans une manifestation, le 8 juin. «L'Algérie ne lui prête pas la moindre importance», a fait savoir le porte-parole du ministre algérien des affaires étrangères, Amar Belani, selon El Watan, en référence à la déclaration faite par le secrétaire général de l'Union des avocats arabes le Libanais Omar Ezzine. Le 8 juin le syndicat professionnel international avait organisé une grande manifestation, sur les berges de l'oued Kiss, séparant les localités balnéaires de Marsat Ben M'hidi (Algérie) et Saïdia (Maroc), pour demander la réouverture de la frontière terrestre entre les deux pays fermée depuis 1994. L'Union «va constituer des commissions dont les rapports finaux seront transmis à l'Algérie, au Maroc et aux organisations internationales officielles pour exiger la réouverture de la frontière qu'aucun prétexte ne peut maintenir fermée», a déclaré, ce jour là, Omar Ezzine. Aujourd'hui, 11 jours plus tard, les avocats arabes enregistrent la réaction officielle et négative du ministère des Affaires étrangères algérien lui-même. «La question de la réouverture de la frontière est une question de souveraineté qui relève du ressort exclusif du gouvernement algérien et les conditions qui doivent y présider sont connues de nos voisins», a répondu Amar Belani. Conditions sans conditions ? Alors qu'il y a même pas deux mois, le ministre algérien de l'Intérieur assurait : «il n'y a pas de conditions préalables, mais il faut un environnement propice» à l'ouverture des frontières, le ministre des Affaires étrangères énonce à présent clairement des conditions à remplir. Il faut : «l'arrêt de la campagne de dénigrement contre l'Algérie, une coopération sincère, efficiente et productive de résultat contre l'agression que nous subissons au quotidien en matière d'infiltration de drogues», selon le ministère. Le Maroc doit également respecter «la position du gouvernement algérien en ce qui concerne la question du Sahara occidental que nous considérons comme une question de décolonisation qui doit trouver un règlement conforme à la légalité internationale au sein des Nations unies.» L'initiative des avocats arabes, soutenue au Maroc, a définitivement froissé les Algériens. Parce que des avocats algériens avaient participé à la manifestation, le président de l'Union nationale des barreaux d'Algérie s'est désolidarisé officiellement de la manifestation dès le lendemain. Spectateur de la manifestation le journaliste d'El Watan, principal quotidien algérien, ironise «pendant près d'une heure, ce speech a été vécu par les Algériens comme le tournage d'un film de fiction, tant de l'autre côté de la barrière, un cordon sécuritaire de sa majesté veillait au grain.»