La fermeture des frontières sud de l'Union européenne se renforce. L'Union européenne et le Maroc vont signer aujourd'hui un partenariat pour la mobilité. Il inclut la négociation ferme de l'accord de réadmission des migrants subsahariens irréguliers par le Maroc. L'UE pousse le Maroc à l'accepter depuis 10 ans. L'Union européenne va-t-elle enfin parvenir à ses fins ? Alors que s'est ouvert, ce matin, vendredi 7 juin, l'audience du procès de 21 Sénégalais accusés de dégradations de véhicules et violences sur agents de la force publique, devant le tribunal de première instance de Rabat, le Maroc signe, au même moment, au Luxembourg, en marge du Conseil Justice affaires intérieures, une «déclaration commune sur un partenariat pour la mobilité» avec l'Union européenne. Les 21 Sénégalais avaient été interpelés, à l'ambassade du Sénégal à Rabat, le 29 mai, alors qu'une centaine d'entre eux étaient venus se plaindre du peu de soutien offert par leur ambassade lors de l'expulsion de 16, fin mai, en toute illégalité, par le Maroc. Au sein du partenariat pour la mobilité est glissé l'accord de réadmission des immigrés irréguliers non-marocains de l'UE (qui sont passés par le Maroc pour arriver en Europe) que l'Union européenne tente de faire signer au Maroc depuis 2002. «Il est inadmissible que l'UE envisage de signer un accord de réadmission au moment même où au Maroc, la violation des droits des étrangers, migrants et réfugiés, atteint un niveau sans précédent», estime Stéphane Julinet, chargé de programme droit des étrangers et plaidoyer pour le GADEM. Tout refoulement d'immigrés irréguliers vers le Maroc mettrait donc en danger leurs droits de la même façon et bien plus que s'ils restaient en Europe. Exception pour les demandeurs d'asile L'accord de réadmission ne doit toutefois pas concerner les demandeurs d'asile. Tous les migrants qui auront fait leur demande d'asile au HCR de Rabat «même s'ils se rendent irrégulièrement en Espagne, ne pourront être réadmis par le Maroc s'ils sont arrêtés par la police. Le HCR de Rabat qui gère les demandes d'asile pour le Maroc transmettra le dossier des migrants aux instances espagnoles en charge du droit d'asile et tant que réponse ne sera pas donnée, le migrant pourra rester en Espagne», explique Marc Fawe, responsable des relations extérieures du HCR à Rabat. «Le partenariat pour la mobilité qui doit être signé aujourd'hui est en fait un engagement politique à négocier plusieurs accords dont l'accord de réadmission, en échange de facilitations de visa pour les Marocains», précise Stéphane Julinet. L'accord de réadmission lui-même ne sera pas signé aujourd'hui mais un nouveau pas sera franchi dans sa direction. Il est la formalisation de l'entente à laquelle sont parvenue le Maroc et l'Union européenne lors de la visite du président de la Commission européenne, Manuel Barroso, à Rabat, le 1er mars. «C'est un accord inégal : la réadmission est une autorisation pure et dure, tandis que les facilitations de visa sont hypothétiques et conditionnelles», estime-t-il. Barques interceptées et renvoyées Si l'accord de réadmission est finalement signé entre le Maroc et l'Union européenne, il aura pour conséquences que toutes les barques qui transportent des migrants en direction des côtes espagnoles et qui sont interceptées par la Guardia civil, au lieu d'être ramenées sur les côtes espagnoles, comme aujourd'hui, seront ramenées au Maroc, quelque soit la nationalité de ses occupants. Idem pour Sebta et Mélilia dont les centres de rétention administrative sont déjà surpeuplés. En théorie, tous les occupants de ces centres pourront être renvoyés au Maroc puisqu'il ne peut pas être contesté que tous ceux qui sont arrivés là sont passés par le Maroc, comme le précise l'unique condition de l'accord de réadmission. «Cependant, tous ceux qui auront demandé l'asile dans les enclaves espagnoles deviendront inexpulsables le temps de la procédure», précise Mar Fawe. Cette procédure peut durer des années. D'autre part, révèle Marc Fawe, «des accords de réadmission existe déjà entre le Maroc et l'Espagne, la France et l'Italie. L'accord de réadmission qui actuellement en discussion touchera toute l'Union européenne donc les choses changeront pour les migrants irréguliers dans les autres pays de l'Union européenne.»