Maroc 1-2 Gabon. Une défaite lourde, méritée, qui a surpris tout un stade, dépité tout un pays. N'enfonçons pas le couteau dans la plaie, il est inutile de revenir sur la piètre prestation du onze national dans ce match qui pourtant été crucial pour bien démarrer les éliminatoires de la CAN 2010 et Coupe du Monde 2010. Intéressons nous plutôt à la polémique qui grandit dans les médias marocains sur cette équipe du Maroc à l'étranger. C'est devenu un marronnier pour la presse locale. A chaque échec de l'équipe nationale de football lors des compétitions internationales, on nous désigne le coupable idéal : les joueurs marocains à l'étranger... qu'ils soient nés ou non à l'étranger. Le procès est simple et sans appel, ces joueurs évoluant dans les grand club européens n'auraient pas la fibre patriotique et ne mouilleraient pas assez la maillot rouge et vert. On peut citer un article du Matin du Sahara, l'édito du Soir Echos, ou même l'émission matinale de Hit Radio. Il y a unanimité : ces joueurs de l'étranger ont une marocanité light. Pour preuve, les animateurs de la matinale de Hit Radio vont même jusqu'à reprocher avec un humour graveleux l'ignorance de l'hymne nationale comme preuve de non patriotisme. Ils devraient juste réviser leurs classiques du foot et écouter un joueur célèbre tel que Michel Platini ancien capitaine de l'équipe de France et actuel président de l'UEFA affirmé qu'il n'a « jamais chanté l'hymne national avant un match » en ajoutant que « ce n'est pas parce qu'un joueur ne chante pas l'hymne national qu'il n'aime pas son pays. » Nous aimerions tous voir un de ces journalistes ou animateurs répondre à Platini qu'il n'était pas patriote ou qu'il n'a pas mouillé le maillot pour son pays. Tiens lui aussi a joué dans un club à l'étranger puisqu'il était à la Juventus de Turin. Ce genre de reproche bidon sur le chant ou non de l'hymne national avant un match, sur le patriotisme supposé, nous rappelle étrangement les baveux reproches d'un Le Pen sur cette équipe black-blanc-beur qui n'étaient pas assez française à son goût. Chez nous aussi les MRE nés au Maroc ou à l'étranger ne sont pas assez Marocain. Une défaite est donc tout simplement du au patriotisme des joueurs. Une explication lumineuse. Alors on se fend d'appellations douteuses, de formules faciles du genre : « le onze RME », « l'équipe du Maroc à l'étranger », et pourquoi pas plutôt pencher sur la « Zmag Team » ? On a très vite oublié que cette équipe du Maroc, avec un mélange de joueurs locaux et de joueurs marocains à l'étranger, mené par un brillant entraîneur qui a lui aussi évolué à l'étranger (Badou Zaki) avait fait vibrer tout un pays lors de la CAN 2004 en Tunisie avec un place en finale contre le pays organisateur. Le sélectionneur national avait eu l'intelligence de passer outre les futilités lié à un quota de joueur locaux ou à l'étranger. Ses seuls critères étaient la qualité du joueur, et son apport dans la composition d'équipe. On a vite oublié cette époque puisqu'on a cloué au pilori Badou Zaki qui a refusé qu'un Nourredine Naybet face la loi au sein de son équipe. La presse de l'époque est tombée sur le meilleur sélectionneur que le Maroc ait connu depuis de nombreuses années et a ainsi évité qu'un débat soit engagé sur une réforme au sein de la Fédération Royale Marocaine de Football ( FRMF). De même lors de la CAN 2008, tout le monde est tombé sur Henri Michel, accusé par certains joueurs (pas les meilleurs en plus) de favoriser les joueurs stars et laisser sur le banc de touche les locaux. Henri Michel est ainsi devenu une nouvelle victime expiatoire. La FRMF était ainsi encore épargnée. S'ouvrait alors la nouvelle page des joueurs locaux qui tombaient à pic puisque une nouvelle compétition africaine allait voir le jour et qui est uniquement dédiée aux joueurs évoluant dans les championnats locaux. Ainsi les incessantes demandes des journalistes allaient être satisfaites. Ils avaient enfin trouvé un écho favorable à leur populisme nationaliste primaire. Résultats des courses, le Maroc après avoir battu la Libye au match aller 3-1, perd au match retour 3-0. Il est ainsi éliminé par une équipe jugée très faible avant même d'accéder à la phase finale de ce championnat africain des joueurs locaux. Ne répétons pas le populisme à l'envers en insinuant que les joueurs locaux sont plus mauvais que les joueurs évoluant à l'étranger. Beaucoup des grands joueurs du onze national ont d'abord évolué dans les équipes au Maroc avant d'être recruté par une équipe étrangère, depuis Larbi Ben Barek, en passant par Merry Krimau, Badou Zaki ou Nourredine Naybet et Salaheddine Bassir. Mais ces joueurs ont surtout explosé en evoluant dans des équipes européennes beaucoup plus professionnelles et avec plus de moyen et d'experience que l'IZK de Khemisset ou le MCO d'Oujda. Je n'ai rien contre ces villes bien sûr, mais admettons tout de même que niveau club de foot elles ne font pas le poids face au FC Bordeaux, ou à l'Ajax d'Amsterdam. Mais le pragmatisme n'est pas de mise chez nos confrères journalistes qui tirent à boulet rouge sur des joueurs qui ont fait le choix de porter les couleurs de l'équipe nationale alors que ne l'oublions pas dans le milieu de l'athlétisme par exemple, nos stars locales n'hésitent pas à tourner le dos au drapeau marocain pour courrir sous la bannière d'autres nations. Alors laissons un peu travailler les sélectionneurs (on en consomme un par an quand même !!), réformons cette boite noire qu'est la FRMF, et arrêtons de laisser n'importe qui jouer au sléectionneur. Les journalistes qui critiquent les entraineurs ou les joueurs n'ont souvent même pas les qualités d'un bon journalistes et veulent s'improviser expert en football. Demandons leur juste de faire plus de 3 jongles d'affilé, et puisqu'ils donnent des leçons de patriotisme, voyons ce qu'ils sont prêt à offfrir à leur pays ?