Suite à la parution de la une du 2 Novembre du magazine Maroc Hebdo traitant les subsahariens de «Péril Noir», la colère a été intense chez les travailleurs immigrés subsahariens. Regroupés au sein de l'Organisation Démocratique des Travailleurs Immigrés au Maroc, ils ont rejoint les rangs des militants de l'Organisation Démocratique du Travail qui manifestaient hier Dimanche à Rabat leur «ras-le-bol général du gouvernement Benkirane». Une manière pour ces travailleurs étrangers de lancer un signal fort au gouvernement et de rappeler qu'ils sont des acteurs du développement économique du Royaume. «Egalité, justice et liberté», «non à l'exploitation», «y'en a marre», «nous sommes tous Africains», «différences = richesses», «oui à l'éducation des enfants immigrés» : voilà les principaux slogans qui ont retentis aux abords du centre-ville de Rabat. Dès 10 heures, ils étaient tous ensembles Marocains et étrangers, sur le pied de guerre pour braver la pluie de cette matinée et manifester leur indignation et leur colère suite à la parution d'un article jugé «haineux» publié dans l'hebdomadaire Maroc Hebdo International. Dans un communiqué rendu public, l'Organisation Démocratique des Travailleurs Immigrés au Maroc «s'insurge contre ce traitement médiatique à l'encontre de cette communauté et qualifie les sous-titres dudit hebdomadaire de racistes, de xénophobes et de négrophobes en particulier». Ainsi, «le chapeau de la publication généralise et traite toute la communauté noire de mendiants, de prostituées et de dealers de drogues», s'indigne Marcel Amiyeto, Secrétaire Général de l'Organisation Démocratique des Travailleurs Immigrés au Maroc (ODTIM), organisation affiliée à l'Organisation Démocratique du Travail (ODT). Un poids économique non négligeable «Notre syndicat regroupe 260 travailleurs étrangers qui participent au développement économique du Maroc. Ces personnes paient chaque mois un loyer très cher et s'acquittent de leurs factures d'eau, d'électricité et d'internet. Ils envoient leurs enfants dans des écoles privées chères puisqu'ils n'ont pas droit à l'école publique. Nous ne pouvons être ignorés indubitablement». Toutes ces dépenses participent ainsi au tissu économique du Royaume. «Nous sommes des travailleurs honnêtes, même si je reconnais que certains s'adonnent à des pratiques peu orthodoxes. Cela ne peut s'étendre à toute une communauté. Pour preuve, le frère de Rachida Dati, ex-ministre de la Justice française avait été arrêté pour trafic de drogue. Cela n'a pas écorné l'image des Maghrébins en France», poursuit Marcel Amiyeto. «Traiter les subsahariens de la sorte nous a écœuré, raison pour laquelle nous avons convenu de manifester notre désapprobation en compagnie de nos amis et frères marocains, de marcher pour dire non au racisme et à la xénophobie, non à la discrimination et à l'exploitation des travailleurs immigrants. Nous demandons aux parlementaires de faire respecter les conventions et accords internationaux ratifiés par le Maroc et d'arrêter les expulsions arbitraires vers le désert». Marcel Amiyeto, SG du 1er syndicat de travailleurs immigrés au Maroc Marcel Amiyeto, originaire de la République Démocratique du Congo vit au Maroc depuis 2004. Formé en audiovisuel, il a effectué plusieurs stages à la Soread 2M mais aussi à la Société Nationale de Radiodiffusion et de Télévision. Malgré ses compétences il confie n'avoir malheureusement pas été embauché, contrairement à ses camarades de classe qui occupent tous un poste dans le secteur. La loi marocaine en effet ne lui permet pas d'exercer dans le Royaume. « J'avais eu la chance d'être engagé dans une boite de production mais les choses se sont compliquées puisqu'il m'était impossible de signer le contrat à l'ANAPEC. J'ai été mis à la porte ». Marcel Amiyeto qui avait assisté au Forum Social Mondial en 2011 à Dakar a ainsi eu l'idée de créer de retour au Maroc un syndicat propre aux étrangers. Il a par la suite contacté des syndicats marocains pour une affiliation possible, puisqu'il est impossible selon la loi marocaine de former une centrale syndicale qui regrouperait des étrangers. Les dirigeants marocains font savoir au militant qu'ils « ont déjà assez de problèmes à gérer pour s'occuper encore des étrangers ». Se sentant « abandonné à son propre sort », Marcel Amiyeto ne se décourage pas pour autant. Il rencontre bien plus tard un ami marocain dont il avait fait la connaissance à Dakar qui l'invite à rejoindre l'Organisation Démocratique du Travail. C'est ainsi que l'Organisation Démocratique des Travailleurs Immigrés au Maroc a vu le jour le 1er Mai 2012. L'association ne regroupe pas seulement des subsahariens mais plutôt l'ensemble des étrangers résidant au Maroc.