Dans sa traque éperdue d'un attentat terroriste fomenté par un musulman jihadiste, la police new yorkaise est allée jusqu'à demander à ses informateurs de suciter des discours violents parmi des fidèles musulmans. Un ancien informateur a raconté son histoire à Associated Press. Associated Press poursuit son enquête depuis plus d'un an. Chaque avancée accable un peu plus le célèbre New York Police District. Dans une dépêche publiée aujourd'hui, mercredi 24 octobre, l'agence de presse américaine révèle que les informateurs payés par la police new yorkaise pour espionner les musulmans de New York devait adhérer à une stratégie bien particulière : «create and capture», autrement dit, ils devaient susciter des propos violents en lançant une conversation sur le jihad, par exemple, dans une mosquée. Révélée par Associated Press, en septembre dernier, l'espionnage systématique des musulmans de la métropole américaine avait fait scandale. La communauté marocaine et ses 9000 membres avait elle-même fait l'objet d'une surveillance appelée «l'Initiative Marocaine». Cette surveillance avait augmenté après les attentats à la bombe de 2003 à Casablanca et ceux de 2004 à Madrid où étaient impliqués des Marocains. «create and capture» L'espionnage des quartiers musulmans, des mosquées et les écoutes téléphoniques de l'unité secrète démographique de la police de New York effectués ces six dernières années n'ont abouti à aucune arrestation, ni à l'ouverture d'une quelconque enquête antiterroriste, avait finalement révélé Associated Press, le 20 août. Aujourd'hui, le témoignage de Shamiur Rahman, Américain d'origine bengalaise, ancien informateur au service de la police de la ville de New York, révèle que ces enquêtes n'ont pas simplement été discriminatoires et vaines, mais biaisées dès l'origine. Shamiur Rahman avait reçu l'ordre de lancer une conversation à propos du jihad ou du terrorisme pour ensuite retenir la réponse de ses interlocuteurs et la transmettre à la police de New York. Son travail pouvait lui rapporter jusqu'à 1000 dollars par mois. D'anciens employés du NYPD ont confirmé l'utilisation de cette stratégie au sein de la police. Suciter les délits Cette démarche où la police, indirectement, suscite les délits voire les crimes, pour mieux les empêcher, rappelle le procès du Marocain Amine El Khalifi, reconnu coupable le 14 septembre, d'une tentative d'attentat à la bombe contre le capitole, à Washington, le 17 février. Son procès avait montré que le FBI lui avait donné 5700 dollars, en plus d'armes et d'un gilet d'explosifs désactivés, pour lui permettre de mener à bien son envie de tuer. L'argent offert par le FBI a aidé Amine El Khalifi à se couper de sa famille en lui retirant la responsabilité qu'il s'était donné de subvenir à ses besoins. Avec l'intervention du FBI, les intentions d'Amine El Khalifi pouvaient-elles aboutir à autre chose qu'à leur concrétisation ? A New York, les pratique du NYPD n'ont rien à envier à celles du FBI. Shamiur Rahman a affirmé à AP qu'il se rappelait que la police lui avait demandé de faire semblant d'être l'«un des leurs» et qu'en fin de compte, l'opération n'était qu'une sorte de «théâtre de rue». Représentation manquée pour le NYPD qui n'a finalement pu réaliser que de menues arrestations en lien avec le cannabis, bien loin des attentats terroristes.