Tous les moyens sont bons pour obtenir le maximum de voix en campagne électorale. En tout cas, les candidats aux communales belges ne se sont pas donnés de limite géographique pour battre campagne. Certains ont fait le déplacement au Maroc et ont même rencontré les autorités. Le code électoral belge autorise à faire campagne par tous les moyens. Aussi, la législation sur la limitation des dépenses électorales n'oblige donc pas les candidats à déclarer leurs frais de voyage. Des ouvertures en vertu desquelles de nombreux candidats aux communales belges cette année, sont allés dans les pays d'origine des électeurs belges. Françoise Schepmans, candidate-bourgmestre Molenbeek et son parti, le Mouvement réformateur [MR] ont choisi le Maroc. Ils ont minitueusement préparé leur voyage en juin dernier «uniquement» pour des raisons électorales, a-t-elle révélé à l'hebdomadaire belge Le Moustique. La délégation a été reçue par le Premier ministre, Abdelilah Benkirane et le président de la chambre de commerce belgo-marocaine, Lucien Leuwenkroon. Ce fut «l'occasion pour elle de passer un message : non, le MR n'est pas éloigné des personnes originaires du Maroc. Nous avons voulu casser l'image négative que se plaisent à entretenir les autres partis à notre égard: celle d'une formation fermée aux immigrés», explique Mme Schepmans soulignant au passage que la déplacement au Maroc n'était pas seulement le fait de son parti : «Fadila Laanan [candidate socialiste d'origine marocaine] était sur place quelques semaines avant nous». Une opération séduction qui a suffi à glaner le maximum de voix au sein de la communauté belge originaire du royaume chérifien ? L'on ne saurait le dire. Toutefois, Françoise Schepmans a remporté les élections de bourgmestre dans la région de Molenbeek renversant un rival de près de 20 ans. «Sidérant» Bien que la loi ne condamne pas la quête d'électeurs sous d'autres cieux, les réactions de certains politiques sont plutôt virulentes concernant le cas du MR. «Des candidats belges qui vont chercher l'adoubement d'autorités et de ressortissants étrangers pour se faire élire, c'est le monde à l'envers», condamne le libéral Alain Destexhe. L'homme politique crie à un «détournement» du système démocratique belge. «Celui-ci a été conçu pour voter pour des gens en fonction de leurs idées et pas de leur appartenance ou sympathie ethnique, communautaire ou religieuse» martèle-t-il. Même au sein de la communauté belge originaire du royaume, ça choque. Pour Fatima Zibouh, politologue belge d'origine marocaine, il est inutile de faire du lobbying auprès des autorités politiques ou religieuses étrangères, «dans l'espoir qu'elles envoient des consignes de vote par-delà les frontières». Fatima Zibouh considère que «partir au Maroc pour mieux se faire comprendre de la population belge originaire de là-bas, c'est assez sidérant, quand on sait que de nombreux jeunes issus de l'immigration marocaine n'ont plus de lien avec le pays». «Marché électoral» «C'est faux !» lance Marco Martiniello, directeur du Centre d'études de l'ethnicité et des migrations [Cedem] à l'Université de Liège. D'après lui, la tendance à croire que les immigrés se détachent de leurs pays d'origine au bout de quelques années de résidence en Belgique est complètement erronée. «Avec la crise actuelle, des liens sont même rétablis avec la famille d'origine. Des jeunes issus de l'immigration marocaine vont jusqu'à envisager de partir au Maroc pour pouvoir travailler», fait-il savoir soulignant que «le marché électoral» actuel pousse les politiques à aller là où il pourra «attirer» autant d'électeurs que possible. Hamza Fassi-Fihri, président du CDH bruxellois [Centre démocrate humaniste] et l'un des 113 élus d'origine marocaine lors des communales, ne comprend pas pourquoi le cas du Maroc fait autant parler alors que toutes les communautés étrangères sont concernées par les voyages électoraux.