Le Groupe de travail sur la détention arbitraire des Nations unies a appelé les autorités marocaines à «la libération immédiate» de Soulaimane Raïssouni, dans un avis publié ce mardi et qui conclut que l'arrestation et la détention du journaliste interviennent après avoir «exercé pacifiquement» son droit à la liberté d'expression et qu'elles sont «arbitraires». Le Groupe de travail sur la détention arbitraire des Nations unies a publié, ce mardi, une nouvelle version de son avis concernant le journaliste marocain Soulaimane Raïssouni. Dans ses conclusions, le groupe onusien a affirmé que l'arrestation et la détention de l'ancien rédacteur en chef du journal Akhbar Alyaoum sont «arbitraires». Dans son nouvel avis, il a précisé que «la privation de liberté de Soulaimane Raïssouni est arbitraire en ce qu'elle est contraire aux articles 9, 10, 11 (par. 1), 19 et 21 (par. 1) de la Déclaration universelle des droits de l'homme et aux articles 9, 10 (par. 1), 14, 19 et 25 (al. a)) du Pacte, et relève des catégories I, II et III». Le Groupe a demandé au Gouvernement marocain de «prendre les mesures qui s'imposent pour remédier sans tarder à la situation de M. Raissouni et la rendre compatible avec les normes internationales applicables, notamment celles énoncées dans la Déclaration universelle des droits de l'homme et le Pacte». L'avis estime que, compte tenu de toutes les circonstances de l'espèce, y compris le risque d'atteinte à sa santé, «la mesure appropriée consisterait à libérer immédiatement M. Raïssouni et à lui accorder le droit d'obtenir réparation, notamment sous la forme d'une indemnisation, conformément au droit international». «Dans le contexte actuel de la pandémie mondiale de Covid-19 et de la menace qu'elle représente dans les lieux de détention, le Groupe de travail appelle le Gouvernement à prendre des mesures urgentes pour assurer la libération immédiate de M. Raissouni», insiste-t-on. «Le Groupe de travail demande instamment au Gouvernement de veiller à ce qu'une enquête approfondie et indépendante soit menée sur les circonstances de la privation arbitraire de liberté de M. Raïssouni, et de prendre les mesures qui s'imposent contre les responsables de la violation des droits de celui-ci.» Extrait de l'avis du groupe de travail Raissouni a été «détenu pour avoir exercé pacifiquement» sa liberté d'expression Dans son avis, le groupe de travail indique qu'il considère que Soulaimane Raïssouni a été «détenu pour avoir exercé pacifiquement» sa liberté d'expression garantie par l'article 19 de la Déclaration universelle des droits de l'homme et l'article 19 du Pacte, dans un éditorial dans lequel il reprochait aux autorités de poursuivre des milliers de personnes pour infraction à la législation liée à la pandémie de Covid-19. Un éditorial publié deux jours avant son arrestation. «Cette conclusion se fonde sur toutes les informations communiquées par les parties, en particulier sur le fait incontesté par le Gouvernement que l'arrestation de M. Raïssouni a eu lieu deux jours après la publication de l'éditorial, ce qui ne semble pas être une coïncidence», expliquent les experts. Ceux-ci annoncent le renvoi de l'affaire à plusieurs rapporteurs spéciaux de l'ONU, dont ceux sur la promotion et la protection du droit à la liberté d'opinion et d'expression, sur l'indépendance des juges et des avocats et sur la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, «pour qu'ils prennent les mesures qui s'imposent». L'avis demande aussi aux autorités marocaines ainsi qu'à la source du groupe de travail de «de l'informer de la suite donnée aux recommandations formulées dans le présent avis» et ce, dans un délai de six mois suivant la communication du présent avis. En juillet 2021, la chambre criminelle de première instance près la Cour d'appel de Casablanca a condamné à cinq ans de prison ferme le journaliste et ancien rédacteur en chef du journal Akhbar Alyaoum, accusé d'«agression sexuelle» pour des faits remontant à fin 2018. Il a été arrêté, puis placé en garde en vue en mai 2020, suite à une plainte déposée contre lui par un jeune homme se déclarant homosexuel. En février 2022, la Cour d'appel de Casablanca a confirmé le jugement.