Chassé croisé dans les airs ! Tandis que le Maroc s'est vidé de ses MRE vacanciers, il devient subitement le pays d'accueil de nouveaux migrants : les cigognes qui passent par la case Maroc pour retrouver la chaleur de l'Afrique. Alors que les MRE sont rentrés dans leur pays d'accueil après avoir passé l'été au Maroc, les cigognes d'Europe font, elles, le voyage inverse. Depuis la fin du mois d'août, elles ont commencé à quitter l'Europe pour migrer vers l'Afrique à la recherche de chaleur et de nourriture. Pouvant parcourir de 200 à 400 kilomètres par jour, elles restent en Afrique tout au long de l'hiver et reviennent vers leur pays d'origine dès le printemps pour entrer dans une période nuptiale, faire des petits et s'occuper de leur nid. Certaines commenceront même à revenir dès le mois de janvier. Transit par le Détroit de Gibraltar «Il y a deux axes migratoires majeurs empruntés par les cigognes blanches. Il y a le passage par le détroit de Gibraltar empruntés par les cigognes provenant des régions occidentales de l'Europe. Elles sont estimées à 100 000. Elles traversent donc une partie du Maroc, pour aller vers la Mauritanie ou le Sénégal, destinations finales. Puis le deuxième axe emprunté par les cigognes du reste de l'Europe est celui du Bosphore, c'est-à-dire en passant par la Turquie, la Palestine, l'Egypte, le Kenya et l'Afrique du Sud. Cette population est évaluée à 300 000», explique Abderrahmane Chemlali, président de l'APROCIB, l'Association de Protection des Cigognes Blanches Berkane. En plus de ces cigognes européennes qui transitent par le Maroc pour fuir la baisse de température, il existe également une population de cigognes africaines résidant au Maroc et qui, elle aussi, se dirige au même moment de l'année, vers les pays africains du sud pour se réchauffer. Cette espèce de cigogne est très présente dans la région de l'Orientale et à Berkane notamment. «Pour les cigognes africaines du Maroc, certaines partent de Casablanca où il y a des sites de nidification mais la plupart partent de Marrakech, Errachidia et passent par le Sahara pour se rendre en Mauritanie et au Sénégal», précise-t-il. Quelles paresseuses ! Néanmoins, de moins en moins de cigognes mènent leur voyage de migration en intégralité. «Les cigognes blanches sont de plus en plus paresseuses. Dès qu'elles trouvent de la nourriture sur leur chemin, elles s'installent et ne poursuivent plus leur voyage», déplore Abderrahmane Chemlali. Ainsi les pays où les cigognes interrompent leur migration sont le Portugal, l'Espagne et le Maroc car elles sont attirées par les dépotoirs à ciel ouverts de ces pays, source de nourriture. Conséquence : les cigognes se sédentarisent. Un réel problème explique Abderrahmane Chemlali car les cigognes sont de bons indicateurs pour les scientifiques afin de les informer des évolutions climatiques. Chose incroyable, même si les cigognes se sédentarisent, elles transmettent néanmoins à leurs petits l'instinct de migration qui fera que les cigogneaux migreront à leur tour. En plus d'être menacées par des périodes prolongées de sédentarisation, les cigognes sont confrontées à des risques aggravant leur taux de mortalité. Sécheresse en Afrique, pilons électriques, attaques par l'homme et notamment braconnage sont les risques qu'encourent les cigognes. C'est le cas notamment au Maroc. «Il y a une légende qui court et qui dit que manger de la viande de cigogne guérit du diabète», explique Abderrahmane Chemlali. Ainsi, des locaux croyant durs comme fer à cette légende n'hésitent pas à chasser l'oiseau avec des lance-pierre pour vendre sa viande. Mais grâce au travail de sensibilisation mené ces dernières années par des associations de protection des animaux dans l'Orientale, les populations ont appris à mieux respecter l'oiseau.