Avec l'arrivée du PJD au gouvernement, la politique cède du terrain au populisme. La recette n'est plus une exclusivité des têtes d'affiche de la Lampe. Les autres l'usent à souhait pour combattre les islamistes qui se trouvent pris à leur propre piège. Décidément, la polémique a pris le dessus sur la politique. La seconde est otage de la première. Un constat que confirme d'ailleurs le cru quotidien de l'actualité. Des sujets d'une banalité extrême qui se trouvent par n'importe quel miracle logés en couverture d'une certaine presse, au point d'en faire sa spécialité. Nous assistons à la floraison d'un business de la polémique qui, malheureusement, renseigne sur le niveau des joutes politiques de chez-nous : populistes et sans impact positif sur la vie des Marocains. Un tel ministre est pris en flagrant-photo avec deux très jolies filles lors d'une réception publique. La photo a fait le buzz, déclenchant un débat sur facebook entre pro et anti Aziz Rebbah. Et il en va de même pour la bise entre Mme Kaplan, l'épouse de l'ambassadeur des Etats-Unis à Rabat, et le chef du gouvernement, Abdelilah Benkirane au salon de l'aviation, tenu en mars dernier à Marrakech. Comme dans le cas de la photo du titulaire du département des Transports et de l'Equipement, l'initiative de Mme Kaplan a suscité le débat sur le net et ailleurs, au point que le patriarche du Mouvement unicité et réforme (MUR) Ahmed Raissouni, rentré depuis au Maroc, a mis en garde les ministres du PJD contre la tentation de tomber dans les pièges du protocole. Le week-end dernier à Nador, des sites web rapportent que la tenue vestimentaire, un peu légère, de l'actrice égyptienne, Poussi, aurait incommodé le ministre de la Communication, porte-parole du gouvernement, Mustapha El Khalifi. Les mêmes sources n'ont pas mentionné le degré de l'incommodation du ministre. Deux jours auparavant, un hebdomadaire arabophone titre à sa une sur la désormais très célèbre facture du repas avec boissons alcoolisées de 10.000 dh qu'aurait payé le ministre de l'Industrie et du Commerce lors d'un voyage en Afrique. Une «information» futile, sans importance. L'arroseur est arrosé Toutes ces affaires largement commentées sur le net concernent, uniquement, des ministres du PJD. Les autres membres de l'exécutif en sont d'ailleurs épargnés. Ce n'est pas là un hasard mais juste la conséquence d'un état des lieux : la formation islamiste du temps où elle occupait les bancs de l'opposition a brillé par son discours moralisateur au point d'en faire son principal cheval de bataille durant la campagne électorale des législatives anticipées du 25 novembre 2011 et bien avant cette échéance. Pour mémoire, le PJD a même organisé en 2009, sous la houlette de Aziz Rebbah, à l'époque secrétaire général de le jeunesse, une caravane pour la vertu. Maintenant qu'elle est au gouvernement, elle commence à s'adapter aux exigences de ce changement et du coup tombe dans les erreurs des débutants. Une aubaine pour les nouveaux chasseurs de la polémique. C'est de bonne guerre, sachant que le PJD et sa matrice le MUR n'ont pas lésiné sur les moyens pour attaquer films, festivals ou chanteurs qui ne cadrent pas avec la conception puritaine qu'ils se font de la société marocaine. On se souvient des boulets rouges tirés par le même Abdelilah Benkirane sur le film «les amours voilés» ou encore sur une caméra-woman de 2M en couverture au parlement parce qu'elle portait d'un léger t-shirt. La multiplication de ces petites affaires est du pain béni pour le PJD. Elle a le mérite d'occulter les graves problèmes, chômage, hausse des prix et violations des droits de l'Homme, et de mettre à la une de l'actualité des banalités...