Pour une meilleure lutte contre la violence sociale chez les mineurs et la radicalisation sur les réseaux sociaux, la sensibilisation destinée aux jeunes gagnerait à se faire dans un processus croisé, impliquant aussi les parents. L'association Bayti œuvre, dans ce sens, dans le cadre d'ateliers parents-enfants. Pour une meilleure efficacité de la sensibilisation contre les dangers de violence et de radicalisation chez les mineurs via les réseaux sociaux, le travail de proximité et de prévention doit se faire auprès des jeunes, mais aussi auprès de leurs parents. Dans un contexte mondial où l'utilisation inadéquate de ces outils devient une problématique, l'association Bayti pour la réinsertion sociale des enfants en situation difficile a opté pour une approche croisée, via des ateliers de travail mixtes qui regroupent les moins de 18 ans et des chefs de famille, hommes et femmes. «Les réseaux sociaux rendent accessibles des images qui comportent des violences très choquantes, des scènes d'agression et de viols filmés par leurs auteurs, des complices ou des particuliers qui n'interviennent pas pour venir en aide mais pour filmer et mettre en ligne», a rappelé auprès de Yabiladi Yamna Taltit, responsable formation et expertise à Bayti, dans le cadre d'un atelier tenu ce mardi à Casablanca, avec l'appui de l'Agence espagnole de coopération internationale. Accompagner les jeunes en situation difficile pour une meilleure utilisation Le danger est plus important, surtout si les jeunes qui accèdent à ces contenus sont en situation difficile, sans niveau de scolarité élevé pour distinguer les points positifs et négatifs d'Internet. «Des plateformes servent de recrutement pour les groupes radicaux, on y fait de l'apologie à des attentats terroristes, il y a des jeux addictifs qui représentent un réel danger, comme les jeux de défis par exemple ou ceux où la violence est banalisée», a souligné Yamna Taltit. L'intérêt d'assurer cette sensibilisation en impliquant de manière croisée les enfants et les parents a ainsi pour objectif de «connaître les représentations chez ces deux groupes, dans une approche interactive», surtout qu'«il existe aussi des parents accro aux outils numériques». De ce fait, «l'objectif est de conscientiser les parents aussi sur l'importance de donner le bon exemple en tant qu'utilisateurs à leurs enfants», face à l'émergence de pratique où «les parents sont les premiers à donner l'accès à l'outil numérique dès deux ans». L'importance pour les organisateurs est de «rétablir l'interaction entre parents et enfants, de manière à rappeler qu'il n'y a pas que les réseaux sociaux dans la vie et raviver ainsi les activités qui favorisent l'imagination et la créativité». «Je trouve que les parents sont démissionnaires sur plusieurs volets. Ils n'assument plus leurs fonctions parentales au-delà de la dimension économique, de nourrir les enfants et de les habiller. Il ne faut pas oublier que le devoir des parents consiste aussi à donner une bonne éducation à leurs enfants et à leur créer un espace où ils se sentent en sécurité.» Yamna Taltit, association Bayti Des mineurs en conflit avec la justice pour radicalisation Dans ce sens, les ateliers de Bayti se veulent aussi de «donner les moyens aux jeunes, parents et acteurs de la société civile de se prémunir contre les méfaits» d'une utilisation non responsable. «Le plus important, c'est d'être outillé pour en profiter sans subir ses éventuels méfaits : cyber harcèlement, cyber intimidation, pédophilie, radicalisation, addiction ou encore les dangers des jeux de défis», indique l'ONG. Cette initiative se base aussi sur «le rapport d'étude sur les facteurs de vulnérabilité, de risque et d'influence de la radicalisation et de la violence sociale des enfants et des jeunes» de Hakima Laala, professeure à la Faculté des sciences humaines de l'Université Hassan II de Mohammedia. Concernant la radicalisation au Maroc, ce document indique sur la base des statistiques qu'en 2013, 62 000 enfants ont été en contact avec la justice. 10 à 15% de ces mineurs «sont impliqués ou soupçonnés de terrorisme». Selon les données disponibles, ce nombre serait en augmentation, notamment en raison de l'accessibilité des moyens de radicalisation via Internet. Pour sa part, l'Observatoire du Nord des droits de l'Homme (ONERDH) a montré précédemment que «67% des jeunes Marocains qui ont quitté le Maroc pour rejoindre les mouvements extrémistes sont âgés de moins de 25 ans». Parmi eux, 74% «sont issus des quartiers défavorisés», majoritairement des jeunes vivant dans l'exclusion sociale.