Yasmina Ksikes s'est faite un nom dans le monde de la gastronomie aux Etats-Unis. Elle côtoie de grandes personnalités du pays de l'Oncle Sam comme l'ancien président Barack Obama. Elle s'apprête également à tourner un projet sur le Maroc avec Netflix. Yasmina Ksikes fait partie des personnes qui ne réfléchissent pas deux fois avant de prendre une décision, ce qui la fait parfois prendre des décisions «folles» et en même temps «belles et pleines d'amour». C'est ce qui s'est exactement passé au moment où elle a projeté d'émigrer aux Etats-Unis en 1996. «Je n'ai rien dit à mes parents sur ma décision de voyager, je suis sortie le matin pour aller à l'école, je leur ai dit que je passerai la journée avec une copine, je les ai embrassés, mais en fait j'allais à l'aéroport», a-t-elle confié à Yabiladi. A 21 ans à peine, Yasmina a ainsi choisi de laisser une lettre à ses parents au lieu de les confronter, craignant qu'ils s'opposent au projet. «Je l'ai laissée à mon petit frère et je lui ai dit de la leur donner à 20h, heure à laquelle j'arrivais à destination», se souvient-elle. «Je leur ai promis dans la lettre que je ne les décevrai pas, que je réaliserai mon rêve et assumerai la responsabilité de ma décision. Le plus important est qu'ils comprennent cette aventure dans laquelle j'ai décidé de me lancer. Mes parents la gardent toujours, et de temps en temps mon père me la lit.» Yasmina Ksikes L'amour du goût de l'aventure chez la Marocaine au pays de l'Oncle Sam a commencé un an avant qu'elle ne s'y installe. «Mes parents et moi avons obtenu un visa de 10 ans et avons voyagé aux Etats-Unis pour rendre visite à mon frère qui vit à Philadelphie. Lors de ma visite à New York, j'ai rencontré un groupe de personnes et j'ai beaucoup aimé le pays. J'ai réalisé alors que je retournerai vivre là-bas à ma manière, sans l'aide de mes parents». Yasmina est arrivée aux Etats-Unis avec 100$ qu'elle avait obtenus avec l'aide d'un de ses professeurs à l'école. Du design et la mode au monde de la cuisine Yasmina n'hésite jamais à prendre ses propres décisions depuis ses années d'école. Au baccalauréat, elle s'est rendue au lycée le matin pour ses cours de mathématiques et le soir, elle a décidé d'aller au Collège Lasalle. Après avoir quitté le lycée, elle a intégré le monde du design et de la mode en passant trois ans dans le dernier établissement. «Depuis toute jeune, je savais que je ferai carrière dans la couture, dans la cuisine ou dans la danse», se souvient-elle encore.
Revenant sur son aventure aux Etats-Unis, la Marocaine de 45 ans, aujourd'hui mère de deux enfants, raconte la suite de son histoire : «J'ai eu trois mois pour prouver à mes parents que j'avais pris la bonne décision, car il était prévu qu'ils rendent visite à mon frère à ce moment-là. Ainsi, dès que je suis arrivé à Philadelphie, j'ai travaillé comme styliste pour un groupe de ballet, et en même temps j'ai travaillé dans un café, ce qui m'a permis de maîtriser la langue anglaise. J'ai loué une maison et la vie a commencé à me sourire.» Peu de temps après, Yasmine a épousé son compagnon qui l'avait accueillie à ses débuts à Philadelphie, ce qui lui a permis d'obtenir une Green Card en peu de temps. Son travail au café et l'efficacité dont elle a fait preuve ont amené son employeur à lui proposer de travailler dans son nouveau restaurant. A ce moment-là, elle est entrée dans le monde de la cuisine. «Il m'a demandé de diriger le restaurant et de préparer le menu, où j'ai intégré une importante touche marocaine pour exprimer mon identité», nous confie la cheffe cuisinière. A vingt-quatre ans, Yasmina a reçu une autre offre pour travailler dans un hôtel restaurant à Washington, où elle a passé un an. A chaque fois, la Marocaine impressionne ses employeurs grâce à sa façon de travailler, qui lui ouvre des portes à de nouvelles expériences. Elle déménage alors à Miami pour diriger une branche hôtelière. «Au bout de quatre ans, j'avais gagné beaucoup d'argent et j'ai commencé à avoir un rôle important dans la famille».
Cependant, Yasmina Ksikes ne s'adapte pas à la vie à Miami. Elle décide de retourner à Philadelphie, s'est séparée de son mari «à l'amiable» et a poursuivi sa carrière. Elle travaille alors dans le restaurant qui la réunit avec son nouveau mari. «C'était le cousin du propriétaire et il possédait également un restaurant à Chicago. Nous sommes tombés amoureux au premier regard et six mois plus tard, j'ai déménagé à Chicago. Nous nous sommes mariés et je dirige le restaurant en cuisinant des plats marocains hérités de ma grand-mère.» Avec le temps, le projet a commencé à percer, ce qui fait décider le couple à déménager à Los Angeles avec ses deux enfants et d'ouvrir un nouveau restaurant. Mais l'impensable s'est produit : «Mon mari est mort d'une crise cardiaque dix jours après notre arrivée.» La vie de Yasmina bascule brusquement. «J'ai passé une année difficile et pleine de tristesse, j'ai remis de l'ordre dans mes idées et j'ai décidé de travailler sur un projet lié à la cuisine marocaine», nous confie-t-elle. «J'ai introduit des recettes marocaines qui n'existent pas aux Etats-Unis, comme le citron confit, la harissa, le zaalouk et plusieurs plats marocains traditionnels, que j'ai commencé à vendre dans les foires. Je préparais les plats dans la cuisine de la maison, ce qui m'a permis de m'occuper de mes enfants.» Yasmina Ksikes Ambassadeur de la culture Marocaine Grâce à cette expérience, Yasmina a été invité à cuisiner lors d'événements pour les Américains tombés amoureux de la cuisine marocaine, ainsi que des offres pour enseigner l'art culinaire du pays. De là est venue l'idée de lancer un projet sous le nom de «Lalla Mina» du nom de sa grand-mère, de qui elle a «hérité un certain nombre de choses, en plus de la cuisine, de la générosité et du bon accueil des clients». Elle est devenue célèbre à Los Angeles pour ses plats marocains, ce qui lui a permis de travailler avec un groupe de célébrités, dont Quincy Jones, Steven Spielberg, French Montana, Barack Obama, Tom Cruise, David Lynch et bien d'autres.
La cheffe cuisinière marocaine est non seulement admiré pour ses mets, mais aussi pour la façon dont ils sont présentés, ses cours de yoga, sa musique et l'énergie spirituelle qu'elle nourrissait, ainsi que l'énergie positive que ressentent ses clients. «Je suis fière de mes origines amazighes et je porte toujours des vêtements qui expriment mon identité ; parfois, je cuisine pieds nus ; je suis entourée de mes clients que je connais. Je leur parle du tajine, de son histoire et de ses ingrédients. Je cuisine et en même temps je les fais voyager avec moi au Maroc à travers ce que je propose. C'est à la fois de la cuisine et un travail spirituel», souligne-t-elle. Grâce à cela, Yasmina a reçu une offre de Google pour donner des cours sur d'éducation à la spiritualité en cuisine. La cheffe marocaine s'apprête à publier un livre sur la cuisine marocaine et le Maroc. Chaque recette sera accompagnée d'une histoire qu'elle a eue avec chaque plat, racontée par elle-même pour montrer ce que ces mets symbolisent pour elle. Ce livre, sur lequel elle travaille avec le photographe marocain basé aux Etats-Unis Noureddine El Ouarari, regroupera 50 recettes dont «chacune est porteuse d'un message». Il doit paraître en décembre prochain, en anglais et en arabe. Par ailleurs, Yasmina doit travailler avec la plateforme Netflix, pour un projet qui concerne le Maroc. Un programme aussi riche que les plats que préparent la cheffe marocaine.