Les archéologues n'ont pas fini de dévoiler les mystères cachés d'Al-Andalus. De nouveaux éléments permettent d'en savoir plus sur la présence romaine. Dernièrement exhumées, ces données pourraient servir à imager plus concrètement les rapports des Taïfas avec les derniers Romains de la péninsule. En Espagne, une équipe d'archéologues a récemment découvert des vestiges romains sous une tour islamique, lors de fouilles sur la plage d'El Moncayo, à Alicante. Cet espace se situe à cent mètres de la mer seulement. Il révèle une composition en deux sites, qui auraient servis à la fois au stockage et à la sécurisation du littoral. Les premières datations confirment que les trouvailles remontent à l'époque romaine et au début de celle musulmane d'Al-Andalus. En effet, le premier site aurait été mis en place entre les IIe et XIe siècles après Jésus-Christ. Le second date des Xe et XIe siècles. Un espace occupé par les Romains et prisé par les musulmans Selon l'Institut de recherche en archéologie et patrimoine historique (INAPH) de l'Université d'Alicante (UA), qui mène ces travaux en collaboration avec le conseil municipal de Guardamar et le Service provincial du littoral, les vestiges sont dispersés sur une large étendue, qui s'étalerait sur une importante superficie des dunes côtières. Vue aérienne de la villa romaine de Guardamar / Université d'Alicante El Español rappelle en effet que dans le passé, El Moncayo a abrité une colonie romaine entre les Ie et IVe siècles de notre ère et les Ve et VIe siècles. Les nouvelles fouilles ont désormais permis de documenter l'extension romaine sous-jacente, dont l'existence remonte au XIe siècle. Cette nouvelle partie correspondrait aux vestiges d'un ancien bâtiment résidentiel romain. Ce dernier a probablement pris la forme d'une villa, «dont les fondations forment un plan complexe, avec une série de pièces quadrangulaires alignées le long d'un grand couloir face à la mer, surmonté de deux grandes salles absidiales», selon les chercheurs. Mais l'habitation n'aurait pas servi uniquement aux Romains. Les données récentes suggèrent que cet espace aurait été attaqué et pillé à maintes reprises. Ce seraient des royautés des Taïfas qui auraient lorgné ce lieu stratégique sur la côte, au cours des premières années de leur mise en place entre les années 1039 et 1094, qui correspondent à la datation. Histoire : Lorsque Youssef ben Tachfine restaura le prestige d'Al-Andalus en combattant les Taïfas Des bâtiments ayant servi de fondations aux Taïfas Les archéologues de l'université d'Alicante expliquent aux médias espagnols que les «chambres spacieuses à tête de lit courbée», caractéristiques des villas de l'époque, auraient été abandonnées par les Romains, avant d'être réinvesties par les Taïfas. Ces dernières se seraient servis de plusieurs parties de cette plateforme solidement bâtie pour en faire une fondation et construire notamment une petite mosquée, servant par ailleurs de tour de d'entrepôt. Cette découverte permet d'analyser un peu plus l'ère d'Al-Andalus et la cohabitation des dynasties dans cette zone, avant sa réunification par Youssef ben Tachfine (1061 - 1106) sous les Almoravides (1040 – 1147). En 1031, les dirigeants omeyyades (1389 – 1031) ont en effet été contraints de quitter Al-Andalus, laissant derrière eux un territoire profondément divisé, en proie aux conflits armés et aux guerres. Cette situation a donné lieu à l'émergence des Taïfas (1031 – 1492), au sein desquelles chaque émir a mis en place une principauté sous la tutelle de sa famille et de ses proches. A travers les vestiges laissés depuis l'époque et qui ne sont pas encore tous connus, certaines régions du sud espagnol témoignent de cette cohabitation, où chrétiens et musulmans ont souvent tenté de renforcer leur règne à travers des alliances, notamment avec les Zirides (972 – 1148). Histoire : L'épopée de la dynastie amazighe des Zirides en Europe A Murcie, un groupe d'archéologues ont d'ailleurs découvert les vestiges intacts d'un ancien palais califal, permettant également de retracer des pans encore méconnus de l'histoire d'Al-Andalus. En 2019, les premiers éléments de cette trouvaille inédite ont indiqué une architecture étroitement apparentée à celle, unique, d'al-Madîna al-Zâhira, la «ville resplendissante» où des émirs omeyyades de Cordoue ont élu domicile de 978 à 1009.