La coalition civile pour la mise en oeuvre du caractère officiel de la langue amazigh regroupant des associations amazighes, féministes et de défense des droits, a rédigé un mémorandum de proposition d'amendements du projet de loi organique n° 26-16 sur l'amazighité, soumis au parlement en octobre dernier parle gouvernement d'Abdelilah Benkirane. Cette coalition, formée en 2016, se compose de plusieurs associations dont la fédération nationale des associations amazighe, ou encore l'observatoire amazigh des droits et libertés, l'organisation marocaine des droits de l'Homme, l'association marocaine des droits de l'Homme, en plus de collectifs féministes. Le gouvernement Benkirane avait, dans ses derniers jours avant le scrutin du 7 octobre, introduit le projet 26-16 dans le circuit législatif, mais ce texte avait suscité une opposition de la part de plusieurs structures amazighe, en raison de la longue durée que nécessiterait la mise en œuvre de ses dispositions. S'exprimant lors d'une conférence de presse en début de semaine, Ahmed Aassid, président de l'observatoire amazigh des droits et libertés, a expliqué que le mémo d'amendements sera soumis à l'ensemble des partis politiques, aux ministères concernés et aux différents groupes parlementaires et autres institutions nationales pour les convaincre et les conduire à reprendre ces amendements à leur compte en vue de la discussion sur le projet de loi. L'idée du Collectif est de considérer la langue amazighe comme un héritage symbolique commun et aussi comme une langue devant bénéficier de mesures globales qui garantissent sa protection et son usage sans discrimination ou limitation. Et déjà, le PAM et ses 102 députés ont annoncé leur adhésion au mémorandum critique envers le projet de loi, affirmant en outre leur disposition à présenter des amendements lors de la discussion parlementaire du texte. L'une des choses que conteste le Collectif est l'absence du caractère participatif dans l'élaboration du projet de loi. En effet, le gouvernement Benkirane avait lancé un appel à idées par messagerie électronique, une procédure boycottée par les associations membres de la coalition, qui continuent de demander leur implication dans la réflexion sur la mise en place de la loi. Dans ce projet de loi, il est recommandé d'introduire le caractère officiel de la langue amazighe dans les secteurs prioritaires sur une durée de 15 années et à l'école sur 10 ans, ce que les militants imazighen considèrent comme des périodes trop longues, essentiellement au regard de tout ce qui a été fait en la matière depuis 2001. Le Collectif suggère la mise en pratique des dispositions de la loi dans un délai de 5 à 7 ans, de la date de parution au Bulletin Officiel. Les Imazighen rejettent également la proposition voulant que l'Institut royal de la culture amazighe soit placé sous la tutelle du Conseil national des langues et de la culture marocaine, à mettre en place. Ils recommandent que l'Institut devienne une Académie et qu'elle porte le nom d'Académie Mohammed VI pur la langue amazighe, comme pour l'arabe. Cela étant, les signataires considèrent que l'Institut est une avancée majeure dans leur domaine, bien que son rôle se soit quelque peu éteint depuis quelques années ; en effet, l'Institut, depuis sa création en 2001, a permis de mettre en place les outils pédagogiques de l'apprentissage de l'amazigh, il a contribué au rayonnement de l'alphabet tifinagh et il a encouragé l'édition de manuels et ouvrages en amazigh. L'Institut demande également que soient retenus pour la langue l'ensemble des critères de l'amazigh originel, tant sur le ton que le vocabulaire, ou encore la syntaxe et la grammaire. Le projet de loi organique 26-16, qui parachèvera le dispositif de ce type de lois prévues dans la constitution, impose la rédaction de tous les documents administratifs et officiels dans les deux langues arabe et amazighe, essentiellement sur les cartes nationales d'identité, sur les passeports, en plus de la monnaie et des cachets officiels. Le projet divise la période d'entrée en vigueur de la loi en trois phases, 5 ans, 10 ans et 15 ans, pour l'enseignement, le parlement, les médias et la communication, l'administration et la justice. Enfin, et à l'inverse de son prédécesseur Abdelilah Benkirane, Saadeddine El Otmani avait reçu les membres du Collectif avant même sa nomination. Le chef du gouvernement est connu pour sa sympathie envers les questions de l'amazighité, à rebrousse-poil de sa formation, le PJD étant réputé comme d'autres formations pour son opposition à l'alphabet tifinagh et à la langue amazighe.