Algérie : Condamnation d'un artisan marocain à 15 ans de prison pour organisation d'immigration clandestine    Coopération sino-marocaine : Le Maroc, « un partenaire clé au sein de la BRI »    Investissements : Karim Zidane VRP du Maroc en Corée et au Japon    Rabat : Manifestation nationale des retraités contre le gel des pensions    Libye: L'union africaine réitère la pertinence des processus de Skhirat et de Bouznika    Ahmed Aboul Gheit appelle à une feuille de route pour le développement durable dans la région arabe    Le Sahara a augmenté de 10% sa superficie en moins d'un siècle    Italie : Les trottinettes électriques bientôt munies d'une plaque d'immatriculation    Sahara desert expands by 10% in under a century    Taznakht : The Grand finale of the Aït Ouaouzguit carpet festival    Maroc : Pour que la technologie ne devienne pas une arme contre les femmes    Taznakht : Clôture en beauté pour le Festival du tapis d'Aït Ouaouzguit    Les prévisions du lundi 25 novembre    COP29 : Un engagement financier de 300 MM$ jugé insuffisant par les pays en développement    Royal Air Maroc réceptionne son dixième Boeing 787-9 Dreamliner    Algérie : Un média accuse Lekjaa de «prendre en otage la CAF avec Pegasus»    Israël nomme un grand défenseur de la souveraineté du Maroc sur le Sahara et proche du parti républicain ambassadeur aux Etats-Unis    Inondations à Valence : Karima Benyaich réaffirme les liens de solidarité entre Rabat et l'Espagne    Ahmed Spins : L'étoile marocaine à l'affiche du Coachella 2025    PL : City humilié pour la 5e fois d'affilée (vidéos) !    Qualifs. Fiba Afro basket 25 : L'Equipe nationale s'incline pour la 3e fois !    Liga : Trois personnes arrêtées pour des insultes racistes lors du dernier « Clasico »    Le Maroc augmente son quota de l'espadon de l'Atlantique-Nord et du thon obèse    Boualem Sansal, l'Algérie et les droits humains    Terrorisme : Le Maroc dans le viseur des jihadistes sahéliens    Pologne : Les agriculteurs bloquent un poste-frontalier avec l'Ukraine    Grippe aviaire aux Etats-Unis: un premier cas détecté chez un enfant    Températures prévues pour le lundi 25 novembre 2024    COP29 : Le Maroc signe une participation remarquable    Investissement: Zidane en roadshow au Japon et en Corée pour promouvoir la destination Maroc    Rabat : Visa For Music, une clôture au diapason des cultures du monde    MAGAZINE : Starlight, des jurés à juger    Cinéma : Mohamed Khouyi, un éclat marocain au Festival du Caire    Grogne contre la LNFP et appels à la protestation    M. Motsepe se prononce sur le football féminin et le rôle du Maroc dans le développement du football en Afrique    Coup d'envoi de 5 centres de santé dans la région de Dakhla-Oued Eddahab    Royal Air Maroc accueille un nouveau Boeing 787-9 Dreamliner pour renforcer ses long-courriers    Lamia Boumehdi conduit le TP Mazembe vers son 1er sacre    Harry James Richer : «un impératif stratégique»    Création d'un réseau Maroc-Mauritanie de centres d'études et de recherches    La justice allemande confirme que Berlin a divulgué à Mohamed Hajib, un ancien terroriste, des renseignements sensibles transmises par les services sécuritaires marocains    SAR le Prince Héritier Moulay El Hassan reçoit à Casablanca le Président chinois    La Bourse de Casablanca dans le vert du 19 au 22 novembre    CAN U20 : Le Maroc bat la Libye (4-0), valide son billet    Plus de 50 morts au Liban, Biden s'oppose à la CPI et soutient les criminels sionistes    Un hub des artistes et des professionnels de la filière musicale africaine    Les arts, l'avenir et les enjeux de l'IA...    Speed-meetings : le sésame des artistes à Visa For Music    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



Passation des pouvoirs, et sourde hostilité, entre Abdelilah Benkirane et Saadeddine El Otmani
Publié dans PanoraPost le 07 - 04 - 2017

Et voilà ! Abdelilah Benkirane n'est plus chef du gouvernement. Ni sortant, ni désigné. Il n'est plus chef du gouvernement, tout court, devenant simple député. Il vient de procéder à la passation de pouvoirs avec son successeur Saadeddine El Otmani, au siège de la présidence du gouvernement. Mais les deux hommes ne sont pas seulement des dirigeants du PJD, numéro 1 et numéro 2. Ils sont aussi concurrents, voire adversaires, et c'est Benkirane qui a tiré le premier. Et qui sort le premier, aussi…
Voici la dépêche officielle de la MAP, relatant la passation des pouvoirs (photo) : « La cérémonie de passation des pouvoirs entre M. Saadeddine El Otmani, que SM le Roi Mohammed VI a nommé chef du gouvernement, et son prédécesseur, M. Abdelilah Benkirane, s'est déroulée jeudi à Rabat.
Dans une allocution de circonstance, M. Benkirane a félicité M. El Otmani pour la confiance placée en lui par Sa Majesté le Roi, louant, dans ce cadre, les qualités du nouveau chef du gouvernement.
M. Benkirane a exprimé, à cette occasion, son soutien à M. El Otmani, en lui souhaitant plein succès dans ses nouvelles fonctions.
Pour sa part, le nouveau chef du gouvernement s'est dit honoré de la confiance royale, précisant qu'il œuvrera à renforcer le rayonnement du Maroc, sous la conduite éclairée de SM le Roi Mohammed VI.
M. El Otmani a remercié M. Benkirane pour le soutien qu'il lui a apporté depuis sa nomination par le Souverain en tant que chef du gouvernement, soulignant qu'il continuera sur la voie et adoptera la méthodologie de son prédécesseur, qui constituent pour lui un appui et un soutien».
Voilà pour le protocole et la bienséance institutionnelle. Mais en réalité, il en va tout autrement. Les deux hommes ne s'apprécient guère et se livrent une guerre masquée, depuis de nombreuses années.
En effet, il faut savoir que, venant de la Jamaâ islamique fondée par Abdelilah Benkirane dans les années 80, aux côtés d'Abdallah Baha et Mohamed Yatim, El Otmani est l'un des leaders historiques de cette mouvance. Dans les années 90, et alors que les quatre dirigeants voulaient basculer dans la légalité constitutionnelle, c'est le jeune El Otmani, médecin respecté et consensuel, qui était à la manœuvre.
Le mouvement, passé de Jamaâ Islamique au Mouvement pour la réforme et le renouveau, fusionne avec la Ligue de l'avenir islamique dirigée par le cheikh Ahmed Raïssouni, et donne naissance au Mouvement unicité et réforme (MUR), matrice du futur PJD. Et par la suite, c'est toujours El Otmani qui s'est le plus approché du Dr Abdelkrim Khatib, lequel avait convaincu le roi Hassan II de le laisser faire une place aux leaders du MUR dans son parti moribond, le Mouvement populaire démocratique et constitutionnel (MPDC). Nous sommes à la deuxième moitié des années 90.
Khatib était médecin et très conservateur, comme El Otmani, mais il se méfait de Benkirane impétueux et imprévisible, entretenant des relations douteuses avec le ministère de l'Intérieur d'alors, un certain Driss Basri…
En 2003, Casablanca était secouée sous les bombes du 16 mai. L'idée était alors de dissoudre le PJD (nouvelle appellation du MPDC), et là encore, c'est El Otmani qui était monté au créneau, en sa qualité de secrétaire adjoint du PJD, le patron étant alors le Dr Khatib. Les deux ont su convaincre de la bonne foi et du positionnement pacifique du PJD, qui a évité la dissolution.
En 2004, c'est tout naturellement que le numéro 2 est devenu numéro 1, le Dr Khatib lui cédant sa place. « Benkirane n'a jamais accepté ce qu'il a considéré comme un camouflet, et depuis, il voue une farouche animosité à l'égard d'El Otmani », confie un dirigeant actuel du PJD. Quatre ans plus tard, la sociologie du parti a changé, évoluant au gré de l'avancée parlementaire du parti, passé entretemps à une quarantaine de députés. En 2008, donc, Benkirane rafle le secrétariat général à El Otmani, et commence alors une longue période de brouille frontale entre les deux hommes que tout sépare : la formation, les origines culturelles, l'érudition, l'approche humaine, le tempérament…
Alors qu'El Otmani retournait à son cabinet de psychiatre, multipliait les publications d'ouvrages et sillonnait le pays de part en part, à la rencontre paisible des citoyens et des militants du PJD, Benkirane faisait donner ses canonnières oratoires, caressant le peuple dans le sens du poil, disant ici et là ce que chacun voulait entendre, s'attaquant au palais et à l'entourage du roi, dégommant à grands tours de bras tous les corrompus dont il dira plus tard, chef du gouvernement : « Dieu pardonne ce qui est passé ».
En 2011, le PJD remporte largement les élections législatives, suite au printemps arabe, et Benkirane accède à la présidence du gouvernement. Il ne pouvait ignorer le dirigeant historique qu'était El Otmani. Celui-ci devient alors chef de la diplomatie. Mais en 2013, suite à une série d'erreurs dues à son inexpérience (comme aller voir l'opposition islamiste au Koweït alors qu'il dirigeait la diplomatie de son pays), le bon docteur a été abandonné en cours de chemin au premier remaniement ministériel. Il en a gardé une solide rancœur à l'égard de Benkirane qui, selon lui, ne l'a pas assez « défendu ». Il a eu quand même l'élégance de refuser de prendre la place d'un autre ministre PJD, préférant repartir chez-lui, à ses livres et à ses malades.
En 2012, Benkirane est triomphalement réélu à la tête du PJD et El Otmani prend la tête du Conseil national, et les choses ont continué ainsi jusqu'aux élections du 7 octobre. Si El Otmani est toujours égal à lui-même, ce n'est pas le cas de Benkirane, qui a commencé à croire en lui, à s'adresser au peuple dans un langage agressif contre le système politique, distillant les petites phrases et enchaînant les grands envolées, se croyant et se présentant comme le sauveur du pays en 2011. Cela a déplu, du plus haut au plus bas. Et cela a déplu aussi à El Otmani, régulièrement méprisé par Benkirane…
7 octobre 2016. Le PJD remporte les élections, et conquiert 125 sièges. Triomphe ? Non, première place seulement, avec 1,6 million de votants, sur 6,5 millions qui se sont prononcés, et sur un total d'inscrits de près de 16 millions d'électeurs. Le chef du gouvernement, immédiatement reconduit par le chef de l'Etat, a cru alors pouvoir se présenter comme l'élément incontournable de la politique nationale. Il a résisté, il a tenu bon, la garde haute, mais il a rompu.
Saadeddine El Otmani a été désigné à sa place, et il a été prompt à former un gouvernement, décrié par tous, ou presque, mais un gouvernement quand même. Et là, cette fois, c'est Benkirane qui sort et El Otmani qui entre.
Reste le congrès à venir du PJD… Qui prendra la tête du parti ? El Otmani ou Benkirane. Ce dernier, malgré tous les défauts qu'on lui connaît, reste légaliste. Pour se maintenir à la tête de sa formation, il lui faudra en faire amender les statuts, qui ne prévoient que deux mandats successifs. S'il le fait, il se reniera quelque part, car il rompra avec ses professions de foi et, une fois reconduit, il combattra son adversaire El Otmani et fissurera le PJD. S'il part, ce sera ce même El Otmani qui reviendra à la tête du parti. Et c'est le scénario le plus probable.
Et cette fois, selon le principe du « rira bien qui rira le dernier », c'est bien Saadeddine El Otmani qui aura eu le dernier mot, et qui ramènera le PJD à une ligne politique moins hégémonique, moins agressive, moins frontale. Une sorte de normalisation dans la réalité marocaine.


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.