Comme on pouvait s'y attendre, et après sa saisine par la Ligue des droits de l'homme (LDH) et le Comité contre l'islamophobie en France (CCIF), le Conseil d'Etat s'est prononcé vendredi 26 août contre l'arrêté « anti-burkini » de Villeneuve-Loubet (Alpes-Maritimes). Le port du burkini sur la plage de cette commune n'est donc plus interdit et, par effet mécanique (et juridique), ne devrait plus l'être sur l'ensemble du territoire français. En effet, le Conseil d'Etat a estimé que l'arrêté litigieux a porté « une atteinte grave et manifestement illégale aux libertés fondamentales que sont la liberté d'aller et venir, la liberté de conscience et la liberté personnelle ». Cette décision très attendue a mis fin à une polémique nationale sur la signification et la symbolique de ce vêtement, dans une France secouée par plusieurs actes terroristes ces deux dernières années. Mais la décision du Conseil d'Etat a ouvert la voie à la résistance des maires concernés et d'une partie de la classe politique française, droite et extrême-droite, qui réclamant désormais une loi. La France plonge donc, encore une fois, dans un de ces débats dont elle a le secret, et cette fois encore, c'est sur la laïcité, principe fondateur de la République. Ainsi, pour Catherine Kintzler, philosophe et socialiste de la laïcité, il ne s'agit pas d'une question juridique liée à la laïcité, mais d'une question davantage politique liée à l'acceptation (ou non) du communautarisme islamiste. Mais pour le Premier ministre Manuel Valls, « cette ordonnance du Conseil d'Etat n'épuise pas le débat ; énoncer le burkini, ce n'est en aucun cas mettre en cause une liberté individuelle. Il n'y a pas de liberté qui enferme les femmes ! C'est dénoncer un islamisme mortifère, rétrograde ». Plusieurs maires, dont ceux de Nice (Alpes-Maritimes) et Fréjus (Var), ont annoncé, vendredi 26 août, maintenir leurs arrêtés anti-burkini, malgré la décision du Conseil d'Etat. Le maire (LR) de cette station balnéaire, Lionel Luca, a d'ailleurs lui aussi annoncé vendredi qu'il ne retirait pas son arrêté anti-burkini. Les maires de la trentaine de villes concernées ont pourtant été sérieusement désavoués par la plus haute juridiction de l'ordre administratif en France, mais cette décision va placer désormais le débat sur le plan législatif, rappelant un peu ce qui s'était passé pour le voile à l'école en 2004. Ainsi, sur le plan politique, à droite et à l'extrême droite, nombreux sont ceux qui réclament désormais une loi d'interdiction. « Il faut que le parlement prenne ses responsabilités. Nous allons préparer une proposition de loi pour sécuriser les décisions des maires interdisant le burkini », annonce un député LR, prenant les devants. Quant au député Front National Gilbert Collard, il a affirmé qu' « il faut vite une loi pour l'interdire », car le Conseil d'Etat a invalidé une décision administrative et que seule une loi pourra aujourd'hui interdire le port du burkini.