Suite à la vague d'attentats qui ont secoué la France depuis plusieurs mois, les réactions commencent à apparaître… dernières en date, l'interdiction des burkinis sur des plages de France. La mesure paraît déplacée et a suscité l'étonnement, parfois les sarcasmes, de la presse étrangère. En France aussi, le Collectif contre l'islamophobie en France (CCIF) attend une décision du Conseil d'Etat sur la légalité de l'arrêté de Cannes, qu'il conteste. Ainsi, les trois municipalités de Villeneuve-Loubet, Cannes et, Sisco ont pris des arrêtés pour interdire cette tenue de bain portée par certaines femmes musulmanes pour couvrir tout leur corps pendant qu'elles se baignent. Et, fidèle à lui-même, le premier ministre Manuel Valls a affirmé que « le burkini n'est pas une nouvelle gamme de maillots de bain, une mode. C'est la traduction d'un projet politique, de contre-société, fondé notamment sur l'asservissement de la femme », laquelle femme ne se considère pas avilie pour autant en le portant. Valls refuse toutefois de légiférer et d'interdire cet accessoire dans la loi, préférant en laisser l'initiative aux maires des cités balnéaires. En revanche, la législation anti-voile intégral est en cours, rappelle le chef du gouvernement français. Cela crée des problèmes à la justice qui, saisie, ne sait comment se prononcer entre la légalité des décisions municipales et les libertés des uns et des autres. Cette mesure d'interdiction a suscité une levée de boucliers, tant en France qu'ailleurs, avec l'idée que cela encourage l'ostracisme envers une certaine population française musulmane et donne des arguments aux radicaux qui y verront un acte hostile envers l'islam, dans un de leurs raccourcis dont ils ont le secret. Et, de fait, trois femmes ont été verbalisées le week-end dernier sur les plages de Cannes (Alpes-Maritimes), qui a interdit le port de ces tenues de bain couvrantes, rapporte le Parisien/Aujourd'hui en France dans son édition du 17 août. Les trois femmes, âgées de 29, 32 et 57 ans, ont dû s'acquitter d'une amende de 38 euros lors du week-end du 15 août, a indiqué le cabinet du maire LR David Lisnard au quotidien. Six autres femmes se baignant en étant couvertes ont également été rappelées à l'ordre, sans être verbalisées, et « ont quitté la plage sans faire de difficulté », a-t-on précisé de même source au journal. Dans les médias étrangers, la chroniqueuse du Washington Post Kathleen Parker estime que les maires français qui ont choisi d'interdire le burkini sur les plages se trompent de combat. Pour sa part, la Süddeutsche Zeitung, quotidien de Munich, de centre gauche, considère que le burkini n'est pas une burka et que son interdiction ne s'explique que par une raison : l'islamophobie… en effet, ce vêtement ne couvre pas le visage et ne se heurte pas aux valeurs d'une société occidentale. Le bannir des plages ne cherche donc pas « à libérer la femme et à défendre la laïcité, mais signifie plutôt 'nous ne voulons pas de vous ici' ». Ainsi, juge le quotidien sur un ton sévère, « l'interdiction du burkini n'est pas le résultat d'un consensus forgé par un débat éclairé. Elle est le produit d'une islamophobie nourrie par les attentats terroristes et d'une politique de stigmatisation soutenue par [des] maires aux idées courtes ». Fidèle au sentiment général, l'éditorialiste du grand journal espagnol El País écrit : « Le burkini est moche et incommode. Il donne chaud et cache le corps. Il est choquant dans une société occidentale du 20ème siècle mais qui veut le porter doit être aussi libre de le faire que les religieuses de porter leurs coiffes ou les enfants pâles du Nord de l'Europe leurs combinaisons en néoprène pour se protéger du soleil ». Au Maroc, le débat sur le burkini alimente également les débats sur les réseaux, entre les pour et les contre, chacun y voyant une liberté de celles qui ont choisi de le porter, une liberté naturelle pour les premiers, excessive pour les seconds. Mais s'il n'est pas interdit dans l'espace public, le burkini l'est dans certains hôtels, « au motif d'hygiène et non de religion ». Une explication « ridicule » pour le quotidien conservateur britannique the Télégraph, qui pense que les règles d'hygiène, la sécurité des baignades ou encore la prévention des troubles à l'ordre public ne sont pas incompatibles avec le port du burkini. En Angleterre, la mode s'adapte doucement mais sûrement aux besoins des femmes musulmanes. Les burkinis sont d'ailleurs en vente dans plusieurs enseignes de prêt-à-porter.