Le ministre de la Justice et des Libertés Mustapha Ramid était l'invité à un débat organisé par nos confrères de l'Economiste, lors duquel il a expliqué et s'est expliqué sur le projet de Code pénal qu'il a soumis à la discussion publique. Il a tenu précisément à apporter des éclairages sur le rapport du projet à la religion. Verbatim. L'offense aux religions « J'ai tenu à inclure cette disposition de criminalisation de l'offense aux religions car je ne peux laisser les gens porter atteinte à l'islam, que je considère sacré. Et puis, comment demander, par exemple, au Danemark d'interdire la publication de caricatures sur le prophète Mohammed alors que chez nous, ce type de dessins n'est pas interdit. Par ailleurs, si on ne déclare pas illégale l'offense des religions, cela signifie qu'on laissera le soin de défendre ces religions à des gens qui ne sont pas habilités à le faire »… Exact. Cela n'est pas de l'avis du militant Ahmed Aassid : « En usant de votre majorité, vous aspirez à créer des croyants standardisés et vous souhaitez conduire les gens à croire à la même chose que vous et, à défaut, de les juger selon votre conception du Bien et du Mal ». Les relations sexuelles hors mariage Pour Mustapha Ramid, ce n'est pas le fait qu'il y ait relation sexuelle entre deux personnes non mariées qui pose problème, mais que cette relation soit connue. « Dans le code actuel, il existe des moyens de faire connaître une relation sexuelle par des moyens tels que la dénonciation orale ou écrite. Dans notre projet, un acte sexuel ne peut être établi que par le constat d'une autorité publique assermentée ou par l'aveu. En dehors de ces deux cas, cela ne nous concerne pas. On ne traquera pas les gens chez eux ou sur leur lit… Cependant, ne me demandez pas de changer les textes pour reconnaître la licité de ces types de relations, et je ne le ferai pas même si cela doit me conduire à présenter ma démission… Je suis un homme à principes, et un gouvernement sans principe est appelé, nécessairement, à tomber ». Du lit ?... Le jeûne en public « Quand nous parlons de jeûne en public, cela veut dire dans un espace public ; si un agent surprend deux individus fumant en cigarette à l'écart, cela ne saurait être tenu pour une rupture publique du jeûne, ainsi que nous l'avons encore dit tout récemment à un procureur qui nous questionnait sur la chose. Vous savez, la loi est un texte sociétal et non une lecture de la religion. Cela étant, même ceux qui boivent du vin en dehors de ramadan n'aiment pas voir des gens ne pas jeûner durant ce mois. Mais s'il existe des personnes défendant la rupture publique du jeûne et capables et disposés à affronter la société, je les invite à aller manger sur le boulevard Mohammed V, et vous verrez alors ce qui se produira ». Au lendemain du lynchage du jeune homme à Fès, cette sortie du ministre de la Justice est regrettable… La peine de mort « Tant que je serai en fonction, je ne saurais permettre à un terroriste de venir dans cette salle et de nous tuer tous, puis d'être condamné à une peine de prison qui coûtera un budget important à la communauté. Pas plus que je saurais accepter qu'un individu viole des enfants en série, les tue, et bénéfice ensuite d'une peine inférieure à la condamnation à mort. Pardonnez-moi, mais je ne permettrais pas que la peine de mort soit abolie, et ne vous gênez pas de me considérer comme arriéré ou sous-développé ». Réaction de Me Tayeb Omar : « L'un des concepteurs de la constitution m'a expliqué que l'article 20 qui dispose du droit à la vie a été rédigé dans le but d'abolir la peine de mort. La maintenir nous fait passer aux yeux de la communauté international comme ce mauvais élève qui dit défendre certains principes mais qui se montre incapable de les traduire dans sa loi ». Réponse de Ramid « On pourrait rester ici des jours sans réussir à nous convaincre mutuellement ». Il est comme cela, Ramid, il tient à ses convictions, même si elles peuvent par moments paraître décalées par rapport à la réalité. Il est ministre de la Justice et fait ce à quoi il croit, intimement.