Nous le disions cet après-midi, et la rumeur persistante est devenue insistante avant de devenir une réalité. Le roi Mohammed VI a donc accepté en début de soirée « les demandes de démission » des deux ministres Lahbib Choubani (Relations avec le parlement et la société civile, PJD) et Soumaia Benkhaldoune (déléguée à l'Enseignement supérieur, PJD) et la demande de décharge d'Abdelâdim Guerrouj (délégué à l'Education nationale, MP) de ses fonctions. C'est un très officiel communiqué du palais qui l'annonce. Le remaniement est donc pour bientôt, ou presque… Les ministres sont-ils vraiment démissionnaires ? Non. Aucun des trois ministres qui viennent de quitter le navire gouvernemental ne voulait partir. Choubani et Benkhaldoune, en plein dans leur tourmente sentimentalo-médiatique, ont dit, redit et fait dire qu' « ils y étaient, et y restaient »… Même leur parti ne les avait pas sollicités pour s'en aller, et aux dires de certains cadres du PJD, Benkirane serait affligé par leur départ. On a donc dû leur forcer la main, comme cela avait le cas pour Mohamed Ouzzine qui, avant de « démissionner », disait à qui voulait l'entendre qu'il ne partirait pas. Qui donc a pu leur forcer la main ? Le palais, à n'en point douter. Cette nouvelle technique de démission des ministres est donc de la pure communication politique, arguant de l'article 47 de la constitution qui dispose que « le Roi peut, à son initiative, et après consultation du Chef du gouvernement, mettre fin aux fonctions d'un ou de plusieurs membres du gouvernement. Le Chef du gouvernement peut demander au Roi de mettre fin aux fonctions d'un ou de plusieurs membres du gouvernement ». Le roi ne révoque pas ses ministres, leur « laissant » le soin d'en prendre l'initiative, et c'est le Chef du gouvernement qui soumet ces demandes de démissions au roi. Cela redore le blason de la fonction de chef du gouvernement. Cela étant, il aurait été de bon ton que ce dernier, ou même le roi, eussent pris l'initiative, vu les « erreurs » - d'Ouzzine pour le scandale du complexe Moulay Abdallah – et les « errements » - de Choubani et de Benkhaldoune pour polygamie ministérielle à rebrousse-poil de la marche du pays. Il aurait été plus utile que Benkirane agisse avec Ouzine, Choubani et Benkhaldoune comme il l'a fait avec Guerrouj. Ce dernier paie donc, mais très tard, le prix du « scandale du chocolat » d'une cérémonie familiale, payé par le ministère de la Fonction publique dont il avait la charge, ce qui avait défrayé la chronique en janvier 2014, plusieurs mois après les faits. Lui n'a pas démissionné, on l'a déchargé de ses fonctions, ce qui signifie que c'est Benkirane qui a demandé sa révocation par le roi. Cela étant, le massage est désormais clair. Les ministres doivent avoir une conduite irréprochable, ou partir. Mais alors, il faut à l'avenir être plus clair. Ils ne démissionnent pas, ils sont révoqués, comme cela a été le cas pour Guerrouj (ce qui risque de faire réagir le MP). Pour quand, le remaniement ? Cela fait maintenant en effet quatre mois que le Maroc vit sans ministre de la Jeunesse et des Sports, en dépit du fait que la Fédération royale marocaine de football était engagée dans un sérieux bras de fer avec la CAF auprès du tribunal de Lausanne au motif des sanctions pour la demande marocaine de report de la CAN 2015. Il est donc possible que le remaniement prenne du temps. A ce jour, cela fait quatre ministres donc qui ont quitté le gouvernement, dans une parfaite parité entre MP et PJD. Deux de ces départements sont très importants, le premier étant celui du Sport et le second est celui qui des Relations entre les deux institutions que sont le gouvernement et le parlement. Ni la constitution ni aucune coutume règlementaire ou politique ne fixe un délai pour le remplacement de ministres. Le remplacement pourrait donc avoir lieu demain, après-demain ou dans plusieurs jours, sinon plus... Qui pour remplacer les ministres « démissionnaires » Parmi les noms qui sont évoqués pour remplacer Choubani, celui d'Abdelali Hamieddine (successeur de Mustapha Ramid au Forum de la dignité) revient avec insistance au sein du PJD, mais il y a aussi celui de l'ancien ministre des Affaires étrangères et président du Conseil national du PJD Saadeddine Elotmani, prématurément sorti de l'équipe gouvernementale en novembre 2013. Pour prendre le portefeuille d'Ouzzine, pour lequel le SG du MP Mohand Laenser a tenu l'intérim durant 4 mois, quatre noms ont été soumis au chef du gouvernement parmi les cadres du MP. Concernant les ministères délégués à l'Enseignement supérieur et à l'Education nationale, on pourrait faire l'économie de remplaçants puisque ces deux postes avaient été créés de toutes pièces pour satisfaire les appétits ministériels des uns et des autres et maintenir un équilibre arithmétique au sein du gouvernement.