La Chambre des représentants adopte à la majorité le PLF 2025    Maroc : le budget 2025 approuvé avec 75 % des voix    COP29 : Le Maroc et l'AIE renforcent leur coopération pour 2024-2026    Le Maroc et le Qatar signent un accord pour la fourniture de 7,5 millions de tonnes de soufre sur dix ans    M Tower : Une nouvelle icône architecturale au cœur de Casablanca Finance City par Mfadel Group et Red Med Real Estate    Hicham Bennani : "Il y aura de belles surprises dès 2025"    Espagne : Pedro Sanchez remercie le Maroc pour son aide face aux inondations    Pays-Bas : après une séance ministérielle houleuse, une secrétaire d'Etat d'origine marocaine démissionne    Inondations à Valence: Les secouristes marocains font preuve d'efficacité    DGM : Averses de pluies avec chutes de neige et fortes rafales de vent vendredi et samedi dans plusieurs provinces    Covid-19: trois nouveau cas    21e Festival du Film de Marrakech : Le programme « Conversations », Une plateforme d'échanges uniques    La Fondation Al Mada lance l'Académie des Arts Régionale en partenariat avec le Ministère de l'Education Nationale du Préscolaire et des Sports    Rabat : Première Fashion Week au Mall du Carrousel    Hommage : Quincy Jones et le Maroc    Royaume-Uni : Le gouverneur de la BoE appelle à « reconstruire les relations » avec l'UE    Baisse inédite des naissances en France depuis la fin du baby-boom    Regragui: Le match contre le Gabon sera une confrontation "très ouverte et offensive"    Le Sénégal renforce ses infrastructures sportives    Hakimi et Díaz dans le Onze des joueurs africains les plus chères    Liquidité bancaire : le déficit se creuse de 6,63% du 7 au 13 novembre    Le Maroc se sert de technologies de pointe pour sécuriser ses frontières orientales et méridionales    Le diabète, une urgence sanitaire et économique au Maroc    Restauration du couvert forestier. Une priorité ivoirienne    L'Association internationale de la mutualité (AIM) intègre officiellement la Fondation Mohammed VI des sciences et de la santé comme membre partenaire    L'ex SG adjoint de l'ONU, Julian Harston à propos du Sahara marocain : «La souveraineté du Maroc est légitime et incontestable»    Création à Madrid de l'Association des étudiants marocains en Espagne    L'Office des Changes et la CGEM s'allient pour la mise en place d'un cadre formalisé d'échange et de coopération    Trump nomme Robert Kennedy Jr au poste de secrétaire à la Santé    Le festival Visa For Music revient pour une 11ème édition à Rabat    Oscars 2025 : "Everybody Loves Touda" de Nabil Ayouch éligible à toutes les catégories    Edito. Quinze ans, passionnément !    Rabat-Salé-Kénitra : Le CRI commande une étude sur les chaines de valeur de cinq secteurs    Le Franco-marocain Abdelatif Benazzi rate de justesse la présidence de World Rugby    Atlas Lions coach Regragui previews «open and offensive» clash as Morocco faces Gabon    Morocco's Abdelatif Benazzi falls short in World Rugby presidency bid    Football. Gabon-Maroc / Jour de match : Horaire ? Chaîne ?    UNAF U17. Maroc 24 / J2: Jeudi, c'était sans les Lionceaux    LDC (F) Maroc 24: L'AS FAR vise la tête du groupe en fin d'après-midi !    Mike Tyson vs Jake Paul : à quelle heure et sur quelle chaîne voir le combat en direct ?    La visite d'un responsable iranien au Maroc : Est-ce un pas vers l'ouverture des négociations pour la réconciliation des relations entre les deux pays ?    Maroc : l'opposition appelle le gouvernement à cesser ses attaques contre les institutions de gouvernance    644 cyberattaques signalées au Maroc en 2024, déclare Abdellatif Loudiyi    Premier roman de Mustapha Zem, «Les pas perdus» sort en édition marocaine    Le Conseil de gouvernement adopte un projet de loi relatif au code du médicament et de la pharmacie    Le Polisario a commémoré, en catimini, sa «guerre» contre les FAR    Russie : Une île de l'Arctique rayée de la carte à cause du changement climatique    Morocco : Tax breaks for military industry development    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



Mohamed Kouam, homme de science et de conscience
Publié dans Maroc Diplomatique le 16 - 09 - 2016

Mohamed Kouam était de ces êtres rares, qui creusent avec patience leurs sillons loin des projecteurs, les ensemencent avec efficience de graines de connaissance et lèguent leurs jardins de sagesse aux générations futures. Un cultivateur des savoirs fertiles, économe des discours inutiles, imperméable aux gratifications futiles, qui n'avait d'autre conviction que sa foi profonde dans l'intelligence humaine. Derrière la rigueur du scientifique, le pédagogue soucieux de l'épanouissement intellectuel de ses étudiants, derrière le président d'université, l'anthropologue attentif aux véritables attentes de la société civile, derrière le directeur de la Fondation Maison du Maroc, le promoteur de la renaissance culturelle de la vieille institution parisienne, tombée dans la somnolence des gestions routinières. L'homme du devoir se voyait, dans ses missions d'intérêt général, comme une modeste lanterne éclairant les chemins entrouverts. La démocratisation qualitative de la culture était sa constante andragogie, l'analyse projective son inaltérable méthodologie.
Nous partageâmes le bonheur de réaliser deux événements d'arts plastiques, il en était l'ordonnateur, j'en étais le directeur artistique. De nos longues conversations, nous sortions mutuellement enrichis. Sous l'exquise politesse, la sobre élégance, la désarmante gentillesse, je découvris progressivement le dialecticien connecteur de contradictions fécondatrices, le maïeuticien accoucheur d'idées novatrices, le praticien concrétiseur de visions germinatrices. Son approche clarificatrice démêlait avec la même souplesse les dossiers volumineux et les sujets épineux. Il avait l'art de conjuguer les contraires, d'explorer les solutions inventives pour résorber les antagonismes, de ménager les susceptibilités idéologiques sans jamais renoncer à son exigence éthique. Il naviguait entre stimulante complexité du réel et vitalisante diversité des possibles. Nous parlions des mutations civilisationnelles impulsées par la Révolution numérique, des transformations sociétales induites par les nouvelles technologies, des implications philosophiques des performances génétiques, du décalage entre les méthodes éducatives traumatogènes et leurs environnements sociaux allergènes, de l'obsolescence des modélisations technocratiques sans d'autre finalité que leur fonctionnalisme stérilisateur, de l'impérieuse nécessité d'une pensée créatrice, qui relève les formidables défis des temps présents. L'humaniste évoquait volontiers, en privé, l'inconsolable remords d'Albert Einstein d'avoir révélé les secrets de l'atome, et le cauchemardesque parallélisme entre fanatisme religieux et scientisme ravageur. La sentence irréfutable de François Rabelais, «Science sans conscience n'est que ruine de l'âme», était sa ligne de conduite.
L'exposition «Femmes-vibrations» d'Elisabeth Bouillot-Saha n'était pas évidente, tant par sa thématique invoquant les déesses-mères des origines, remémorant les sociétés matriarcales sans conflits et sans guerres, que par son esthétique déclinant dans leur nudité allégorique, des archétypes féminins délivrés de toute entrave, dans un établissement officiel traversé par les luttes intestines des fondamentalistes et des modernistes. Mohamed Kouam fit preuve d'une liberté de décision transcendant, avec délicatesse, les affrontements idéologiques, désarmant par anticipation les polémiques improductives, plaçant la raison, créative de l'art, au dessus de la politique restrictive de la raison. Il eut le même courage pour offrir sa vitrine parisienne à deux artistes marocaines transgressives, Souad Byad et Samira Aït El Maalam, activistes inspirées des droits humains, indomptables batailleuses du féminisme dans une société hantée par les voiles de l'ignorantisme. Deux plasticiennes surdouées bravant, sur leurs toiles subversives, la censure morale et les réactions viscérales, dénonçant, sans ménagement, les traditions fossilifères, les tabous plombifères, les interdits mortifères. Le rationalisme organisationnel de Mohamed Kouam s'accompagnait toujours d'une indéfectible ouverture d'esprit. Il ouvrait sans cesse les vannes émancipatrices de la liberté de création, de la liberté d'expression, de la liberté d'expérimentation. L'ingénieur, matérialisateur de l'imaginaire, est un utopiste par définition, concepteur de projets improbables dans le scepticisme ordinaire, réalisateur de prouesses inimaginables dans l'admiration processionnaire. Victor Hugo ne disait-il pas : «Les utopies d'aujourd'hui sont les réalités de demain» ? Depuis l'âge de pierre, la culture s'immerge dans l'invention, l'invention du sens dans le nihilisme chaotique, l'invention de la liberté dans le messianisme apocalyptique, l'invention de la dignité dans l'obscurantisme despotique. Il n'est d'humaine humanité que dans la culture. Un homme de qualité s'en va, son héritage demeure.


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.