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Affaire Amira Bouraoui : Les relations entre Paris et Alger entrent dans une zone de forte turbulence
Publié dans Maroc Diplomatique le 09 - 02 - 2023

Rien ne va plus entre Paris et Alger. La lune de miel amorcée depuis août 2022 n'aura été que de courte durée.
L'affaire de la militante algérienne Amira Bouraoui, arrêtée le 3 février à Tunis pour « franchissement illégal » des frontières et ayant regagné lundi sur un vol la France, a donné un énième coup de froid aux relations algéro-françaises souvent tendues et empreintes d'incompréhension et de suspicions.
A la faveur de l'intervention de l'ambassade de France à Tunis, il a été permis d'éviter à cette opposante algérienne, également détentrice d'un passeport français, son extradition vers l'Algérie.
Les autorités algériennes ont joué la carte périlleuse de l'escalade et de la remise en cause de tout ce qui a été construit depuis août 2022, suite à la visite du président Emmanuel Macron à Alger et octobre de la même année de la Première ministre française Elisabeth Borne, accompagnée d'une quinzaine de ministres, pour concrétiser la réconciliation entre les deux pays.
Aujourd'hui, à la faveur de la réaction « intempestive » et « disproportionnée » d'Alger, les relations entre les deux pays connaitront assurément, une fois de plus, une zone de forte turbulence.
D'après certains observateurs, les violentes accusations exprimées officiellement par les autorités algériennes contre la France à propos de cette affaire et le rappel de l'ambassadeur d'Algérie en France, témoignent de l'étendu de la « myopie qui a gagné le pouvoir algérien et son recours à des méthodes autant inappropriées que peu productives ».
Dans la cascade de réactions exagérées formulées par les autorités algériennes, le ministère algérien des Affaires étrangères a exprimé mercredi dans une note officielle à l'ambassade de France, « la ferme condamnation par l'Algérie de la violation de la souveraineté nationale par des personnels diplomatiques, consulaires et de sécurité relevant de l'Etat français ».
Bien plus étonnant, cette note réaffirme d'une manière chevaleresque que ces personnels « ont participé à une opération clandestine et illégale d'exfiltration d'une ressortissante algérienne dont la présence physique sur le territoire national est prescrite par la justice algérienne ».
La réaction violente et de colère des autorités algériennes était-elle justifiée ? L'usage de termes « exfiltration clandestine et illégale d'une ressortissante algérienne » est-il usuel dans le cas d'espèce dans les relations entre les pays ?
De l'avis d'un grand nombre d'analystes, il s'agit d'une grave incohérence dans les déclarations des autorités algériennes.
Quand on parle d'exfiltration illégale cela devrait concerner de prime abord un personnel diplomatique, agents ou personnel sécuritaire.
Dans le cas d'espèce, Amira Bouraoui, citoyenne ordinaire, n'occupe aucune fonction de ce type rendant l'usage du terme exfiltration excessif, inadéquat. Cela est d'autant plus dommageable, que subitement de pays ami, la France devient aux yeux des autorités algériennes un pays ennemi et que Paris utilise l'opposante Amira Bouraoui en tant qu'espionne !
Il s'agit dans ce cas précis d'une grave accusation, relèvent des observateurs avertis de la scène politique algérienne, qui pourrait conduire à la rupture des relations entre les deux pays.
L'autre accusation non justifiée concerne la mention « d'une ressortissante algérienne dont la présence physique sur le territoire national est prescrite par la justice algérienne ». Il faut noter que même harcelée par des autorités algériennes et objet de poursuites judiciaires, Bouraoui est bel et bien établie en Algérie, et ne peut aucunement la considérer en tant que clandestine dans son propre pays.
Autre effronterie, l'amalgame auquel se plait à jouer le pouvoir algérien en cherchant à nuire à la souveraineté nationale de la Tunisie en considérant le pays comme territoire national ou un simple Wilaya algérienne !
Manifestement, la réaction violente des autorités algériennes, exprime un état d'affolement, de colère mal contenue et d'un pouvoir à court d'arguments, précise-t-on de même source, qui dénonce un pouvoir aux abois qui ne recule pas à recourir à des méthodes extrêmes qui sont préjudiciables à ses propres intérêts et à son image.
Amira Bouraoui, médecin de formation âgée de 46 ans, s'est fait connaître en 2014 avec son engagement dans le mouvement « Barakat », qui a mené une campagne contre le quatrième mandat du président défunt, Abdelaziz Bouteflika.
Elle a tenté plusieurs fois de quitter l'Algérie ces derniers mois pour rendre visite à son fils établi en France, mais en vain.
Pour contredire la thèse du pouvoir algérien, l'opposante algérienne Amira Bouraoui a assuré que son départ pour la France n'est pas « un exil » et qu'elle sera « de retour très vite ».
Une fois de plus, les autorités algériennes, peu fiables en crise de légitimité, se trouvent embourbées dans une affaires dont elles ne possèdent ni les tenants ni les aboutissants.
Prisonnières de leurs propres contradictions et pointées du doigt depuis un certain temps, pour leur harcèlement systématique des militants des droits de l'Homme, ces autorités laissent encore une fois des plumes par leur aveuglement et leur propension à déformer les faits et créent une crise de toute pièce avec la France tout en étant incapable de détenir les ficelles qui leur permettent d'entrevoir une porte de sortie honorable de cet imbroglio.
Finalement, le comportement « irrationnel » des autorités algériennes renseigne fort sur les violations systématiques des droits de l'homme dans ce pays par le pouvoir algérien qui a jusqu'ici bénéficié du silence complice du parlement européen qui, pour des considérations d'intérêt économique, a préféré occulter la répression policière dont été victimes les militants du Hirak et actuellement ceux qui se mobilisent pour une Algérie démocratique et respectueuse des droits et libertés. Cela est d'autant plus curieux que le parlement européen ne rate aucune occasion pour taxer abusivement un pays comme le Maroc pour des motifs non innocents que suspects.


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