En France où le pouvoir d'achat des foyers a fortement été laminé par une inflation galopante dans un contexte mondial marqué par une hausse sans précédent d'un certain nombre de matières, la question d'instaurer une taxe exceptionnelle sur les entreprises ayant réalisé des « superprofits » fait débat. Cette polémique intervient alors que les dividendes versés aux actionnaires ont atteint des niveaux record au deuxième trimestre de l'année, selon les données collectées par le gérant d'actifs Janus Henderson. En effet, un nouveau record en euros a été battu dans l'hexagone pour un deuxième trimestre, avec 44,3 milliards versés. Dans le viseur, se trouvent notamment les entreprises énergétiques, qui devraient cumuler 200 milliards d'euros de bénéfices supplémentaires en 2022, d'après les chiffres de l'Agence internationale de l'énergie. La question d'une taxe sur les bénéfices des grandes entreprises qui ont profité de la reprise économique post-Covid et de l'inflation avait émergé à l'Assemblée nationale en juillet, à l'occasion de l'examen du budget rectificatif pour 2022, sur proposition des partis de gauche. Lire aussi: France: L'inflation à 6,1% sur un an en juillet Lors du passage du texte sur le pouvoir d'achat à l'Assemblée, plusieurs députés de l'opposition ont proposé des amendements pour mettre en place une « taxe exceptionnelle (de 25 % à 50 %) sur les superprofits » des différentes sociétés, pétrolières et gazières ou de transport maritime. Mais leur proposition a été rejetée aussi bien à l'Assemblée nationale qu'au Sénat. Opposé initialement à cette idée, l'exécutif affirmait plutôt miser sur « la responsabilité des entreprises ». Mais ce samedi, la première ministre Elisabeth Borne a indiqué sur les colonnes du journal "Le Parisien" ne pas « fermer la porte » à ce dispositif, déjà mis en place par d'autres pays européens. "Personne ne comprendrait que des entreprises dégagent des profits exceptionnels alors même que les Français peuvent être inquiets pour leur pouvoir d'achat », a affirmé la cheffe du gouvernement. "Je ne ferme pas la porte à taxer les super profits », a-t-elle ajouté, alors que les prix continuent de flamber partout dans le monde, frappant de plein fouet le pouvoir d'achat des foyers. Toutefois, Mme Borne a souligné qu'une nouvelle taxe n'est pas l'option prioritaire, estimant que les entreprises qui font des superprofits "doivent rendre du pouvoir d'achat aux Français en mobilisant les dispositifs votés début août » comme le triplement de la prime pouvoir d'achat sans charges sociales ni fiscalité. Certaines entreprises « ont déjà pris des engagements", comme les groupes CMA-CGM et TotalEnergies qui ont annoncé fin juillet des ristournes supplémentaires à leurs clients. "Nous veillerons à ce qu'ils soient respectés. Dans la période actuelle, tout le monde doit être responsable », a-t-elle insisté. Par ailleurs, une "mission flash" a été lancée par la commission des finances de l'Assemblée nationale. Elle doit commencer début septembre et s'achever fin octobre, avec des auditions qui concerneront notamment trois secteurs de l'énergie, du carburant et du fret maritime. Côté patronat, l'idée de cette taxe exceptionnelle ne passe pas. « On a une situation économique qui est moins mauvaise qu'ailleurs, n'augmentons pas les impôts », a déclaré, lundi, Geoffroy Roux de Bézieux, le président du Medef, première organisation patronale française, se disant opposé à ce que ces bénéfices soient taxés comme le réclame la gauche. Si les recettes fiscales de l'Etat au premier semestre 2022 ont augmenté de 27 milliards d'euros, c'est « grâce aux superprofits des entreprises », a-t-il argumenté. À ses yeux, "c'est l'Etat qui a engrangé le plus de superprofits cette année ».